dimanche 21 avril 2024

Netsah' Yehouda. Une présentation sommaire

 

Depuis 42 ans, c’est ã dire depuis mon arrivée en Israël, j’ai effectué une petite re-direction de mon activité professionnelle.

En France, j’avais fait mes débuts dans l’éducation. Education formelle dans les structures de la communauté juive, éducation informelle dans le cadre des éis, en étudiant en parallèle une licence de psychologue clinique.

En Israël, après avoir dirigé pendant deux ans un internat d’élèves de classes de terminale venus étudier en Israël tandis que les parents de la plupart d’entre eux vivaient en dehors d’Israël pendant que je poursuivais mes études de psychologie, je me trouvai rapidement engagé dans l’équipe de direction d’un internat, « Bet Hanna », spécialisé pour le traitement psycho-éducatif d’adolescents souffrant de lourds troubles du comportement et de l’équilibre mental, cette fois non plus en tant qu’éducateur mais en tant que psychologue clinicien.

Ces adolescents niaient pour la plupart d’entre eux leurs difficultés et ne visaient rien d’autre que d’être enfin non encore rejetés par la société.

En Israël, pays qui se bat pour sa survie depuis encore cinquante ans avant la déclaration d’indépendance, l’armée est le passeport le plus élémentaire à l’entrée dans la vie active.

Il est presque impossible de porter son regard sur l’armée israélienne avec comme références l’armée française, l’armée américaine ou toute autre armée du monde, dans lesquelles les adjudants, les officiers, les généraux paraissent appartenir à un autre monde que celui de la société civile, ont souvent été représentés comme des brutes, des individus qui sont devenus d’autant plus gradés qu’ils étaient plus têtes brûlées.

La société civile israélienne n’est composée pour ainsi dire que d’individus ayant servi trois ou plus d’années, et le résultat n’est pas une société militariste ou régie par des adjudants.

Le premier « contre-exemple » est le chef d’état major Raphaël Eytan, à qui l’armée doit la création d’une unité d’insertion de jeunes ayant grandi dans des milieux et des conditions qui les poussent à se retrouver exclus de la société.

La plupart de nos adolescents de « bet Hanna » doivent leur place dans la société aux efforts ajoutés de leur séjour de trois-quatre ans dans notre internat, puis de leur service militaire dans le cadre des « jeunes de Rafoul » comme ils sont communément nommés dans le pays (Rafoul est le diminutif de Raphaël).

Depuis maintenant six ou sept ans, j’accompagne le travail clinique d’une thérapeute employée dans le cadre du corps d’armée « netsah’ Yehouda » qui vient depuis ce matin de « béneficier » d’un privilège international : celui d’avoir été blâmé par la commission américaine de sécurité du fait des « exactions » de ses soldats.

Ce corps d’armée, créé il y a bientôt 25 ans est une autre facette du rôle social de l’armée israélienne. Ses soldats sont tous issus du milieu ultraorthodoxe, un milieu plus connu par le public international ces derniers temps que par le passé.

Ce milieu prône la non participation à la vie civile séculière, arguant que le seul circuit scolaire et professionnel acceptable pour les garçons et les hommes du milieu est l’étude de la Torah.

Du fait d’un vieil accord passé entre les représentants de cette frange de la société et le gouvernement du jeune Israël, les hommes de ce milieu bénéficient d’une exemption de service militaire tant que leur unique occupation est l’étude de la Torah.

Le corps d’armée « netsah’ Yehouda » (le mot netsah’ veut dire en hébreu « éternité » mais est l’acrostiche des mots « noar tsioni harédi » jeunesse sioniste ultraorthodoxe) a éte créé - à l’instar des « jeunes de Rafoul » pour permettre l’insertion des jeunes qui désirent s’insérer dans la société israélienne, malgré leur naissance et leur éducation en milieu ultraorthodoxe.

Ces jeunes sont pour beaucoup d’entre eux rejetés par leur milieu de provenance, par leur famille, bénéficient de ce fait du statut de « soldat isolé » durant leur service.

Ils font un service de deux ans précédé et suivi de périodes dans le cadre de structures scolaires et sociales les préparant à la vie civile active.

Accompagner une thérapeute affectée au suivi psychologique des soldats de cette unité n’est pas très différent de l’accompagnement des adolescents de Bet Hanna…à la différence que ne se trouvent chez les jeunes de Rafoul que des cas sociaux, alors que se trouvent dans Netsah’ Yehouda tant des individus sains que des individus en marge de la société, blessés du rejet dont ils font l’objet.

Il est bien clair à mes yeux d’israélien resté en contact avec le monde européen que la sanction que cette unité vient de subir est beaucoup plus politique que fondée sur la réalité, mais que la tendance européenne est d’être très affectée par les images d’une ville de Gaza en ruines et tombe très facilement dans une acceptation d'une éventuelle tendance militaire israélienne (armée d'occupation...) à la cruauté, aux exactions, si ce n'est au génocide.

Les soldats de Netsah’ Yehouda sont stationnés dans la Judée Samarie, ou « territoires occupés », ou « contestés » et ne sont nullement plus têtes brûlées que l’ensemble de l’armée israélienne, et nullement plus génocidaires que la société israélienne…

Les soldats de netsah’ Yehouda sont un des multiples pans de l’activité sioniste des cent dernières années dont le centre est la mise en harmonie d’un peuple reconstitué après deux mille ans d’exil.
Cette activité est en oeuvre tant au plan des multiples provenances géographiques (juifs issus des pays d’Europe, d’Afrique du nord, d’orient, d’Afrique, d’Amérique) qu’à celui des rattachements à la pratique du judaïsme (juifs libéraux, ultraorthodoxes, sionistes nationalistes, laïcs) réunies en Israël

Ces soldats sont un peu un symbole de la difficulté à former cette harmonie. En clair, ils viennent d’être « vendus » (pour ne pas dire sacrifiés) à la vindicte internationale contre la "méchante" armée israélienne qui "extermine" les gentils enfants de Gaza.

Puisse la société israélienne surmonter le cauchemar dans lequel elle est plongée depuis le 7 octobre, qui durera tant que les otages restent aux mains des bourreaux du hamas, et qui occulte aux yeux du monde extérieur les multiples impressionnantes et positives facettes de son état, au plan social, au plan humain, au plan culturel, au plan artistique, au plan scientifique, et d’autres encore.

Je continue quant à moi à trouver  satisfaction et rétribution à accompagner les pans positifs du travail effectué ici avec une population dans son ensemble extraordinairement bien portante. 

1 commentaire:

  1. Tu devrais essayer de faire plublier ton texte dans le Monde . Peut être que Meir Waintrater ou d’autre peut t’aider ?

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