mardi 20 septembre 2022

Rajasthan 2022. Premier texte

 


De retour après 24 ans, impression similaire globale à celle vécue alors dans le nord de l’Inde : celle d’un pays qui grouille de monde à première impression, qui parait très sale, où l’idolâtrie est partout, où pullulent les sans abris….

...et qui laisse voir une toute autre dimension dans tous ces domaines, ainsi que dans de nombreux autres, après très peu de temps.

Notre première visite, du fort rouge de Agra, 



après trois heures de route depuis une Delhi où nous n’avons eu que très peu de temps, nous fait l’effet de devoir résister à un assaut, l’assaut que subit le touriste encore avant son arrivée, assaut destiné à le dépouiller au mieux, à profiter au maximum de son opulence. Cette impression pousse à répondre négativement à toutes les avances, de guide, de vente de colifichets, ou de transport en rickshaw.

La première impression aux abords de la rivière Yamouna vers la fin du même jour, quand un groupe après l’autre s’avance en procession tonitruante, de gens bariolés, dansant autour d’un chariot sur lequel est installée une statue entourée d’offrandes de toutes sortes, est d’assister à un culte incontestablement idolâtre.





Il fait aussi une chaleur torride…à laquelle nous étions préparés mais qui ne rend pas facile ces premiers contacts.

S’ajoutent à cela les lourdeurs administratives bien typiques de l’Inde et dont nous avons déjà goûté la veille au soir à notre arrivée : le douanier, gêné par une imprécision autour de mon numéro de passeport, celle d’un I qui peut se confondre avec un 1, reste de longues minutes devant son écran, reprend le passeport et l’examine, relit ce qui figure sur son écran, interroge son compagnon de la cabine voisine, reprend le passeport, prend l’air perplexe, ceci pendant que les gens passent et passent et que nous attendons…et ceci pour finalement nous donner notre visa d’entrée, et en s’excusant ! .

Ici, lors des examens de sécurité de mon matériel photo, disparait ( provisoirement) le jeton bleu que l’on reçoit à l’entrée du Taj Mahal et qu’il faut impérativement mettre dans la machine à la sortie…longs processus qui se terminent toujours bien (tout a toujours sa solution en Inde) mais qui pèsent sur ces premières impressions.

A notre seconde étape, du matin, après la nuit dans notre auberge pour hippies – non, nous ne faisons pas une régression : c’est l’hôtel duquel on a la meilleure vue sur le Taj Mahal.








 Il faut cependant y accéder, en affrontant le flot incessant des rickshaws qui entrent et sortent, se croisent, passent entre les piétons, les vaches et les motos. 

Pour le lendemain, nous adoptons pour la suggestion de notre chauffeur Narandra - et qui n’était pas à notre programme et nous nous rendons à Fadhepur Sikri.

Là, nous outrepassons notre tendance rituelle au refus et acceptons le guide…et en découvrons les nombreux avantages, celui de pouvoir dès lors circuler tranquille, ou quasi tranquille (les propositions d’achat de colifichets se poursuivent mais le guide fait barrage à bon pourcentage d’entre elles), celui de pouvoir découvrir des coins que nous n’aurions pas découverts par nous-mêmes, mais surtout de pouvoir interroger quelqu’un de local sur les spécificités de ce que nous visitons.






L’Inde n’est pas un pays. Plus qu’une grande péninsule, c’est un semi-continent, et ce que nous voyons n’est pas une culture mais une civilisation, plurimillénaire. Ce que nous réussissons à en apprendre au bout de quinze jours est l’équivalent de ce que retire le pinceau après avoir été juste pointé dans le pot de peinture. C’est peu, mais ça permet de dessiner parfois très joliment. Et donc, qui voudra réagir et corriger mes erreurs de néophyte sera le bienvenu.

Revenons donc un à un sur ces points déclinés en tête de page :

Le monde : il y a effectivement une surpopulation énorme mais alors qu’il y a 24 ans le slogan « two children is the best » était sur tous les murs, les appels sont aujourd’hui autres. Appels à ne pas gaspiller « do not waste food », appels à circuler prudemment « life is a gift. Drive safely ». C’est à dire qu’il s’agit d’une population d’individus auxquels on s’adresse, individus responsables, ou que l’on travaille à responsabiliser. 



Le nombre de vaccins administrés dépasse le milliard, et nombreux sont les endroits où le panneau « no mask no entry » est encore affiché. Le sentiment interpersonnel n’est nullement de mépris ou d’abus, ni du touriste, ni entre les indiens. On fait attention à ses affaires comme partout ailleurs en dehors de chez soi, mais on se rend bien compte que l’on n’est pas dans un repaire de brigands prêts à voler tout ce qui va dépasser ou non du sac. Le guide acheté avant le voyage définit l’Inde comme un pays sûr, et on ne se sent en danger de se faire agresser, dévaliser ou même pickpocketer à aucun moment. Circulent en Inde approximativement 200 millions de motos et scooters, qui font « grosse cylindrée » alors qu’il s’agit en général de 100 ou 160 cc, et elles sont toutes garées en tous endroits…et sans le moindre antivol. L’indien moyen arrête sa moto, éteint le moteur, enlève la clé et se suffit de cela. À côté de cela, les motos sont pour une, deux, trois, quatre ou même cinq personnes (le mieux que nous ayons vu mais que je n’ai pas eu le temps de photographier est cette moto conduite par un grand-père avec un petit enfant assis devant lui, et …trois derrière lui, visiblement à la sortie de l’école, les enfants étant tous vêtus des mêmes habits uniformes). Ils roulent le plus souvent à deux, l’homme conduisant, la femme assise derrière en écuyère, et ceci que ce soit en ville - c’est à dire au milieu de la cohue et du flot de véhicules zigzagant sans interruption - ou sur la route voire sur de très longues distances.




Cette surpopulation parait acceptée et même être la base de la vie en société, les gens sont serrés, sur les trottoirs (qui n’existent quasiment pas), sur la route ou dans les gares, aéroports, autobus ou autres. Les indiens ne montrent ainsi aucune réticence à la promiscuité dans aucune de ces situations mais ils ne se poussent pas. Ainsi d’homme à femme. On sent d’une part beaucoup de pudeur (les uns et les autres sont en général vêtus de manière à ne pas montrer leur corps) mais il n’y a pas cette retenue pudique d’un sexe à l’autre, ceci sans érotisation visible. Dans notre avion de retour, il y a un groupe d’étudiants. Passé un bref temps, deux filles viennent se joindre aux trois étudiants qui occupent la rangée à ma gauche, mais de telle étonnante manière qu’ils se retrouvent bientôt assis à quatre sur les trois sièges (dans lesquels trois personnes normales ne se sentent pas avec trop de place), et ils devisent paisiblement, et gaiement (parce que les indiens sont en général gais et rieurs dans leurs échanges verbaux) une heure durant, serrés et en s’en sentant au mieux, sans qu’aucune impression d’érotisation accompagne cela. C’est une séance non sexuée. Ils ne paraissent pas trop habitués à serrer la main mais se prêtent à cette coutume sans afficher de gêne ou de retenue a son égard. Sur la route, ils ne laissent pour ainsi dire jamais le passage, mais c’est parce qu’ils vont se retrouver serrés contre le véhicule auquel ils n’ont pas vraiment refusé la priorité mais tout près duquel ils circulent maintenant. Dans la rue ils ne se bousculent pas mais ils passent très très près, que cela soit à pied ou à moto, les motos circulent ainsi et se croisent dans les endroits les plus étroits. 




Quand il semble ne pas y avoir assez de place, il se passe que la place se crée, et que cela se produit sans animosité ou impatience…si on ne prend pas la quantité de klaxons comme critère de possible agacement. Ici le klaxon n’exprime pas l’agacement, juste la prévenance. Ils conduisent par ailleurs très habilement pour la plupart d’entre eux et à vitesse très modérée. Il ne faudrait quand même pas en déduire que l’on pourrait très bien louer un véhicule et conduire soi-même. Ce serait folie.

En clotûre de ce premier texte, une petite photo qui peut un peu résumer la situation de septembre 2022, en bordure de l'épidémie de corona, les gens viennent se photographier devant le taj Mahal dans leurs plus beaux atours, certains sont masqués, certains sont va-nu pieds, certains ont le meilleur matériel technologique, le tout en très bel assortiment de couleurs.


 

La suite au prochain numéro

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