La propreté. Alors que la rue indienne est excessivement sale, les rues n’ont pas ou plus de trottoirs, dans de très nombreux endroits, ce n’est pas goudronné et l’égout est à l’air libre quand il n’a pas débordé, le nettoyage est constant et même scrupuleux. De même qu’alors que beaucoup d’indiens sont pieds presque nus ou sont peu vêtus, ils se lavent souvent. Pour les rues, ce sont en général les femmes qui sont affectées à cela, elles balayent les rues tous les matins, mais l’inefficacité de ce nettoyage est son élément principal.
Notre hôtel à Jodhpur est à une des portes de la vieille ville, au bord d’un quartier résidentiel (où se trouve une université, un hôpital, une école militaire), il est lui-même refait à neuf et avec goût depuis peu de temps, robinetterie grohe, et il est à moins de trente mètres d’un endroit en contrebas de latrines, où l’égout coule en permanence et où l’amoncellement d’ordures est renouvelé chaque matin et est hallucinant de saleté. Mais c’est nettoyé jour après jour. Et les commerçants balayent avec soin devant leur porte chaque matin à l’ouverture. Le ramassage des ordures par contre est au moyen d’une charrette à l’air libre, tandis que les travailleurs n’ont aucune protection de leurs mains ou de leurs pieds. Dans la plupart des endroits, les vaches, zébus, buffles, chèvres, écureuils, rats, singes, parfois dromadaires, et chiens sont partie indissociable du paysage, ainsi que leurs déjections..tout ceci alors que tout ce paysage est extrêmement coloré, les gens vêtus des couleurs les plus vives qui font le plus bel effet avec la couleur très foncée de leur peau, lesquels vêtements sont en général propres, non tachés.
On imaginerait facilement comment le ministre des infrastructures n’ait obtenu son poste qu’en représailles d’une quelconque infidélité, et qu’il soit en chronique désespoir, mais il faut admettre que ce n’est pas le cas. On n’a pas l’impression que les indiens ont honte de la saleté de la rue, de la même manière que beaucoup d’israéliens sont plus préoccupés de la saleté de leur propre pays que de celle d’un pays étranger. Les indiens paraissent tout à la fois accepter la (très) mauvaise situation d’hygiène de leur pays, mais sans en être désespérés ou découragés pour autant. Nous avons par exemple vu beaucoup de gens avec le masque sur la bouche et le nez alors qu’on s’attendrait à ce qu’ils soient indifférents au covid tant ils ont de raison de tomber malades sans cela. C’est sale, et ils nettoient…inefficacement mais selon nos critères, eux en ayant visiblement d’autres. Nous avons par exemple très bien mangé et surtout très bien digéré, n’ayant eu aucune fois à fermer les yeux sur une table ou une vaisselle qui auraient été sales.
Les castes existent toujours mais un guide - qui nous contait comment la guerre de Jaipur contre Jodhpur au 16ème siècle était pour cause de refus de marier une fille d’une caste avec quelqu’un d’une caste inferieure - nous explique que le système est assoupli aujourd’hui. Il y a les brahmanes, les guerriers, les agriculteurs et les intouchables, ou encore grand nombre de différentes castes, d’un état à l’autre par exemple, et le système subsiste bien qu’amoindri.
Le Rajasthan est un pays majoritairement peuplé de rajputs, c’est à dire de guerriers. Les brahmanes sont officiellement prêtres. Il subsiste vraisemblablement une discrimination due aux différences de castes, mais il doit falloir rester plus longtemps ou côtoyer de plus près la réalité pour la voir.
L’idolâtrie. La majorité du pays est hindoue, et les temples pullulent,
à tous les coins de rue, que ce soient de gigantesques constructions - en
général avec toits allongés et entièrement sculptés - ou que ce soient de
simples maisons, dans l’alignement de la rue, qui sont en fait des temples, que
l’on reconnait à la décoration intérieure et à ce qui pourrait bien n’être
qu’une idole. De plus, les gens ont autour d’eux toutes sortes de petites
représentations, sur les comptoirs, dans les voitures posées sur le tableau de
bord.
Ou encore, à côté de la porte d'entrée de nombreuses maisons se trouve dessinée l'histoire du couple, quand il s'est formé, et une sorte d'attente que la maison soit bénie, en principe par la divinité de la prospérité. On y trouve aussi la fameuse croix gammée, dont l'appropriation par les nazis est une insulte vécue comme temlle par les hindis, chez eux elle est le symbole de la paix et de la réussite, ainsi que le "Ommmm".
Il y a donc clairement représentations de divinités mais il ne semble pas qu’il
s’agisse d’un système uniquement idolâtre et polythéiste. Il y a une divinité,
une force créatrice unique qu’il est interdit de représenter et qui est seule à
l’origine de l’univers. Brahma. Cette divinité a sous elle deux sous forces,
l’une positive, constructrice, appelée Vishnou, et l’autre négative,
destructrice appelées Sivah. Ces trois forces sont masculines et d’après la
conception hindoue, le masculin doit toujours avoir le féminin en miroir.
Ainsi, la force créatrice a un pendant féminin, nommée Sarsvathi, affectée à
l’éducation, à l’intendance, la force constructrice a besoin de moyen pour
réaliser et la force féminine lui correspondant Laxmi est affectée à l’argent,
aux moyens, la force destructrice ayant besoin d’armes pour détruire et elles
lui sont données par la force féminine en miroir, Parvathi. Les trois
composantes, génératrice, organisatrice et destructrice forment les initiales
du mot qui s’appellent en occident anglophone god.
Sous ces trois forces se trouvent une quantité variable (certains ont parlé de
plusieurs dizaines de mille, certains ont parlé de millions, et elles sont
vénérées, comme par exemple la divinité à tête d’éléphant, Ganessa, qui est
affectée à la prospérité, et qui est donc celle qui se trouve à l’entrée des maisons,
ou sur le comptoir de tel ou tel lieu de commerce.
En quoi ces représentations sont-elles différentes d’un St Christophe comme
porte clé des clés de voiture comme il est courant d’en voir dans notre douce
France ? En quoi sont-elles foncièrement éloignées de ce que nous invoquons
chaque vendredi soir quand nous chantons « barekhou ni malakhé
hachalom » ? qui sont ces anges dont nous attendons la
bénédiction ? ne sont-ils pas des intermédiaires bien interdits dans notre
monothéisme et pourtant bien présents dans l’esprit populaire ?
Combien est-on ici plus à du polythéisme ou du monothéisme aménagé pour les
foules populaires ?
Ajoutons en dernier lieu que les foules qui descendant à
grand bruit vers la rivière ou le lac à la nuit ne sont nullement en extase
religieuse, elles sont en ambiance festive tout au plus. On est face à une
attitude religieuse quand les hindous rentrent dans un temple, se déchaussent
alors, embrassent de la main le seuil et adoptent une attitude de
recueillement…non différente de celle du chrétien qui entre dans une église, ou
du juif qui ente dans une synagogue. La différence fondamentale est dans la
représentation. Ni les chrétien ni les hindous ne lisent ou ne respectent le 2ème
commandement.
Merci pour tes textes. C'est tres interessant. Completement d'accord sur ce que tu dis sur nis anges du vendredi soir im ki...
RépondreSupprimerIm ki le chant precise bien que ce sont des emanations de D.
En hebreu
Malakhei hashalom MI melekh malkhei hamelakhim
Tres tres interessant cet exercice de religions comparees que tu fais a la fin.
RépondreSupprimerCa me rappelle une petite remarque de Delphine Horvilleur. Elle disait qu'il y a en français l'expression Va voir là-bas si j'y suis.
Mais qu'on pourrait dire aussi Va voir là-bas qui tu es.
Dans les voyages (ceux dans les pays etrangers etceux qu'on fait en etudiant les cultures etrangeres), on rencontre les autres mais aussi on se rencontre soi meme parce qu'on mesure, decrit,definit sa propre identite. Ça,c'est comme chez nous, ca pas du tout,ca alors vraiment c'est un truc que que je n'aurais meme pas pu imaginer... et ça donne "du grain à moudre"
Manitou (toujours ;-) parlait lui aussi de ce fondement monotheiste en Inde sous un extérieur polytheiste
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