En octobre, très peu après le début de la terrible guerre que nous vivons
depuis bientôt huit mois, le monde s’émut soudain du « massacre » qui
aurait été commis par l’armée israélienne, taxée d’avoir bombardé l’hôpital
Shifa de Gaza et d’y avoir fait des dizaines si ce n’est des centaines de
morts.
L’Europe et ses porte-voix s’étaient empressés d’appeler au drame, et le
président de la très digne Autorité Palestinienne avait appelé à la
condamnation du « massacre ».
Il s’était avéré assez peu après que le drame ne provenait pas d’un
bombardement de Tsahal, mais d’une roquette tirée depuis la bande de Gaza et
tombée accidentellement, il s’avérait aussi qu’il n’y avait pas la quantité de
morts annoncés, que la dite roquette n’était pas tombée sur l’hôpital…mais le
mal était fait, le but médiatique était atteint, Israël avait un
« massacre » à son passif.
Il y a peu, un bombardement ciblé israélien, de ces coups envoyés avec la
précision que seule l’armée israélienne possède, atteignait deux hauts placés
dans la hierarchie de guerre du hamas…mais faisait près de cinquante morts,
parmi lesquels femmes et enfants.
L’incident survenait deux ou trois jours à peine après l’ordre intimé par la
cour internationale de justice sise à La Haye de cesser les hostilités à
Rafiah’.
Peu importe que l’ordre donné par la cour ait été nommément adressé aux deux
parties, peu importe que ce bombardement ait été précédé d’une pluie de
roquettes sur Tel Aviv et le centre d’Israël, c’est une nouvelle fois Israël
qui faisait les titres des journaux.
Israël, ce pays voyou, ne respecte pas les vénérables institutions
internationales. Israël viole encore et encore une résolution après l’autre.
L’Espagne, l’Irlande, nos amis de toujours s’empressèrent de reconnaître
unilatéralement la Palestine avec Jérusalem (est) comme capitale, et le premier
ministre espagnol était aussitôt relayé par sa ministre des affaires étrangères
qui annonçait la décision espagnole comme le premier pas vers la libération
totale de la Palestine « depuis le fleuve jusqu’à la mer ».
Encore une fois, il s’avéra quelques heures à peine plus tard que les dits
morts n’avaient pas été victimes directes du bombardement, mais de l’incendie
qui se déclencha, dû à la présence sur les lieux d’un entrepôt d’armes (ne
demandez pas ce que fait un entrepôt de munitions en pleine ville, à Gaza ces
entrepôts sont situés dans les écoles, dans les hôpitaux…), incendie qui toucha
une population située à plusieurs centaines de mètres du dit bombardement criminel.
Israël fait reposer son identité dans l’affiliation à la Torah, qui enseigne et
ordonne six cent treize commandements, auxquels s’est astreint le peuple
d’Israël. Parmi ces commandements, certains sont uniquement religieux mais bon
nombre sont non moins civils, tels le respect de la veuve, de l’orphelin, de
l’étranger, des animaux, des limites de propriété, relatifs au prêt, et la
liste est très longue comme spécifié ci-dessus.
Parmi ces commandements figurent ceux « qui échappent à la logique et à la
compréhension, telles les lois de la cacheroute, de l’interdiction de consommer
certains aliments. J’entendis une fois, dans les tout premiers temps de mon
existence à Jérusalem, le rabbin Goren, alors déjà plus rabbin en chef de
tsahal, expliquer que nous ne comprenons pas ces lois, mais nous avons le droit
de réfléchir, d’associer les concernant. Il proposait ainsi d’apprendre de
l’interdiction de manger des espèces marines qui ne soient pas pourvues
simultanément de nageoire dorsale et d’écailles, une invitation à être des
individus qui remontent le courant, comme seuls sont capables de le faire ces
éspèces doublement pourvues.
Le peuple juif vit à contre courant de l’humanité. Il assume celà par la pratique des commandements,
depuis Avraham le premier monothéiste.
Le peuple juif refuse l’idolâtrie, et aussi la barbarie, ainsi que la
corruption et le kidnapping d’enfants.
Mais le peuple juif irrite semble-t-il en cela d’autres nations du monde et il
est sorti il y a à peine cent ans de deux mille ans d’exil et de persécutions,
dont une partie remonte à ce courroux.
Le peuple juif se targue aussi d’être « le peuple élu », identité
apparemment bien orgueilleuse et s’ajoutant aux bonnes raisons de le
détester…si on ne cherche pas à comprendre le sens véritable de ce vocable.
Lévinas enseignait que le peuple n’est nullement un quelconque enfant chéri,
préféré au reste de la fratrie, mais qu’il est celui qui a adopté ces
commandements, cette affiliation, qui donne ce qu’il appelait la
« difficile liberté », c’est à dire la possibilité de savoir gérer un
monde de non-esclavage, de non-cruauté, de non-idolâtrie, de non-barbarie.
Élection au devoir de s’acquitter de ces dures tâches.
Il est ainsi très difficile de vivre assujetti à tant de restrictions et
d’obligations. Difficile au point que seule une minorité vit à un rythme si
exigeant.
Les nations préfèrent éviter le difficile débat de l’exigence de moralité
intrinsèque à ce respect des commandements et ajouter cet orgueilleux vocable à
la liste des chefs d’accusation érigée face à Israël.
Israël est donc coupable. Coupable d’opprimer le peuple palestinien, coupable
de bombarder « aveuglement », coupable de massacrer femmes et enfants,
coupable de coloniser…même si Israël n’occupe pas Gaza (retrait unilatéral il y
a bientôt 19 ans…), même si Israël non seulement ne bombarde pas aveuglément
mais vit sous d’incessants bombardements non contrôlés technologiquement (et
donc aveugles) depuis le sud, le nord et l’est, même si Israël n’occupe aucun
de ces territoires depuis lesquels il est bombardé, même si Israël est un état
souverain et ne répond pas aux définitions de ce qu’est un état colonialiste,
même si Israël a été édifié par des individus pour la plupart réfugiés de tous
les pays dans lesquels le peuple juif avait été opprimé ou desquels il avait
été expulsé, Israël est taxé de colonialisme et d’impérialisme.
Et il semble surtout qu’Israël souffre de cette posture de contre-courant.
Israël commet la « faute » de ne plus être opprimé, de ne plus être
vulnérable, ne plus être peuple maudit comme le virent la chrétienté et l’islam
durant de longues années. Israël sait ne pas avoir de victimes de ces
bombardements en particulier parce que la technologie et les crédits au service
de la protection de la population sont supérieurs à ceux consacrés à
l’offensive, mais les nations mettent délibérément de côté ces insignifiants
détails.
Israël est à contre-courant de continuer à s’auto-qualifier de peuple du livre
à l’époque du tik tok, de se revendiquer de la Torah à l’époque du post
modernisme.
Israël ne voit pas que ceux qui prétendent avoir dépassé le stade de la
binarité de l’humain n’ont pas réussi à se dédouaner du manichéisme. Aux yeux
des ennemis d’Israël, non binaires mais néanmoins manichéens, celui qui cesse
d’être opprimé et vulnérable et réfugié devient automatiquement oppresseur,
fier et dominateur, et la cruauté qu’il subit est nulle et insignifiante.
Insignifiants les dizaines de milliers de roquettes tirées depuis les pays
voisins ou lointains, insignifiante la nuit des trois cents missiles et drônes
iraniens d’avril 2024, insignifiants les massacrés, hommes, femmes, enfants,
vieillards et bébés du 7 octobre, insignifiants les otages, desquels une partie
sans cesse croissante ne parvient pas à rester en vie.
Ces derniers ne sont pas seulement insignifiants aux yeux de l’opinion, ils ne
suscitent pas plus ni l’intérêt des instances sanitaires internationales que la
condamnation de ceux qui les ont kidnappés, enfermés, maltraités.
Israël est condamné et les bouchers du 7 octobre suscitent l’admiration et le
soutien de la frange médiatique et politique du monde civilisé.
En termes de morale, les nazis incarnèrent la civilisation faite barbarie, le
monothéisme redevenu bête humaine.
Israël, mais aussi et surtout la masse muette de l’opinion ni ne dénonce ni
même semble-t-il ne voit que le combat de notre pays est contre la barbarie,
contre la cruauté, tant ces derniers sont le fond de commerce de cette
organisation terroriste pour laquelle le crime, le viol, la destruction ne sont
pas accidentels mais sont le véritable but.
Difficile identité, difficile liberté, mais ô combien préférables à tant de
déchéance et de régression de l’humain.
Israël n’est plus un peuple exilé et pourchassé. Israël apporte au monde aux
plans académique, scientifique, technologique, médical, social et intellectuel.
Israël a élevé au plus haut niveau possible le concept d’armée de défense et a
le mérite de continuer à ainsi se revendiquer.
Israël n’a pas reçu un pays ni par commisération ni en compensation de la
shoah, ni en affiliation au monde colonialiste et impérialiste, mais en tant
que « peuple d’Israël qui revient sur sa terre », qui fait revivre sa
langue, qui ramène lui-même ses exilés et bâtit avec eux la société
d’aujourd’hui et de demain, dans laquelle tous vivent honorablement, dans
laquelle la place occupée par la Torah n’est pas archéologique mais objet
d’étude et d’approfondissement.
Et Israël érige cette société en donnant toute la place à tous ceux qui ne
combattent pas son existence-même, fussent-ils druzes, bédouins ou
palestiniens.
Toutes ces raisons justifient de continuer cette guerre qui n’est que défensive
d’une part, et à laquelle notre attachement à la vie de l’individu nous
contraint, surtout s’il a été kidnappé, surtout si ce n’est pas un mais 128
individus, surtout si aucune instance internationale ne se préoccupera de les
ramener.
Israël peuple élu est aux prises avec un ennemi qui agit comme s’il était
maudit, aux yeux duquel tous les coups sont permis, aux prises avec une opinion
et un système médiatique qui le mettent au pilori de façon inappropriée. Que cet
ennemi se redresse, qu’il adopte un
comportement, une tactique dans les normes du monde civilisé, que la couverture
médiatique des étapes du conflit redevienne proportionnée et le différend
pourra reprendre des dimensions civilisées.
Très bel article illustrant parfaitement cette redoutable înversion des valeurs de cet occident post moderne ! Ses médias et ses politiciens d’extrême gauche ; il reste à espérer que la majorité silencieuse occidentale se réveille et commence à s’exprimer!
RépondreSupprimerBravo pour cet article fort bien documenté !
Merci , Jean , pour ton éclairage .
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