dimanche 28 avril 2024

la sortie d'Egypte, les ossements désséchés, la conquête d'Israël et tout cette sorte de choses

 

Les juifs qui sont rattachés à la pratique savent que nous sommes sur la fin de la fête de Pessah’, qui n’est pas seulement la fête du nettoyage compulsif, de la triple interdiction liée au hametz (possession, vue et consommation) et de la consommation de matzot. Pessah’ est aussi la fête de la sortie d’Egypte, tandis qu’après les quarante ans dans le désert, cette sortie augmentée du don de la Torah, aboutit à l’entrée en Israël.

Pour ces juifs, l’entrée en Israël est inséparable du reste de l’histoire, et elle est l’aboutissement de la condition juive.

Le soir du séder, premier soir de Pessah’, on raconte la sortie d’Egypte, mais on clôt sur « l’an prochain à Jérusalem ».

Cette libération est rattachée à bon nombre de miracles (les dix plaies, le passage de la mer rouge à pied sec,et d’autres encore) et telle sont aussi les quarante ans dans le désert (la manne), et l’entrée en Israël (passage du jourdain à pied sec et conquête de Jéricho (murailles qui s’écroulent après avoir tourné autour de la ville).

Signalons au passage, à l’intention de ceux qui se scandalisent quand la notion de miracle est mentionnée autour de la shoah, ou même de notre guerre actuelle (attaque de l’Iran) du fait des six millions de morts de la shoah et des victimes du 7 octobre et de la période qui s’en est suivie, signalons que la sortie d’Egypte est précédée de 210 ans d’esclavage, s’accompagne de bon nombre de victimes, et que ceux-ci sont mentionnés en parallèle des évènements rapportés comme miracles. Il faut apparemment admettre que l’un n’empêche pas l’autre et que l’esprit humain ne saurait tout comprendre.

C’est un des thèmes de la secrion de la Bible dite des « ossements désséchés » tirée du livre de Ezechiel et qui a été lue à la synagogue comme chaque année le shabbat de Pessah’ : toute l’histoire est ponctuée de « savoir », et l’explication de cette histoire publiée ce même shabbat dans Haaretz mettait l’accent sur ce « savoir » en parallèle de notion complètement étrangère au savoir, contredite par le savoir, de résurrection des morts, d’os désséchés qui reprennent vie. Comme pour montrer par cette parabole que même dans les situations de plus complet découragement, ce n’est pas de notre savoir scientifique ou intellectuel que viendra le dénouement.

Et pour revenir aux miracles, à l’entrée en Israël, celle-ci est loin de n’être que miraculeuse. Elle est militaire, est accompagnée de bon nombre de combats si ce n’est de morts, et prend longtemps.

Mais il y a l’épisode de la ville que Yehoshua tente de conquérir juste après Jéricho, la ville de Aï. La conquête échoue. Les murailles ne tombent pas, alors qu’il pourrait bien s’être agi d’une ville bien plus petite que Jéricho, plus ancienne ville de l’humanité.

Yehoshua fait ce que nous devrions faire aujourd’hui alors que nous ne parvenons pas à venir à bout du hamas, alors que nous échouons à ramener les otages. Yehoshua passe le combat au tamis et il examine ce qui s’est ou non produit. Quand il découvre qu’un soldat a pris du butin, il comprend, gère la situation et peut continuer la conquête avec succès.

Vous croyez vraiment qu’on peut mener à bout cette guerre avec un ministre de la police chauffard ? Un individu qui n’est pas chauffard que sur la route comme il l’a prouvé vendredi dernier, il est aussi chauffard dans son comportement, depuis toujours et même depuis qu’il est ministre de la police, ce qui lui renforçe surtout le sentiment qu’il est au-dessus des lois, et nullement celui qu’il devrait montrer l’exemple.

Vous croyez qu’on peut vaincre l’ennemi avec un premier ministre menteur, profiteur, accusé de corruption et qui fait passer les intérêts de coalition avant ceux du pays ?

Tout le savoir scientifique accumulé ces années nous protège certainement, mais sachons ne pas uniquement nous appuyer sur lui.

Il est impératif de nous comporter comme le peuple juif, non uniquement forts de l’Histoire, de l’entrée en Israël après la sortie d’Egypte, mais aussi et surtout forts de la Torah qui nous impose des conduites. Religieuses comme sociales et morales.


dimanche 21 avril 2024

Netsah' Yehouda. Une présentation sommaire

 

Depuis 42 ans, c’est ã dire depuis mon arrivée en Israël, j’ai effectué une petite re-direction de mon activité professionnelle.

En France, j’avais fait mes débuts dans l’éducation. Education formelle dans les structures de la communauté juive, éducation informelle dans le cadre des éis, en étudiant en parallèle une licence de psychologue clinique.

En Israël, après avoir dirigé pendant deux ans un internat d’élèves de classes de terminale venus étudier en Israël tandis que les parents de la plupart d’entre eux vivaient en dehors d’Israël pendant que je poursuivais mes études de psychologie, je me trouvai rapidement engagé dans l’équipe de direction d’un internat, « Bet Hanna », spécialisé pour le traitement psycho-éducatif d’adolescents souffrant de lourds troubles du comportement et de l’équilibre mental, cette fois non plus en tant qu’éducateur mais en tant que psychologue clinicien.

Ces adolescents niaient pour la plupart d’entre eux leurs difficultés et ne visaient rien d’autre que d’être enfin non encore rejetés par la société.

En Israël, pays qui se bat pour sa survie depuis encore cinquante ans avant la déclaration d’indépendance, l’armée est le passeport le plus élémentaire à l’entrée dans la vie active.

Il est presque impossible de porter son regard sur l’armée israélienne avec comme références l’armée française, l’armée américaine ou toute autre armée du monde, dans lesquelles les adjudants, les officiers, les généraux paraissent appartenir à un autre monde que celui de la société civile, ont souvent été représentés comme des brutes, des individus qui sont devenus d’autant plus gradés qu’ils étaient plus têtes brûlées.

La société civile israélienne n’est composée pour ainsi dire que d’individus ayant servi trois ou plus d’années, et le résultat n’est pas une société militariste ou régie par des adjudants.

Le premier « contre-exemple » est le chef d’état major Raphaël Eytan, à qui l’armée doit la création d’une unité d’insertion de jeunes ayant grandi dans des milieux et des conditions qui les poussent à se retrouver exclus de la société.

La plupart de nos adolescents de « bet Hanna » doivent leur place dans la société aux efforts ajoutés de leur séjour de trois-quatre ans dans notre internat, puis de leur service militaire dans le cadre des « jeunes de Rafoul » comme ils sont communément nommés dans le pays (Rafoul est le diminutif de Raphaël).

Depuis maintenant six ou sept ans, j’accompagne le travail clinique d’une thérapeute employée dans le cadre du corps d’armée « netsah’ Yehouda » qui vient depuis ce matin de « béneficier » d’un privilège international : celui d’avoir été blâmé par la commission américaine de sécurité du fait des « exactions » de ses soldats.

Ce corps d’armée, créé il y a bientôt 25 ans est une autre facette du rôle social de l’armée israélienne. Ses soldats sont tous issus du milieu ultraorthodoxe, un milieu plus connu par le public international ces derniers temps que par le passé.

Ce milieu prône la non participation à la vie civile séculière, arguant que le seul circuit scolaire et professionnel acceptable pour les garçons et les hommes du milieu est l’étude de la Torah.

Du fait d’un vieil accord passé entre les représentants de cette frange de la société et le gouvernement du jeune Israël, les hommes de ce milieu bénéficient d’une exemption de service militaire tant que leur unique occupation est l’étude de la Torah.

Le corps d’armée « netsah’ Yehouda » (le mot netsah’ veut dire en hébreu « éternité » mais est l’acrostiche des mots « noar tsioni harédi » jeunesse sioniste ultraorthodoxe) a éte créé - à l’instar des « jeunes de Rafoul » pour permettre l’insertion des jeunes qui désirent s’insérer dans la société israélienne, malgré leur naissance et leur éducation en milieu ultraorthodoxe.

Ces jeunes sont pour beaucoup d’entre eux rejetés par leur milieu de provenance, par leur famille, bénéficient de ce fait du statut de « soldat isolé » durant leur service.

Ils font un service de deux ans précédé et suivi de périodes dans le cadre de structures scolaires et sociales les préparant à la vie civile active.

Accompagner une thérapeute affectée au suivi psychologique des soldats de cette unité n’est pas très différent de l’accompagnement des adolescents de Bet Hanna…à la différence que ne se trouvent chez les jeunes de Rafoul que des cas sociaux, alors que se trouvent dans Netsah’ Yehouda tant des individus sains que des individus en marge de la société, blessés du rejet dont ils font l’objet.

Il est bien clair à mes yeux d’israélien resté en contact avec le monde européen que la sanction que cette unité vient de subir est beaucoup plus politique que fondée sur la réalité, mais que la tendance européenne est d’être très affectée par les images d’une ville de Gaza en ruines et tombe très facilement dans une acceptation d'une éventuelle tendance militaire israélienne (armée d'occupation...) à la cruauté, aux exactions, si ce n'est au génocide.

Les soldats de Netsah’ Yehouda sont stationnés dans la Judée Samarie, ou « territoires occupés », ou « contestés » et ne sont nullement plus têtes brûlées que l’ensemble de l’armée israélienne, et nullement plus génocidaires que la société israélienne…

Les soldats de netsah’ Yehouda sont un des multiples pans de l’activité sioniste des cent dernières années dont le centre est la mise en harmonie d’un peuple reconstitué après deux mille ans d’exil.
Cette activité est en oeuvre tant au plan des multiples provenances géographiques (juifs issus des pays d’Europe, d’Afrique du nord, d’orient, d’Afrique, d’Amérique) qu’à celui des rattachements à la pratique du judaïsme (juifs libéraux, ultraorthodoxes, sionistes nationalistes, laïcs) réunies en Israël

Ces soldats sont un peu un symbole de la difficulté à former cette harmonie. En clair, ils viennent d’être « vendus » (pour ne pas dire sacrifiés) à la vindicte internationale contre la "méchante" armée israélienne qui "extermine" les gentils enfants de Gaza.

Puisse la société israélienne surmonter le cauchemar dans lequel elle est plongée depuis le 7 octobre, qui durera tant que les otages restent aux mains des bourreaux du hamas, et qui occulte aux yeux du monde extérieur les multiples impressionnantes et positives facettes de son état, au plan social, au plan humain, au plan culturel, au plan artistique, au plan scientifique, et d’autres encore.

Je continue quant à moi à trouver  satisfaction et rétribution à accompagner les pans positifs du travail effectué ici avec une population dans son ensemble extraordinairement bien portante. 

mardi 9 avril 2024