mercredi 28 mai 2014

Chanter les louanges de Jérusalem

Chanter les louanges de Jérusalem, fêter le jour de la réunification de Jérusalem ne sont pas choses faciles, il se trouve toujours autour de vous quelqu'un pour arborer un visage un peu crispé, pour pincer les lèvres ou pour afficher ouvertement sa réprobation. Quoi ? Fêter la réunification d'une ville traversée par une muraille ? Fêter la réunification d'une ville conquise par les armes, annexée contre les principes du droit international, comment oses-tu ? Et le droit des palestiniens à l'autodetermination? Et la discrimination ? Et les barrages ? jérusalem serait à entendre certains une des dernières villes du monde à être divisée, et du fait de qui sinon de ces sataniques israéliens, suppots de l'impérialisme....?

Et bien, non seulement je veux le faire, souligner ce jour, célébrer la réunification, mais je ne saurais m'en empêcher !

S'en empêcher ? Se retenir ? 

Quelqu'un a un doute sur le bien-être que vivent tous les habitants de cette ville ? Et je pense parler de tous, n'oublier personne. Et je ne parlerais pas des minorités chrétiennes ou arméniennes qui souffrent peut-être encore d'être des minorités, mais qui n'en souffrent pas complètement du fait d'Israël si vous voyez de quoi je parle.

Quelqu'un imaginerait que Jérusalem ait pu redevenir si accueillante, florissante, verdoyante, ville de liberté de tous les cultes, ville de tranquillité et de bien-être, du fait de quelque autre peuple ?



Jérusalem a été conquise par les armes. Quelqu'un prétendrait que la situation actuelle (accès libre de chaque communauté religieuse à ses lieux saints, en particulier) ait pu être atteinte par la négociation ? Avec Yasser Arafat ? Avec Ismail Hanyeh ? Avec le président Assad père ou fils ? Avec Hassan Nasrallah ? Même avec Abou Mazen, soi-disant plus modéré que ces derniers, aucune négociation n'aboutira, encore moins au sujet de Jérusalem. 

Et tous savent cela, mais le dire n'est pas politically correct. 

J'ai écouté les discours et la cérémonie de commémoration de la réunification de la ville en juin 1967, sur la colline dite des munitions.

Y ai-je entendu des discours guerriers ? Y ai-je vu quelconque défilé d'armes ? Y ai-je entendu proclamations de haine et discours belliqueux? 

J'y ai entendu des discours de main tendue, des chants bibliques, le chant national d'un pays qui ne chante pas le sang des vaincus qui abreuve ses sillons, mais qui chante l'espoir, un peuple qui appelle à la réalisation de prophéties non de victoire et d'anéantissement de qui que ce soit, mais prophéties bibliques de paix et d'accomplissement de promesses messianiques.

J'ai entendu tel président de l'état, tel premier ministre prendre la parole, s'adresser à tous, et renouveler en cette occasion des appels à la réconciliation, à l'aboutissement du processus de paix.


Oui, j'ai entendu ce mot clé : processus. La paix n'a pas été atteinte. Elle est rarement atteinte par la guerre. Et ce que vit Jérusalem depuis 47 ans est un processus. Et quelqu'un sait si une autre autorité aurait permis une telle situation de côte à côte en cours de processus (à supposer qu'une autre autorité ait conduit un tel processus) ?

Quelqu'un veut répondre à la question de savoir s'il vaut mieux être palestinien sous autorité israélienne ou juif israélien sous une quelconque autorité musulmane ? Sous une quelconque autorité arabe laïque ?

En cours de processus, les situations ne sont pas parfaites. Cela ne doit en aucun cas nous conduire à mettre un bémol à nos réjouissances, surtout quand elles sont non belliqueuses, surtout quand nous invitons qui le souhaite à y prendre part.

Je vis à Jérusalem et j'y suis non seulement heureux, mais aussi fier. 

Je peux vous y inviter tous, et toutes les situations politiques ne m'auraient pas permis un tel privilège.



dimanche 18 mai 2014

Pour accueillir Hillel Meïr le bien nommé

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Et qu'est-ce qui fera de lui un "bien" ou "mal" nommė ?

Lui dont le père évoqua, partiellement, ce midrach de Beréchit Rabba 37, 7, où au sujet du nom que reçut le fils de Ever : " et Ever eut deux fils, le nom du premier Peleg " trois thèses s'affrontent, sont en dialogue. 

Pour rabbi Yossi, "les pères, dont l'ascendance était connue de tous, nommaient les enfants en fonction de l'actualité, nous autres, dont l'ascendance n'est pas connue, les nommons des noms de leur père, grand-père ou aïeul", tandis que pour Rabban Shimeon ben Gamliel : " les pères, qui recevaient l'inspiration divine, nommaient leurs enfants en fonction d'icelle, nous autres, qui n'avons plus l'inspiration divine, les nommons des noms de leurs ancètres".

Cette controverse, que l'on va essayer d'explorer avec nos maigres moyens, parait comme "mise en abîme". D'une part, elle parait déjà précéder ce dialogue rabbinique, parait déjà habiter le texte biblique. Par ailleurs, le thème évoqué est précisément celui de la controverse, de la dispute, de l'incommunication. Ainsi, Rabban Shimeon ben Gamliel et Rabbi Yossi dialoguent-ils ou ne sont-ils qu'en conflit ? La suite va peut-être nous montrer qu'il n'y a pas de dialogue entre eux, qu'à travers eux ce sont bien deux thèses diamétralement opposėes qui s'affrontent.

Controverse déjà dans le texte biblique ? Le texte de Beréchit poursuit ainsi : " Peleg, fut nommé ainsi parce que la non-communication fut la caractéristique centrale de son époque, et le nom de son frère fut Yoktan", sans explication du nom...comme si la fin du texte manquait. On s'attendrait à trouver l'explication du nom, comme dans le cas de son frère, mais elle n'y est pas. Comme si Ever n'ait été habité d'esprit divin que pour le premier enfant ! Comme si un nom était signifiant et l'autre non (nom?) ? Comme si le texte biblique lui-même s'insérait dans le dialogue et venait dire : parfois le nom a un sens, parfois il n'en a pas...

Le midrach complète le texte biblique et explique le nom de Yoktan : "il fut ainsi nommé parce qu'il était modeste, amenuisait -maktine- sa propre importance".

Le midrach doit compléter, parce que le texte biblique s'il dit en référence à quoi (la tour de Babel)  dut nommé Peleg, ne dit pas au regard de quel évènement fut nommé Yoktan. 

Et l'explication du midrach est qu'il ne fut pas nommé au regard d'un évènement historique, mais que sa personnalité était le reflet de son nom, ou l'inverse.

Dans le midrach, un peu de la même manière, Rabban Shimeon parle d'inspiration divine, tandis que Rabbi Yossi semble parler d'autre chose. 

Rabban Shimeon Ben Gamliel semble parler de l'impact du divin sur la création tandis que Rabbi Yossi parlerait plutôt de l'impact, de la résonance de l'homme, sur sa propre réalité.

Comme si on avait ici deux nominations obéïssant à deux mécaniques différentes, nomination prophétique pour Peleg, nomination inspirée peut-être par l'observation de l'individu et de sa psychologie pour Yoktan.

Mais cette incommunication de la tour de Babel est, elle aussi, non tant une malédiction divine antérieure venant à se réaliser que le produit d'une attitude humaine.

Et quelle est cette précision "historique" du midrach selon laquelle du temps des patriarches l'ascendance était connue tandis qu'aujourd'hui elle ne l'est pas ? Ne l'est-elle pas ? Ne savons-nous pas les noms de nos ancètres ? Ne connaissons-nous pas des gens qui connaissent leur ascendence de nombreuses générations en arrière ?

Serait-ce de l'eau pour le moulin des Schlomo Sand et autres négationnistes selon lesquels nous ne connaitrions véritablement rien du tout, selon lesquels les liens du sang du peuple juif ne sont qu'une invention ? 

Ou ce dialogue viendrait-il en écho aux enseignements de Yshayahou Leibovitz (à ne comparer en rien au précédemment nommé !) selon lesquels le judaïsme n'est pas une question d'ascendance mais d'éthique ?

Il est vrai que notre ascendance est infiniment plus ramifiée que ne l'était celle des descendants directs de Noah, mais le midrach parle-t-il de connaissance ou de notoriété ?  Qui, connait ou ne connait-il pas l'ascendance ? 

Ce n'est forcément pas le père, celui qui nomme, qui est en question, du simple fait que s'il donne le nom de ses pères, c'est bien parce qu'il les connait..

Et donc, il apparaîtrait ici que le sujet de la controverse du midrach, à moins que ce ne soit déjà le sujet de la controverse biblique, pourrait être ce qui doit habiter l'esprit de celui qui nomme son enfant.

Que cherche-t-on quand nous nommons un enfant ? Cherche-t-on à donner une information ? Cherchons-nous à l'équiper pour la vie ? Savons-nous ce que nous faisons quand nous nommons un enfant et que nous avons peut-être un impact inconscient à travers cette nomination ?

On aurait l'impression que ces éléments sont au coeur du débat qui sépare - et réunit - Rabban Shimeon ben Gamliel et Rabbi Yossi. Rabban Sh. semble préoccupé de comment répercuter la volonté divine dans le monde, semble préoccupé de l'humanité et du message à lui communiquer, tandis que rabbi Yossi semble plus préoccupé de l'enfant lui-même. 

Mais Rabbi Yossi ben Halafta que le midrach laisse prendre la parole en troisième temps donne un avis peut-être de nature à apaiser la controverse : ce serait, à ses yeux, du fait de sa propre personalité, de modestie extrème, que Yoktan produit et alimente l'humanité  : "du fait de cette qualité, il fut gratifié du mérite d'engendrer à lui tout seul treize familles"(ibidem), et le mérite de son père est d'avoir eu la révélation - ou d'avoir entrevu chez lui cette potentialité.

Et son avis est un troisième regard sur le lien de la prophétie  à la nomination des enfants. Pour Rabban Shimeon ben Gamliel, la prophétie transcende l'humain. A-t-on la prophétie que l'on se retrouve à surtout nommer l'humanité, et accessoirement nos enfants. A-t-on l'inspiration divine que l'on peut influer sur le monde, et ceux qui ne l'ont pas sont condamnés à la transmission d'informations anodines. Pour Rabbi Yossi, nous nommons nos enfants en fonction de ce que nous ressentons être notre besoin, le besoin de notre époque. Pour rabbi Yossi ben Halafta, là est la prophétie : elle permet à l'individu de voir ce qui va sortir de son enfant. Une prophétie non de ce que le ciel envoie, mais prophétie comme une certaine capacité de comprendre et d'anticiper ce qui va arriver.

Faut-il avoir reçu le don de prophétie pour voir un tel potentiel chez un enfant ? Est-ce prophétique de savoir voir les aspects sous jacents de la personalité de son enfant ? Ou dans l'autre sens, un individu qui voit qui est son enfant est-il habité de résidus de cette prophétie supposée avoir quitté le monde ? 

Pour Rabbi Yossi ben Halafta, Ever est donc principalement prophète du fait de la descendance qu'il eut, que ce soit à travers les treize familles de son fils, que ce soit du fait qu'il fut le père du genre hébreu ( dont l'étymologie est précisément "descendant d'Ever"). 

Un peu comme si ce docteur de la tradition enseignait avant l'heure ce qu'enseigne Rav Adin Even Israël ( Steinzaltz) à notre génération : n'est pas tant juif celui dont le père est juif (celui dont l'ascendance est connue) que celui dont le fils est juif (celui dont les enfants vont perpétuer le judaïsme) (on remarquera au passage que le sus évoqué Shlomo Sand est particulièrement mal équipé dans ces domaines : il ne connait pas son ascendance et ne laisse rien de juif à sa descendance "comment j'ai cessé d'être juif" a-t-il fièrement publié : voilà quelqu'un qui parait n'avoir rien reçu, ne disposer que d'extrèmement peu d'éléments pour comprendre ce qu'est l'identité juive. Nous ne l'envierons pas).

Mais pour revenir à des individus dont la réflexion parait incomparablement plus ancrée, nos trois contradicteurs sont donc bel et bien occupés par l'interface de l'identité et du destin de l'humanité, et on reste avec l'impression que Rabban Shimeon ben Gamliel était le plus pessimiste des trois. Prophétie ou annuaire téléphonique semble-t-il vouloir dire.

Les deux autres semblent exprimer une plus grande confiance en l'homme.

Gageons, nous autres post-modernes, que l'enfant qui naît recevra plus de parents occupés à déceler et développer sa personnalité que de parents obnubilés par ce que le Divin a concocté pour le monde.

Un enfant appelé "qui apporte la lumière" reçoit au moins un message : il a un rôle sur terre. Quelqu'un attend ce qu'il va apporter. 

Un beau départ. 

Prends ton temps Hillel Méïr. Tes parents ont connu leurs ascendants, sont connus de leur entourage, sont même précédés par leurs bonnes actions et leur savoir. Qu'ils te soient, eux, leurs parents, et tes frère et soeurs le meilleur entourage possible !

כן יזכו לגדלו לחופה לתורה ולמעשים טובים, עד מאה ועשרים.


jeudi 8 mai 2014

Mathilde zikhrona livrakha.


Il y a maintenant presque trente jours, nous quittait Mathilde, discrètement et de façon permettant qu'aucun des évènements familiaux ne soit bousculé. Même l'aller retour France Israël France fut possible pour une shivea un peu écourtée mais signifiante quand même sans perturber Pessah'.

Mathilde n'a sûrement pas elle-même orchestré tout ce timing, mais il lui ressemble néanmoins. Elle veillait constamment au lien, au contact, savait, même du fond de son lit et physiquement diminuée par les derniers asssauts que la vie lui occasionna, ce qu'il en était de chacun de ceux qui lui étaient chers.

Voici quelques photos, qui sont loin de pouvoir retracer 87 ans de vie, sur deux pays, mais qui permettront de se remémorer une partie, selon ce à quoi chacun se rattachera.

Avant-guerre, à Paris :






Prades et le retour à Paris après la guerre :




Mathilde et Simon :




avec Daniel, et Michel :




...et Claude


A La Troche :






grand-mère, encore en France :











En Israël, arrière grand-mère, prévenante et présente, et aussi grande tante chaleureuse et attentionnée









Avec la famille Pisanté, toute première séance à Rachbag, brit mila d'Eviatar, août 2010.
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Yehi Zikhra Baroukh.