vendredi 27 mars 2015

Maïmo 5ème et dernier chapitre . Par villes et par monts.




Le clou de l'année scolaire 1979-80 fut bien entendu la classe de neige, à laquelle partirent les deux classes CE2 et CM1, en cette deuxième moitié de janvier 1980.

Ce fut une véritable aventure, qui consistait d'une part à emmener comme une colonie de vacances - mais pour cela le cadre et l'infrastructure existaient : nous étions dans la maison du fsju de Chamrousse qui avait déjà hébergé des quantités de sessions de vacances et où fonctionnait une équipe (de cuisine d'intendance et de soutien matériel) rodée - mais surtout ce fut non moins un défi qui consistait à réussir à maintenir l'enseignement pendant deux semaines malgré le massif changement de contexte.

Je ne sais plus dire pour combien d'enfants la situation d'éloignement des parents était nouvelle, mais il était clair que cela concernait un certain nombre.

L'équipe d'encadrement comprenait deux enseignants, Edith -  l'institutrice de ce2, et moi, auxquels s'étaient ajoutés en renfort quelques personnes : Marianne - qui était alors enceinte d'environ 6 mois, nous attendions l'arrivée d'Ayala -, le mari d'Edith si mes souvenirs sont bons (à moins qu'il ne nous ait rejoints que pour le shabbat ?), Claude aujourd'hui Mallah, et un madrikh dont j'ai bien peur d'avoir oublié le nom. 
Il me semble que la maison de Chamrousse était sous la direction de Sima Koloboff (Renne de son totem), et donc en sa présence, et le directeur de l'école, David Messas (zal), vint nous rejoindre le shabbat accompagné de son épouse  (ce qui nous valut un très intéressant commentaire privé de la paracha le vendredi soir dont je me souviens encore partiellement).

Pour Claude, Marianne et moi, si la partie "classe de neige " était nouvelle, la partie encadrement d'un groupe d'enfants loin de leur foyer était loin de l'être : la direction de camps e.i.s était comme notre seconde peau, c'était un sport auquel nous étions rompus.

Les photos retracent une partie de l'ambiance de ce qui fut en fin de compte plus une colonie qu'une classe de neige, mais s'il fut possible de photographier des enfants assis en classe c'est bien qu'ils le furent, et même est-il possible de voir la façon dont nous avons réussi à nous créer un "tableau noir"..

De plus, les diapositives attestent de plusieurs séances d'intérieur, certaines évoquant l'oneg shabbat ou son équivalent de jour de la semaine, certaines montrant telle activité déguisée, certaines témoignant de la tefila, des conditions de logement et d'alimentation.
Le cuisinier était très bon, il nous avait impressionné par un mémorable hachis parmentier..

Pour la classe de cm1, c'était l'entrée en scène "officielle" de Marianne qui connaissait déjà les enfants par ce que je lui racontais quotidiennement, mais qui pouvait ainsi faire véritablement connaissance.

Cette classe de neige se positionna clairement au centre de mes souvenirs de cette année, et je suppose qu'elle a laissé un vif souvenir chez bon nombre de ceux qui y participèrent. 

L'année comporta aussi bien entendu bon nombre de situations, d'activités, et même de sorties comme le montrent les quelques photos suivantes.










L’année suivante, alors que je ne le sentais pas encore formellement, j'étais déjà en route vers l'étape suivante de mon exercice professionnel. Je pense qu'il en est ainsi dans la plupart des domaines : nous vivons notre vie par étapes, par tranches, et le passage d'une étape à l'autre ne se fait pas en général de façon tranchée et sur un jour, celui où nous quittons un lieu pour en investir un autre, mais elle se profile encore avant, en filigrane, de telle manière que cela n'est qu'a posteriori qu'il est possible d'identifier le phénomène.

L'étape suivante en ce qui me concerne fut mon activité d'éducation et d'enseignement non plus avec des enfants d'école primaire, mais avec des lycéens en fin d'études secondaires. 

Cette année, j'avais commencé plus intensivement à effectuer ce passage : j'étais investi plus profondément dans la formation des animateurs des e.i.s, et nous avions commencé une activité qui fut une de ses articulations : l'oneg shabbat pour animateurs, un shabbat sur deux à Ségur. C'était un oneg "pour jeunes adultes que l'on prend au sérieux et qu'on ne cherche pas uniquement à animer" en trois parties : parachat hachavoua, chant de zmirot et "nakh" si je puis m'exprimer ainsi. Je reviendrai sur cette activité, dont le mérite revient pour une large part à son initiateur Ami Bouganim ; ce qui nous concerne ici est que cette parachat hachavoua, qui reposait sur moi, opérait mon déplacement d'investissement. 

J'ai écrit plus haut que je n'enseignais à mes élèves de l'école primaire ni les enseignements de Manitou, ni ceux de Lévinas, et... je mourais d'envie d'ainsi faire, ce qui ne se produisit en fait formellement qu'à partir de septembre 1981 mais dont cet oneg fut le premier jet.

Entre temps, j'enseignai encore à Maïmo, en parallèle de mon année de licence de psycho. qui me fit commencer à timidement exercer la psychologie, par une mise en situation – de stagiaire - qui se produisit dans un gapp ( Groupe d'Aide Psycho Pédagogique) , service psychologique attenant à une école, où j'eus à suivre pour la première fois deux enfants en suivi psychothérapique individuel. 

J'avoue n'avoir que peu de souvenirs de cette dernière classe dont je fus l'instituteur, le ce1 de l'année 1980-81, effectuée entièrement au nouveau 11 rue des Abondances, dans des locaux flambant neufs mais qui avaient beaucoup moins de charme, beaucoup moins de marroniers, de gravier et d'odeurs de vieille France. Ayant eu l’occasion récemment de retrouver par hasard un des élèves de la classe, je sais qu’il a, lui, gardé un bon souvenir, mais je ne sais plus rien des autres.

Peut-être cette chute mémorielle est-elle dûe à notre alyah, qui devait s'effectuer en fin de cette dernière année ? Une partie de l'année fut quand même consacrée à sa préparation, et peut-être y avait-il comme une certaine tension, du fait que l'horizon ne semblait pas tout rose : d'un côté, j'étais déterminé à devenir psychologue clinicien, c'est à dire à faire la quatrième et la cinquième année d'université qui constituaient  le M.A. dans le système israélien et la condition sine qua non à l'exercice de la  psychologie. Un M.A très difficile d'accès, auquel étaient admis très peu d'étudiants. L'écrémage se faisait sur la base d'un examen - qui existe toujours, qui est devenu israélien depuis longtemps  - mais qui à l'époque  était encore un examen américain. Je me présentai à ce "g.r.e" alors que la conseillère du M.A. m'avait généreusement prévenu l'été d'avant quand j'étais allé la consulter : "ne vous présentez pas, vous n'avez aucune chance". D'après elle, le triple fait que l'écrémage était très sévère, que l'examen était américain, et que j'avais étudié en France, c'est à dire complètement différemment de ce qui s'enseignait en Israël, ne laissait aucune part au doute. La suite montra qu'elle n'avait pas toujours raison et cela aussi je le raconterai plus loin.

Le pendant de cette alternative étaient les e.i.s, qui étaient en "solution de continuité" et qui m'avaient sollicité pour que je devienne commissaire général, allant même jusqu'à se rendre en délégation auprès de mr Messas pour lui demander de me libérer de mes obligations encore en cours d'année, ce qu'il refusa.




Tandis que j’enseignais dans ma classe de ce1 - je n'étais déjà plus débutant, au point qu'on m'avait déjà envoyé une stagiaire que l'on ne voit pas sur la photo -, je menais en parallèle tous ces processus : je planchais pour préparer puis pour passer cet effrayant g.r.e, et je m’acquittais des tâches  universitaires nécessaires au bouclage de ma licence, sans oublier qu'étant devenu père, j'avais désormais un autre emploi du temps, un autre pôle d'attraction.

J'étais donc littéralement un pied en France et l'autre presque en Israël, et c'est mi de l'extérieur mi de cet intérieur que survint l'élément qui emporta la décision et le mouvement : un beau jour du mois de juin, on vint précipitamment me chercher du secrétariat de l'école pendant le repas de midi, j'avais un appel téléphonique d'Israël. 

Un certain Claude Sitbon que j'avais connu l'été précédent dans un cadre e.i. alors que lui-même était provisoirement en poste en France, me proposait de prendre la direction d'un des internats du « lycée français de Jérusalem ».

Les choses prirent clairement leur virage au moment où nous prîmes la décision de donner une réponse positive. Ainsi s'achevait notre vie en France. Pour Marianne, issue d'une famille installée en France depuis plusieurs centaines d'années c'était un véritable cap. Pour moi dont la famille n'était arrivée que 60 ans plus tôt, c'était un peu la fin d'une parenthèse.

Pour moi, s'achevaient aussi six ans à Maïmonide, un lieu où je me suis plu, épanoui, et dont l’évocation entraîne sourires et émotion, six ans dont cinq d'enseignement dans le primaire. La suite allait être dans le secondaire, puis dans l'enseignement supérieur. 

Je décrirai aussi cela.


vendredi 20 mars 2015

Maïmo chapitre 4 - du kodesch au hol.



Au bout de trois ans, je crus que s'achevait ce que je ne savais pas encore qu'il conviendrait un jour d'appeler ma première période d'enseignement.

Nous avions décidé de faire notre alyah et je me séparai de Maïmonide en fin d'année scolaire 77-78, émotions - et même cadeaux - à l'appui.

Les choses ne se passèrent cependant pas comme nous avions prévu et nous nous retrouvâmes début septembre...de nouveau à Paris, vraisemblablement pour trois ans (nous comptions sur une équivalence universitaire qui ne fonctionna pas comme espéré).

Je ne sais plus ce qui fit que je ne retournai pas directement à Maïmo, il n'est pas impossible que je ne me sentais pas très fier de me re-présenter après être ainsi parti pour ainsi dire en grandes pompes.

Je retournai donc travailler aux eis, et commençai à Paris les études de psycho pour lesquelles j'avais été admis en Israël.

Un an après, je retrouvai Maïmo, ayant choisi de retourner à l'enseignement plutôt que de continuer à faire de l'éducation depuis un bureau, et c'est dans la foulée de ce choix que je devins non plus instituteur de kodesch, mais que je commençai à enseigner les matières générales, dans le but - qui s'avéra non ainsi atteint - d'être plus "au centre" de ce que les élèves apprenaient. 

Je découvris - avec grand plaisir, en fin de compte - que ce qui est englobé par l'enseignement "général" met moins en contact avec les élèves que ce que permet l'enseignement de la Torah.
Il ne s'agit ici nullement d'une proclamation "militante", mais bien plutôt d'une constatation. Peut -être la constatation n'a-t-elle aucun caractère universel et provient de ce que je préfère l'enseignement de la Torah à celui de "nos ancêtres les gaulois".

Je retrouvai ainsi "mes élèves", ceux que j'avais eus en kita aleph, kitah beth, et qui étaient à présent en cm1.

Le décor aussi changeait : à la place de l'hôtel particulier du 11 rue des Abondances, se trouvait alors un énorme trou dans lequel allait être construite sur toute l'année à venir ce qui allait être la nouvelle école.

Nous nous retrouvâmes donc, un beau matin de septembre, dans une caravane du bout de la même rue, où était logée provisoirement l'école.

L'école primaire en était alors à sa cinquième année et les effectifs avaient pris de l'allure : je me retrouvais face à quelques 25 élèves (j'ai presque honte face à mes collègues du corps enseignant d'avouer qu'au cours - on devrait même plutôt dire "au long" - de mes quelques 25 ans cumulés d'enseignement je n'ai jamais eu plus d'élèves dans aucune de mes classes ! J'ai bien conscience que ceci pourrait être une des formes les plus concrètes - et discrètes - de ce qu'on appelle "la Providence individuelle", à supposer qu'elle existe, ce que j'ai toujours un peu ressenti, au risque de passer pour un ignorant, un ignorant de Maïmonide en tout cas..paradoxe pour un enseignant de Maïmonide !).



Cette classe était donc composée des anciens, auxquels s'étaient ajoutés une petite douzaine de nouveaux. 

Les données avaient un peu changé : une classe de 25 enfants de 9-10 ans est différente d'une classe de 15 petits de 6-8 ans, essentiellement par le coffre et la verbalité (si j'ose ce néologisme) de chacun. 

Je voulais encore et toujours que la classe soit lieu d'échange autant que lieu de transmission et cela imposait plus de règles. 

Je n'ai pas le souvenir que ce sujet en ait été un. C'est à dire que je ne me souviens pas avoir souffert du chahut, et j'espère n'avoir fait souffrir personne pour l'éviter - ou le contenir. 

La tâche me paraissait plus ardue et exiger plus de préparations, même si là encore, je n'ai le souvenir d'aucune directive de programme autre que les livres, qui n'avaient pas été choisis par moi et dans lesquels je préparai les cours.

Je retrouvai les dictées de mon enfance, qui étaient le seul souvenir concret de mes années d'école élémentaire, et j'achetai quelques livres qui me donneraient matière à enseigner un peu de poésie, matière à "récitations" dont j'avais aussi un léger mais plutôt agréable souvenir.

Je ne souviens plus où j'avais trouvé le texte ci-après partiellement reproduit, probablement pas dans un des livres de classe, mais je suppose que le thème récurrent de cacophonie qui s'y trouve évoqué, de "tout le monde parle ensemble au point qu'on n'entend plus rien" et que ceci est encore et encore à combattre, et que le seul moyen de le combattre est l'intervention violente est ce qui m'avait le plus interpellé.  Je ne jurerais pas que je le validerais encore aujourd'hui, mais il me parût adapté à une version plus dynamique - parce que collective entre autres - de la récitation, et je me souviens que nous l'avions mis en scène. Qui se souvient quel rôle il tenait ?

L'orgue de barbarie
Jacques Prévert

Moi je joue du piano 
Disait l'un
Moi je joue du violon 
disait l'autre
Moi de la harpe moi du banjo
Moi du violoncelle
Moi du biniou
Moi de la flûte...
Et moi de la crécelle.
Et les uns
et les autres parlaient parlaient
Parlaient 
Parlaient de ce qu'ils jouaient.
On n'entendait pas la musique
Tout le monde parlait parlait
Personne ne jouait
Mais dans un coin un homme se taisait
"Et de quel instrument 
Jouez-vous monsieur?"
Qui vous taisez et ne dites rien?"
Lui demandèrent les musiciens
Moi je joue de l'orgue de barbarie
Et je joue du couteau aussi
Dit l'homme qui jusqu'ici n'avait absolument rien dit
Et puis il s'avança
Le couteau à la main
Et il tua tous les musiciens...
Et il joua de l'orgue de barbarie
Et sa musique était si vraie
Et si vivante 
Et si jolie
Que la petite fille du maitre de la maison
Sortit de dessous le piano
Où elle s'était couchée
endormie par ennui....


Je ne me souviens pas de tous les rôles loin s'en faut mais je me souviens très bien de nos séances de répétition.


De façon générale, je revois très clairement cette classe, je me revois circulant entre les rangs, et je revois les élèves, jusqu’à presque pouvoir dire aujourd’hui où chacun(e) était assis(e).


J'étais déjà à cette époque comme aimanté vers celui ou celle qui ne comprend pas, qui reste un peu en arrière, mais en parallèle en gardant (recherchant ?) le contact et le dialogue avec les têtes de la classe. 


C'est finalement ce qui caractérise encore aujourd'hui ce qui se passe quand j'enseigne, où le dialogue prédomine et passe bien avant la didactique elle-même.


Je devais me faire alors violence pour marquer des temps d'arrêt, et faire copier résumés ou têtes de chapitre, et c'est une préoccupation dont je suis heureux d'être dispensé depuis que j'enseigne à des adultes.


Il me reste un assez bon souvenir de cette gymnastique d'une semaine d'enseignement, au long de laquelle on passe du français, à l'orthographe, la grammaire, le calcul, l'histoire et la géographie, et l'instruction civique, mais alors que je pensais que de cette manière on atteignait plus les élèves et on fait plus leur éducation, je reste avec l'impression massive que les matières du kodesch rencontrent plus l'individu et ce qui le meut vraiment, ou comme je le dis plus haut, me mettent plus en phase avec l'individu, enfant ou adulte.



A moins que, comme cela s’est présenté à mon esprit suite à un magnifique cours de Daniel Epstein, les sujets de la Torah ne soient non seulement plus propices à faire surgir des questions mais surtout qu’il s’agisse de questions qui nous interpellent au cœur de nous-mêmes. Lévinas ne disait-il pas que ce sont dans la littérature laïque les textes de Kafka qui sont le plus « bibliques », ils débutent à la « Berechit bara elokim » et ils interpellent l’individu au plus profond.


A suivre.

vendredi 13 mars 2015

Maimo chapitre 3 La classe, les sorties, et les influences sous-jacentes.



Dès la seconde rentrée, je reçus du galon et me retrouvai promû au rang d'instituteur de campagne, ceux qui font simultanément la classe à plusieurs niveaux.

La seconde promotion était aussi d'effectif léger, et on me pria d'avoir ensemble en classe kitah aleph et beth.



J'aurais pu me révolter mais ce n'est pas vraiment un mode que j'ai su pratiquer au long de mon existence, et j'ai au contraire relevé le défi.

Je mis au point une technique à base de fiches que je fabriquais, utilisais jour après jour et qui en étaient la colonne vertébrale  (je travaillais en parallèle au quartier général des EIs où j'étais alors responsable national branche cadette - celle des 8-11 ans -  et nous avions à notre disposition une ronéo, que nous utilisions de toute façon abondamment. Je préparais donc le soir des feuilles d'exercices, les imprimais le matin et faisais la classe en système parallèle : tant que j'enseignais aux uns, les autres faisaient les exercices).

Pour autant que je me souvienne, ceci concernait la partie hébreu, lecture et écriture, tandis que je faisais la partie kodech, - celle que je préférais à l'instar de madame Gordin -  aux deux niveaux ensemble. 

J'ai d'excellents - quoique menus - souvenirs de quelques perles ( "moi je n'ai pas besoin que la Torah me dise de ne pas mentir, je le sais" qui me reste comme une phrase catégorique autour de laquelle se fit le silence tant elle était majeure, elle fut probablement la meilleure de toutes)  qui sortirent à l'occasion de ces séances de Torah, qui étaient de véritables débats animés. Les enfants participaient énormément et il y avait beaucoup de dialogue autour de l'immensité de sujets qu'offre la Torah. J'ai aussi le souvenir de débats occasionnés par l'hétérogénéïté de la classe avec par exemple les familles qui respectaient strictement le shabbat et celles où on regardait la télévision ce même jour. Il s'agissait alors - pour moi - de faire se cotoyer et s'accepter mutuellement les uns et les autres. En poste aux eis, mouvement pluraliste par vocation, j'y enseignais la tolérance aux animateurs qui eux-mêmes rencontraient la même hétérogėnéïté sur leur terrain d'activités, tandis que j'étais mis au jour le jour en situation. 


Je crois que ces parties avec les enfants étaient presque exclusivement orales. Je faisais probablement copier tel ou tel résumé de ci de là , mais ces enfants n'étaient respectivement qu'en cours préparatoire et en cours élémentaire et écrire leur était un exercice difficile en soi. 


Comme il se doit quand on enseigne à des enfants, le cours était ponctué d'activités manuelles, mais je n'ai jamais mis trop l'accent sur ces dernières. Ces séances étaient à mes yeux avant tout des séances de transmission, d'enseignement et je les associais et préférais les consacrer à du discours, à du dialogue.

Nous chantions aussi. J'ai le souvenir de leur avoir enseigné "yeroushalaïm chel zahav" ce qui m'avait fourni l'occasion d'en apprendre moi-même les paroles.

Enseigner ainsi deux classes en parallèle exigeait cependant du temps en préparation, en correction, et peut-être pour me "dédommager" de cette surcharge, il y eut quelques après-midis qui ne se passèrent pas à l'école  comme on peut le voir sur ces photos de sorties au parc de Saint Cloud. J'ai aussi le souvenir de visite aux jardins Albert Khan, les deux à portée de pied depuis la rue des Abondances, mais je ne saurais pas dire combien de fois - si même plusieurs fois il y eut - ceci se produisit.






Ces années furent riches pour moi à de nombreux niveaux. J'ai eu aussi le grand plaisir de pouvoir entendre/lire que cela avait aussi été le cas pour plusieurs élèves. J'en suis évidemment heureux, et ému, mais aussi "interpellé". La question des facteurs qui sont liés à cela m'accompagne tout au long de ma vie en général, et de ma vie professionnelle, tant en tant qu'enseignant qu'en tant que psychologue. 

En tant que psychothérapeute je suis sollicité par la question de l'impact de la psychothérapie. Qu'est-ce qui aide ? Qu'est-ce qui soigne l'âme ? Quel enseignement est majeur ? Formateur ? Quel enseignant laissera plus ou moins d'impact ?

Un exemple me vient à l'esprit  : en tant que psychologue, il m'est arrivé maintes et maintes fois de devoir non seulement accompagner un patient, mais d'avoir à estimer la situation mentale et psychologique de tel ou telle. On utilise pour ce faire une batterie d'outils, dont un tenu pour mesurer l'intelligence. J'ai eu plusieurs modes relationnels à ce test. J'en appris l'existence au cours d'études dans une université résolument hostile à la psychométrie où on m'apprit en premier lieu la méfiance à son égard. La suite de mes études- dans un autre monde universitaire - impliqua de devoir dominer complètement l'outil et c'est ce que je fis, laissant de côté pour un temps les questions idéologiques à son sujet. Ayant ensuite travaillé de très longues années auprès d'adolescents en situation psychologique très difficile, j'eus l'occasion de me rendre compte combien ce test ne mesure pas la "vérité vraie" quant à la capacité intellectuelle, mais seulement au mieux dresse un état des lieux. Les enfants ont ainsi parfois des résultats complètement différents à peu d'années d'écart, apparaissant alors comme beaucoup plus intelligents que par le passé ou le contraire. L’environnement peut influer ainsi sur la situation de l’individu non du tout au tout mais au moins énormément.

Plus encore, et c'est lié plus directement à mes souvenirs d'instituteur, j'ai eu l'occasion de remarquer quelque chose de bien précis, lié à la mémoire. On mesure la mémoire immédiate entre autres au moyen de répétition de séries de chiffres. L'examinateur lit une série de chiffres et l'enfant doit répéter après lui. Si l'examinateur est concentré sur la série de chiffres, l'enfant en aura un bien meilleur souvenir que si elle lui a été lue tandis que l'examinateur pense à autre chose, ou encore j'ai pu aussi constater que la qualité de la rencontre influe aussi sur le résultat, et donc que la note que recevra l'examiné va varier non du fait de sa propre intelligence, mais du fait de la situation interpersonnelle !

Autrement dit, ce que notre esprit enregistre n'est pas uniquement fonction de ce que nos capacités nous permettent de faire, mais aussi (et dans quelles proportions ?) des données de la situation, de combien l'interlocuteur est présent, insistant, concerné, ou "autre" et indifférent dans la même situation, de combien on est porté vers lui ou au contraire de combien il nous est antipathique.

J'ai eu une expérience de ce genre en tant qu'élève, en classe de première, prisonnier de la férule d'une prof. de mathématique, élitiste et sadique, qui avait réussi à me persuader que j'étais apte à tout sauf aux mathématiques, dans lesquels j'étais de son appréciation rien moins que nul. Ayant eu le privilège d'avoir en terminale quelqu'un qui se trouvait à l'extrême opposé, j'obtins une excellente note en maths au bac, après une année qui m'avait réconcilié avec la matière, et mieux encore, avec mes capacités.

Et ainsi la période que je vivais au cours des six années sur lesquelles j'enseignai à Maïmonide a certainement contribué à l'expérience, à la qualité de l'enseignement, et à ce que les enfants en retirèrent.

Qui étais-je à l'âge de 20 ans ? 
Les sorties étaient ma "spécialité" si je peux m'exprimer ainsi, étant au point culminant de mon exercice de "chef e.i." qui alla de 1971 à 1981. Et ce que je commençai à faire en 1976 était comme une consécration de cette activité. A l'intérieur du mouvement de jeunesse, je recevais un rôle éducatif à proprement parler, devenant responsable national de la tranche d'âge 8-11 ans. J'étais donc intimement investi dans l'éducation, dans l'éducation juive. Comment ne l'aurais-je pas été en tant qu'instituteur ?










De plus, ces années Maïmo sont celles où je connus ceux dont les enseignements (pourtant fort différents l'un de l'autre) eurent une influence déterminante sur ma vie : Manitou et Lévinas.

Je connus Manitou (Rav Léon Yehouda Ashkenazi pour les non intimes) en février 1976, pendant les dix jours des vacances de février, en participant à un séminaire de dix jours à Mayanot à Jérusalem. L'impact de ce séminaire fut majeur : J'en rentrai armé de la décision de poursuivre ma vie en Israël. 

Et je connus Lévinas dès septembre 1977, étant venu m'installer à Boulogne, et ayant commencé à suivre ses cours les shabbat matins à l'ENIO.

De plus, nous nous sommes mariés Marianne et moi, au cœur de cette période et ceci participa aussi probablement à ce que je faisais passer. Les enfants ne furent pas conviés au mariage, et je ne me souviens pas avoir pris une semaine de vacances (comme il aurait été naturel), mais j'eus la surprise les jours suivants de recevoir en cadeau un dessin (je ne dévoile pas tout) qui contenait l'annonce qui avait été publiée dans Le Monde. Publiée et donc découverte, et lue. Le dessin est toujours chez moi.

Dernier élément de cette carte d'identité de mes vingt ans, nous prîmes la décision de faire notre alyah. Une alyah que nous fîmes en fait en deux temps...qui occasionnèrent deux départs de Maïmo, la première fois en juin 1978, la deuxième fois (la bonne), en juin 1981.

Je ne pense pas avoir enseigné à mes élèves de 6 ans au début, de 10 ans quatre ans plus tard, ni les enseignements de Manitou, ni encore moins ceux de Lévinas, je ne leur ai pas fait d'endoctrinement, ni pluraliste ni sioniste, mais je suis convaincu que se déroulait en moi à cette époque comme une ébullition qui, elle, a certainement été ressentie, qui, elle, a certainement eu un rôle dans l'impact de ces années Maïmo, sur mes élèves et sur moi.


A suivre.


dimanche 1 mars 2015

La classe et la cour. Maïmo chapitre 2


A l'école, il y a la classe. La nôtre, tant que le bâtiment ne fut pas rénové, était un lieu qui ne manquait pas de pittoresque, dans ce petit pavillon-deux pièces du concierge d'antan, couvert de glycine, très sombre et très exigu. Mais la classe n’est qu’un des lieux de la vie de l'école, qui se passe non moins dans la cour, à l'arrivée, à la sortie.


 tou bichevat 5737 (1977)


L'après-midi était très courte, de 14:00 à 16:30, avec une récréation au milieu, tout juste le temps d'arriver que c'est presque la fin.

Les intermèdes que sont l'avant 14:00, et cette récréation étaient de véritables moments d'imprégnation et de liens.

A 6 ans, l’arrivée à l’école et le départ, en fin de journée, sont des moments très chargés émotionnellement, où se jouent les rencontres entre le monde de l’école et celui de la famille.

Du fait que j’enseignais en après-midi, il ne me fut que rarement donné d’être présent à l’arrivée des enfants et je n’ai qu’un souvenir – de taille  : celui de cet enfant qui partit de toute la vitesse de ses jambes aussitôt qu’il me vit, en criant qu’il ne voulait pas d’un maître. Je ne me souviens plus comment l’épisode se résolut ce jour, je sais seulement qu’il marqua le début d’une relation qui se poursuivit, quoique de loin en loin, bien au-delà de notre vie commune dans cette école.



Je rencontrai aussi bon nombre de parents et pu un peu prolonger les impressions que les moments de classe suscitaient entre les enfants et moi.

Les enfants de six ans parlent beaucoup pendant la classe (la classe que je faisais. Dans une classe de trente élèves il est déjà beaucoup moins facile de faire régner le dialogue, et surtout, les enseignants préfèrent souvent qu'il n'ait pas lieu), où finalement tout était matière à échange, à questions, à remarques. Madame Picard avait bien tenté de me donner ce qui me permettrait de les éviter, mais en fin de compte, je les aimais, si ce n'est les souhaitais. 
Ces remarques, questions et réponses étaient pour moi, et sont restées, le véritable sel de la situation. 
Elles sont du même ordre que ce qui se passait pendant les récréations où les enfants venaient pratiquement continuellement m'accoster, me montrer quelque chose, me raconter quelque chose, me demander quelque chose ou me solliciter pour quelque chose. Ces moments étaient en fait très riches et, occupé que j’étais à mes découvertes, je ne sus pas toujours ni les apprécier ni y réagir comme il eut peut-être fallu. Je découvris ainsi par la suite que certaines « démarches » de certains enfants – ou adultes d’ailleurs – auraient exigé plus d’attention que je n’en avais à l’époque en magasin, n’étant encore que jeune enseignant, jeune adulte. Je passai ainsi à côté de quelques appels, ou sollicitations personnelles que je ne compris qu’a posteriori, en m’en sentant parfois un peu confus.  





C'est que durant ces moments je poursuivais ma découverte de ce monde. 
L'école Maïmonide était déjà un vieux bâtiment, de ceux qui ont traversé les mers, ou les époques. Si monsieur Messas n'était pas nouveau au poste de directeur, il était cependant encore comme une pièce rapportée. 
Évoluaient autour de lui toute une assemblée de gens qui l'avaient précédé sur les lieux et qui étaient - à leurs yeux - l'authentique histoire des lieux, qui possédaient et racontaient l'histoire des lieux, et qui n'entretenaient que des rapports corrects mais méfiants avec le directeur tandis qu'ils paraissaient liés entre eux de liens d'amitié.

Lorsque je me tenais debout sur les marches de l'école pendant la récréation se passaient beaucoup de choses.

Au quotidien, venaient souvent me rejoindre sur ces escaliers quelques "passants" habituels.

Il y avait monsieur Stéphane, d'une soixantaine d'années, dont je n'ai jamais su la définition officielle de poste, mais dont je savais qu'il était affecté à l'écriture, à la calligraphie des documents officiels, calligraphie dont il s'acquittait dans les règles de l'art, avec moult pleins, déliés réalisés à la plume sergent major et à l’encre violette. Il venait régulièrement prendre une pause dans son travail à l'heure où je me tenais sur le perron, et il me faisait un brin de compagnie. Je n'ai jamais eu l'outrecuidance de lui demander depuis combien de temps il travaillait à l'école, tant je craignais probablement d'entendre en réponse que l'école avait été construite autour de lui. Monsieur Stéphane m'a appris qu'à Hanouka, l'année scolaire est terminée. On n'en a pas conscience, on croit même que l'hiver va être interminable,  mais c'est faux. A ce stade, tout est déjà joué. Commençait-il déjà à calligraphier les bulletins de fin d'année à cette époque ? Je l'ignore. J'ai en tout cas un peu appris à m'aligner sur son point de vue. Même si l'hiver est long, la période comprise entre Pessah' et la fin du mois de juin passe de toute façon en un éclair, et d'une certaine manière, monsieur Stéphane n'avait pas entièrement tort.

Il y avait Juan, l'homme à tout faire, haut de moins d'un mètre cinquante, mais vif, habile et la moustache espagnole en bataille. Juan réparait, apportait, déplaçait, et s'agitait tout le temps. Il connaissait tout le monde, et ce n'était vraisemblablement pas superficiel : alors que je revins en visite à l'école pour la seule fois quelques 15 ans après l'avoir quittée, il me reconnut et s’adressa instantanément à moi par mon prénom.

Tous me connaissaient là-bas par mon prénom. Monsieur Messas avait bien essayé de me dire quelques semaines après la rentrée que cela n'était pas convenable qu'ainsi les élèves me tutoient et m'interpellent, mais je n'avais aucune alternative à proposer. Je ne voyais pas comment il allait m'être possible de me faire appeler monsieur ou me faire vouvoyer. J'écoutai donc la remarque du directeur avec respect - mais elle n'engendra aucun changement. Lui le premier m'appelait Jean, mais en me vouvoyant néanmoins.

Il y avait Jeanine, la secrétaire et l'âme de l'école. Ses enfants étaient alors encore petits et ils jouaient avec les élèves de l'école primaire. Elle était très accueillante, pour tous, et pour mme Maarek et moi-même, qui étions les nouveaux arrivants, et son sourire, ses conseils et sa présence attentionnée me restent présents malgré les années écoulées.


Il y avait monsieur Harrus, directeur légendaire de l'internat, qui était aussi souriant et avenant, mais qui ne savait pas trop comment digérer notre irruption et le changement que cela occasionnait dans les habitudes. 

Il y avait monsieur Mimran et son aide (comptable?) qui étaient aux commandes de toute l'administration des salaires.

Il y avait les anciens professeurs, mr Kabla, monsieur Albert Messas, frère du directeur, le professeur d'anglais et le professeur de français dont j'ai oublié les noms (comment se nommait ce syndicaliste combattif qui se battait pour un sujet après l'autre comme si l'avenir de tous était menacé ?), et il y avait Rosine Cohen, dont le fils était dans ma classe et qui se mettait littéralement en quatre pour que la vie me soit le plus agréable possible dans cet endroit qui m'était encore nouveau.

Et il y avait André Fish ( était-ce son nom ?) Il ne resta pas longtemps, et je ne le re rencontrai jamais, mais nous avions bien sympathisé, avant qu'il ne m'annonce lors d'une récréation qu'il quittait (je ne jurerais pas qu'il n'ait pas été remercié..?).

J’assistais souvent au départ des travailleurs du matin qui partaient les uns après les autres, le directeur en particulier, dont l’élégance ne passait pas inaperçue et que je voyais régulièrement partir dans sa Renault 20 qui me paraissait à l’époque comme LA voiture de directeur par excellence. Une fois, alors que je crus qu’il partait,  il commença bizarrement à partir comme à pied …et je découvris quelques secondes plus tard qu’il allait en fait à la rencontre d’un visiteur de marque : monsieur le grand rabbin de Jérusalem, Shalom Messas, père de David Messas. Je le vois encore  marcher sur la rue des Abondances, déserte à ces heures du milieu de l’après-midi, vêtu à la marocaine, ou à la hyerosolymitaine, et le spectacle ne manquait pas de saveur de voir ainsi arriver un personnage qui était simultanément  « hôte de marque » et à la fois personnage tant insolite et étranger au décor. Le directeur l’accueillit avec énormément de respect et de révérence. Il ne venait visiblement pas souvent. Madame Dayan, institutrice plus chevronnée encore que madame Maarek et qui s’était jointe à nous dès la deuxième année me raconta quelques anecdotes sur le personnage qu’elle-même avait connu encore du temps de leurs existence à Meknès au Maroc et pour lequel elle exprimait le plus grand respect.

Il y avait aussi Johar Maarek, qui me transmettait les élèves chaque début d'après-midi à leur sortie du réfectoire. Elle était de naturel enjoué mais on devinait combien ceci était la couche extérieure, combien la vexation ou un autre sentiment pouvaient instantanément tout changer.  Elle me raconta par exemple comment on lui avait enseigné en début de carrière que la meilleure façon de se sortir d'une inspection était de s'imaginer l'inspecteur sur la cuvette des wc et comment cet « enseignement » l’avait accompagnée et protégée. 

M'avait-elle raconté cela hors contexte ou alors que surgit une nouvelle épreuve ? Je ne me souviens plus de la chronologie, mais je sais que cette épreuve se présente à mon souvenir en immédiate association avec ce que je viens de raconter :

Une partie de mes élèves avaient été en classe de maternelle dans un autre haut lieu de l'éducation juive parisienne de l'époque : le gan Montessori de madame Gordin. 

Madame Gordin, veuve de Jacob Gordin, était une vénérable femme déjà âgée et elle dirigeait de mon impression depuis toujours ce gan qui se trouvait dans les locaux de l'ENIO, rue Michel Ange,  Paris XVIème.

Sa visite me fut soudain annoncée : elle voulait me connaître, et probablement aussi Johar Maarek, afin de savoir si elle pouvait envoyer ses élèves "chez nous".

J'appréhendais beaucoup cette visite qui se produisit cependant, et je me retrouvai un beau jour avec une dixième "élève" assise sur les chaises de la classe, assistant au cours que je donnais. Elle ne parla pas, se fit aussi discrète que possible et tout se passa au mieux : je fis se succéder comme d'habitude lecture et écriture, et l'heure de la récréation (que j'imaginais heure de la délivrance) arriva assez rapidement. 

Les enfants sortirent dans la cour et Madame Gordin commença à deviser avec moi, qui m'apprêtais à lui dire poliment au revoir.

Du fait de son âge, elle avait comme un mouvement involontaire qui la faisait doucement dodeliner de la tête. Quand elle comprit que j'étais sûr qu'elle était sur le point de partir, elle se mit soudain à dodeliner et je l'entendis me dire le plus gentiment du monde que tant qu'elle ne m'aurait pas entendu enseigner les matières juives, raconter la paracha de la semaine, elle ne partirait pas.

Je n'avais d'autre choix que m'exécuter...et le résultat fut loin d'être mauvais. Cette séance fut en fait le début d'une relation que nous eûmes Marianne et moi, avec Madame Gordin, que nous appréciions beaucoup, et qui semblait nous rendre la pareille. De plus, j'avais un grand respect pour ce qu'elle incarnait, et en particulier cette méthode Montessori qui me paraissait bien plus avantgardiste que ce que je voyais et qui me déplaisait dans les classes de l'enseignement traditionnel. 

Cette école primaire, à ce stade, était loin d’avoir une quelconque définition, si ce n’est celle d’être un projet en cours de réalisation. Comme je l’ai indiqué dans le premier chapitre, il ne semblait pas y avoir un quelconque autre projet que celui de répondre à une demande. Une demande d’école primaire juive à une époque où celles-ci commençaient à se répandre en France, et principalement en région parisienne.

Hanouka 5736 ( déc.1975) 

Toujours est-il que l'arrivée de ces tout petits enfants dans cette vieille école de "grands" semblait redonner un coup de fouet à tout l'ensemble. Les adultes semblaient fondre de plaisir, et les enfants se sentaient à juste titre comme le clou du spectacle, comme en témoignent les quelques photos de cette fête de tou bichevat fêté pour la première fois à l’école Maïmonide avec les enfants de l’école primaire en grande représentation, orchestrée par une équipe qui était déjà passée de deux à quatre après les arrivées de Mme Dayan et de Gueveret Leibovici, dite « hamora Aliza ».


 A suivre.