Je
lis : "treize enfants executés pour avoir regardé un match de foot",
je vois passer encore une vidéo qui montre l'execution d'une vieille femme en
pleine rue, vraisemblablement dans un pays où la chariah est en vigueur. Je
vois la photo des deux otages japonais à côté du bourreau de Daesh qui se
prépare à leur trancher la gorge, je lis telle énième déclaration haineuse de
tel ou tel porte-parole de l'intégrisme islamiste, ou telle prise de position
néga-sioniste de tel homme politique iranien, turc, ou qatari. Passe une
information selon laquelle tel maire de telle commune française vient de nommer
habitants d'honneur les terroristes qui ont fait des massacres encore la
semaine dernière et alors que je voudrais pouvoir écrire que la justice existe
et que ces gens seront punis, pour leur barbarie, pour leur incitation à la
haine, pour leur soutien des infâmies de l'humanité, je sens que je ne peux
écrire cela, que cela ne renvoie à rien ni à personne.
Je
ne distingue ainsi aucune instance humaine, nationale ou internationale par
laquelle ces gens pourront vraiment être jugés puis punis. Je sens que les
déclarations des politiques euroaméricains si fermes aient-elles pu être,
risquent de rester lettre morte, je crains que le temps ne les érode, et que,
de la même manière qu'il a paru invraisemblable que l'on puisse dire de nouveau
en France "mort aux juifs" et que le monde a continué à tourner sans
aucun changement, de même que, comme le dit ce chant israélien que l'on chante
à yom hazikaron : "le blé a poussé à nouveau", le monde ne va pas se
trouver modifié, ni du fait du massacre à Charlie Hebdo, ni du fait de la
sanglante prise d'otages de l'hyper cachère, ni du fait des massacres commis
par Daesh ou par Bokko Haram.
Nous
ne sommes plus dans l'Antiquité, de laquelle nous restent l'apparition
sporadique d'individus d'exception, philosophes ou prophètes, et les
manifestations de la gloire divine.
Le
monde s'est entre temps peuplé massivement et la présence divine a étė
remplacée par son absence.
C'est
manifestement aux hommes de tenir le gouvernail, et force nous est de constater
qu'ils le tiennent mal. Y a-t-il besoin d'un prophète pour l'observer ? Lors
que l'homme a développé les meilleurs systèmes de communication de tous les
temps et que l'on peut voir en temps réel de n'importe quel endroit du monde ce
qui se passe jusqu'à l'autre extrémité, y a-t-il besoin de prophète pour dire
ou montrer ces choses ?
Quelles
choses ? Le prophète Ezechiel dénonçait la corruption, l'injustice, les graves
fautes d'éthique. Les choses sont-elles nouvelles ? Y a-t-il quelque chose de
nouveau à dénoncer ?
Regardons
les grands de ce monde. Où sont-ils ? Que font-ils ?Les politiciens sont pour
l'immense majorité d'entre eux atteints de folie des grandeurs et d'auto suffisance
narcissique. Ils sont de ce fait principalement menés et empêtrés par l'image
qu'ils donneront d'eux-mêmes et de leur puissance, une puissance généralement
enracinée dans une richesse personnelle, qu'ils ont, les uns comme les autres,
constituée par détournement au grand jour des deniers de l'état et de fonds
prétendûment collectés pour les nobles causes dont ils se prétendent les
défenseurs ou les hérauts. Qui ne sait pas combien de millions se sont ainsi
trouvés, après leur mort ou même de leur vivant, chez des Arafat, Erdogan,
Poutine, El Bagdadi ou le moindre dirigeant africain ? Et notre porte
européenne est-elle tellement propre qu'il n'y ait rien à balayer sur son pas ?
Le
monde entier n'a-t-il pas pu contempler les moindres détails de la villa de
Poutine, du palais monstrueusement mégalomaniaque érigé par Erdogan, (et on
pourrait sans difficulté donner non deux exemples mais cinquante ou plus) sans
que quiconque ait pipé mot ?
C'est
le même monde qui a assisté, effaré (? on en doute), à la mort de plus de
quarante millions de personnes, six millions de juifs, trois millions
d'enfants, des millions d'orphelins, en six ans à peine, du fait de la folie
hitlérienne, à peine 25 ans après vu partir les 8 millions de morts de la
première guerre mondiale ? Le monde qui a dit : "plus jamais cela",
ou qui ressasse le devoir de mémoire.
Plus
jamais ça ? Really ? La mémoire va-t-elle suffire ? Est-ce l'oubli qui est en
question ? Va-t-il suffire d'enseigner le souvenir de la shoah aux candidats
potentiels à l'entraînement dans les camps syriens ?
Ce
même monde n'a su créer que des structures internationales dont une, la
législative, ne rachète pas l'autre, l'éxécutive. Des instances qui se
disputent le titre, qu'elles ne mériteraient pas ni l'une ni l'autre, le triste
titre d'épouvantail de l'humanité, tant elles ne sont à la fois que la pâle
caricature ou la perversion de ce qu'elles devraient être, tant, semble-t-il
personne n'a jamais véritablement eu l'intention de les utiliser réellement,
tant et si bien qu'elles n'ont jamais reçu les moyens de devenir utiles,
compétentes et efficaces.
L'une
est structure de fonctionnaires et de mercenaires, anesthésiés par la
corruption, impotents pour les uns, impassibles pour les autres, muets
devant les situations qu'ils seraient sensés gérer, protéger. L'autre prétend
juger, ne soupçonne apparemment pas l'existence du terme impartialité, tant
elle semble compulsivement acharnée sur une seule cause, alors que les autres
tragédies de la planète ne parviennent pas même à l'interesser.
Et
il existe d'autres instances, d'autres cours internationales, ou autres
sommets.
Leurs
porte-paroles paraissent-ils sollicités par l'état actuel d'un monde en proie
au fondamentalisme barbare ? Voit-on leurs membres fiévreusement attelés à la
tâche de réparation de l'univers ? S'affichent-ils préoccupés par la corruption
? Est-il besoin de citer en exemple la condamnation d'Israël il y a deux jours
pour le "grand nombre " de palestiniens soi-disant déplacés par elle
(il s'agit de maisons construites sans autorisation en cisJordanie, et
détruites de ce fait, auxquelleson ajoute peut-être les maisons de terroristes,
elles aussi détruites ), pendant que la même instance n'a pas un mot pour
parler des majeures déplacements de population effectuées par l'Egypte à
Rafiah, dans le sud de la bande de Gaza cette fois sans aucun autre motif que
des raisons de politique extérieures et de protection de la frontière...?
Ce
monde ne génèrerait-t-il donc d'opérationel que cynisme, corruption, haine et
fondamentalisme ?
Y
a-t-il besoin contre cela d'intervention divine pour ouvrir la terre et y
engloutir des masses ?
Le
peuple effaré des exactions terroristes et des fractions de l'état islamiste le
souhaiterait peut-être, mais Daesh est-il le mal qu'il suffirait d'extirper
pour que le monde guérisse ?
La
suprématie de la toile et du visuel auraient-elles fait définitivement
disparaître et rendu inutiles les écrits, les sources de la morale et de
l'éthique ?
Quelqu'un
pense-t-il aujourd'hui la politique et le social dans ce monde du commercial et
du profit ? quelqu'un cherche-t-il si corruption et fondamentalisme ne
pouvaient se compléter, ne pouvaient être liés l'un à l'autre, l'un menant à
l'autre ? Quelqu'un parle de ceux qui vendent des armes, qui achète du pétrole
à l'état islamique ?
Peut-être
pour cela le monde aurait-il besoin d'un prophète, qui vienne enseigner aux
économistes et aux politologues que la corruption et l'appât du gain
enterreront tout. Quelqu'un pour oser être impopulaire et dire ce que le monde
laïque ne peut ni ne veut entendre. Quelqu'un pour asséner que même s'il faut
enseigner, ce n'est pas de l'enseignement que viendra la solution, pas de
l'enseignement de la mémoire comme s'il n'y avait à combattre que l'ignorance ?
Ce
n'est-il pas ce chaînon manquant entre l'éthique philosophique, les sciences
économiques, le judiciaire et le politique dont il faut se préoccuper, plutôt
que de déplorer que ne se manifeste aucune intervention divine ?
Ce
chaînon n'existe-t-il pas déjà potentiellement ? Quelqu'un se demande-t-il
honnêtement si les pays devraient plutôt être dirigés par la chariah que par
les lois qui ont été élaborés en
Europe
au cours des deux cent dernièes années ? Quelqu'un approuve vraiment la
corruption de ces dirigeants ? leur mégalomanie ?
La
tâche nous serait certes facilitée si une intervention divine pouvait emporter
ces monstres qui sont au pouvoir et asservissent l'humanité, mais soyons
lucides : cela ne suffirait pas. Ils seraient aussitôt remplacés par pire.
Il
manque donc un chaînon. Le chaînon qui manque est
celui de l'écart entre le pouvoir et la morale. Un chaînon qui permette de
combattre ces travers, sans tomber ni dans la Terreur façon Robespierre ni dans
le stalinisme.
N'est-ce
pas un challenge de ce vingt et unième siècle ?