La dramatique - sinon tragique - situation actuelle dans
laquelle nous nous trouvons, habitants d'Israël, est en train de clarifier des
choses que, même si elles sont connues, n'en restent pas moins vraies et
apparemment difficiles à comprendre et à accepter.
Cette
situation démontre que ni la guerre ni les armes ne résolvent les problèmes. En
général elles créent les problèmes, elles les enveniment. Elles ne les
résolvent pas.
Cette
situation crie à la face du monde que ce ne sont ainsi pas les militaires sur
lesquelles on peut (et encore moins doit-on) compter pour trouver des solutions
aux problèmes, et que ce ne sont pas non plus les politiciens qui sont capables
de mieux faire.
Les
militaires creusent les trous de boue dans lesquels les politiciens donnent
l'ordre d'enliser militaires, civils et situations.
Cette
situation nous montre - et pourtant on le savait ! On le sait aussi bien que
quand cet enfant de 6 ans m'avait dit en classe : "je n'ai pas
besoin que la Torah me dise de ne pas mentir. Je le sais ", cette situation nous montre que même si nous
savons que cela ne sert à rien de dire : "je tue l'autre parce qu'il m'y
contraint", nous devons encore une instance qui sache vienne nous aider à
trouver une meilleure réaction que celle, tripale, qui nous pousse à
tuer...PARCE QU'IL NOUS EST INTERDIT DE TUER, et apparemment d'autant plus que
nous sommes le peuple juif.
Le
monde ne se formalise pas des centaines de milliers de morts tués en Syrie, ou
des massacres commis par l'EI , ou par Boko Haram, ou par les barbares, pas
parce que le monde est antisémite. Parce que le monde s'attend à ce que nous ne
soyons pas des barbares. Pour toutes les raisons de la terre.
Parce
que nous avons reçu la Torah, parce que nous prenons sur nous de nous comporter
en fonction de la Torah, et aussi parce que nous ne pouvons nous permettre de
commettre des massacres, du fait précisément que nous avons subi des massacres.
Et
l'opinion nous montre cela noir sur blanc. Et elle nous la montre d'autant plus
quand des nitsolė shoah des Etats Unis manifestent pour dénoncer les massacres
de Gaza.
C'est
un art très difficile auquel il faut apparemment tenter de devenir experts : ne
pas tomber dans le jeu des plus prompts à l'auto critique, qui en ont les yeux
aveuglés au point de ne pas voir qu'ils ne font que fournir de l'eau au moulin
de nos ennemis, mais ne pas plus rester agrippés pathologiquement aux branches
les plus élevées d'un arbre dont on ne peut descendre.
J'étais
étonné de la sérénité et de la sagesse avec laquelle Bibi semblait mener cette
opération. J'étais étonné en particulier du fait que je n'avais jamais apprécié
ses manières, ni quand il répétait à l'envie :"qu'ils donnent! Puis ils
recevront" parce qu'il aurait fallu être sourd comme un pot pour ne pas
entendre que ça cachait -mal - derrières ces paroles les prétextes ã ne rien
faire avancer, ni en regardant rétrospectivement ce qui précisément a toujours
été l'emblème de sa politique : l'immobilisme absolu.
J'étais
étonné parce que j'avais toujours eu le sentiment que les discours des forts à
bras qui parlaient des arabes de façon péjorative, et raciste, à coup de
"ils ne comprennent que la force", ne nous emmèneraient nulle part,
ou en tout cas en aucune direction dans laquelle je me sens prêt à les
accompagner.
Et
j'avais de quoi être étonné : dans l'état actuel des choses, nous (l'armée de défense
– yaani. Ne menaçons-nous pas nous-mêmes ce nom en nous embourbant dans cette
guerre d’usure improductive? - d'Israël) n'en finissons plus de "porter des
coups terribles" , de " faire payer le prix maximal", de porter
"lourdement atteinte" aux capacités militaires du hamas....
Et
tout ceci semble ne servir à rien d'une part, et à accumuler morts et critiques
très lourdes contre nous d'autre part.
Parce
que quand tu as tué deux mille deux cents personnes, dont des civils, des
femmes et des enfants, tu pourras répéter jusqu'à la fin des temps que c'est la
faute de quelqu'un d'autre, c'est quand même toi qui les auras tués.
Et
tu peux t'offusquer que l'opinion réagisse à ces deux mille alors qu'elle ne
réagit pas aux millions tués par les turcs (c'est pour ne pas répêter le mot
barbare, j'emploie un synonyme..), c'est quand même toi qui les a tués, et
c'est donc ta collectivité à toi qui devras en rendre compte.
Et
c'est ce que nous souhaitons !!!
Nous
sommes Israël non du fait de la couleur de notre sang, qui n'est plus bleu qu'aucun
autre, mais du fait que nous devons agir au nom de la Torah !
Et
donc, catch 22.
Le
hamas ne veut pas discuter ni marchander avec nous mais nous exterminer, et il n'y
a pas à discuter avec quelqu'un qui ne veut que ta disparition. C'est vrai.
Mais ça ne nous dispense pas de chercher comment résoudre le problème, et ça ne
nous autorise pas à accumuler les morts et les décombres dans le camp adverse.
C'est
ici que les militaires et les politiciens doivent se rappeler qu'ils ne sont
que des militaires et des politiciens, c'est à dire des éléphants dans les
magasins de porcelaine.
Ils
doivent faire appel non uniquement aux spécialistes de la diplomatie, des
ministères des relations extérieures (surtout quand ils sont de la trempe de
Lieberman, D. Préserve..), mais à des penseurs.
Tant
que la place n’aura pas été faite comme il se doit à ceux-ci, tant que ceux-ci
n’auront pas assumé leur rôle, leur devoir, il faudra continuer à entendre les
discours d’immobilisme, de critique antisioniste/antisémite, ou les discours
fascistes
Et
il y a des penseurs ! même une fois que Leibovitz, Lévinas ou Hartman sont
morts.
Il
y a ici un problème à résoudre.
Non
uniquement un ennemi à vaincre au bras de fer et en faisant couler des litres
de sang ! la différence entre le drame et la tragédie tient à l’issue.
Ce
qui a un aboutissement est le drame, et nous pourrons supporter, avoir de la patience
si nous sommes pris dans un drame. Ce qui ne mène nulle part est la tragédie et cette dernière est insupportable.
Les
situations ne sont tragiques que selon la vision grecque du monde. Elles ne le sont pas si on regarde autrement, nous a-t-on toujours enseigné.
Il
est temps de regarder autrement.