dimanche 25 septembre 2011

Akhot Ketana


Comme chaque année, à la même période, le même souvenir.

La même mélodie qui vient comme se réveiller du fond de ma mémoire, qui émerge de la place qui est semble-t-il continuellement la sienne.

Est-ce le seul souvenir qui me reste de ces « cérémonies » ? Peut-être. Presque. Un souvenir associé aux sièges capitonnés de cette salle de spectacle, dans laquelle le solennel devait chaque année le disputer au grotesque. Une salle dont on découvrait en entrant, la scène sur laquelle avait déjà pris sa place l’acteur principal, vêtu comiquement de sa robe blanche, et surtout de ce chapeau de la même couleur mais paré en outre d’un pompon !

Le spectacle – car c’en était un ! spectacle musical - ne commençait pas encore que déjà on entendait le chœur – si ! il y avait aussi un choeur ! - psalmodier ce chant, que je retrouve, qui me rattrape si agréablement chaque année.

Akhot ketana. Petite sœur. Petite sœur ? Communauté d’Israël si tristement comparée à cette enfant du Cantique des Cantiques qui grandit, se développe, et dont la beauté attire les soucis, place son entourage dans l’embarras.

Une musique que je ne retrouve plus ailleurs qu’au fond de ma mémoire.

Une musique que je n’ai plus entendue chanter depuis que ces offices de liturgie israélite se sont enfouis dans les brumes du passé. Une musique si belle, pour un texte si triste,

Si pessimiste, tant marqué des douleurs de l’exil, et de l’oppression, un texte où est si frappant ce présent tellement douloureux qu’on le souhaite déjà devenu passé lointain.

Etait-ce cela Roch Hachana ? Pour nous, enfants d'un exil déjà moins lourd - mais avec le souvenir de la shoa encore bien bien pregnant - ce n'était plus déjà si tragique qu'au moyen âge. C’était aussi un repas familial festif et chaleureux, mais ce n’était pas non plus ce qu’est aujourd’hui Roch Hachana. Roch Hachana de miel, de grenades, de dattes, de l’automne qui cette année l’a précédé de quelques jours, Roch Hachana de douceurs.

Roch Hachana ne vient plus aujourd’hui, pour la partie du peuple installée en Israël, scander le malheur d’une année après l’autre, dans l’espoir inatteignable qu’enfin une année, une seule, soit marquée par ses bénédictions et non par des malédictions que l’on désespère de pouvoir enfin être en droit d’oublier. Roch Hachana de 2011 en Israël, quelle que soit l'ambiance politique régionale, n'a plus de commune mesure avec cette lourdeur d'un quotidien oppressant.

C'est d'une autre sorte de Roch Hachana que nous parle ce cantique. Un chant magnifiquement écrit que ce « Akhot Ketana » sur lequel s’ouvre dans les communautés séfarades la liturgie des fêtes de Tichré. Un chant qui nous vient d’un siècle dit des lumières, composé par Rabbi Avraham Hazan Guerondi, un géronois de la plus belle époque, celle de Nahmanide. Et pourtant, un chant de tragédie, qui fait éteindre toute velléïté de nostalgie de ces si célèbres lumières.

Un chant dont je veux garder la mélodie, la beauté de la langue, mais à condition de ne la conserver que comme calligraphiée, esthétique paravent d'un contenu que l'on ne se souhaite pas.

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