Rétrospective - suite
7. Ce qui est arrivé à la famille Tauber en parallèle de la hassidout Pilev.
Lycée français - quatrième texte
lycée français - cinquième texte
lycée français - sixième et dernier texte.
2. Voyage à Trieste. Réminiscence d'un passé non vécu
3. Henry-Jacques Pisanté. Pour contribuer à élever un peu le débat.
5. Du pont d'Austerlitz à l'hôpital St Antoine
Voyage aux sources polonaises
Deuxième épisode
Arrivée sans encombres, et récupération de l’appartement (chmielna 73) dans un complexe d’immeubles d’un laid accompli, d’inspiration soviétique. Une énorme cour entourée d’une dizaine d’entrées identiques le tout sur environ sept étages. L’appartement est propre et installé comme il faut, et correspond complètement à nos besoins, Marianne, Michèle et moi.
La première étape du voyage est la cérémonie en souvenir de la déportation à Treblinka de tous les juifs du ghetto, qui debuta le 22 juillet 1942 (qui s’avère avoir été ...le 8 av de cette année) et s’accomplit en quelques semaines, déportation vers la mort de quelques 380000 juifs du ghetto.
La cérémonie, située à la humshlagplatz, d’où partaient les trains, entièrement en polonais, et réunissant quelques deux mille personnes, incluant « el male rahamim », couverte par une forte présence policière bienveillante, est suivie d’une marche dans les rues du ghetto,
la première étant karmelicka que nous descendons, non jusque l’endroit où se trouvait la boutique Heinsdorff (au 11 de la rue, au coin de la rue Nowolipie) dans laquelle travaillaient pépé et mémé, firent connaissance l’un avec l’autre et commencèrent l’histoire familiale à laquelle nous appartenons. Je quitte le défilé (j’étais en train automatiquement d’écrire le convoi..!) quelques minutes le temps d’aller photographier ce coin de rue...qui n’a bien entendu aucun rapport avec l’aspect qu’avait l’endroit en 1923 : nous sommes dans le ghetto entièrement rasé en 1945 suite aux bombardements, cf film « le pianiste » de Polanski.
Et à propos complètement détruit, la marche, après être passée par la rue Chlodna (sur le trottoir de laquelle on voit clairement les limites du mur du ghetto, dessiné sur le sol)
La journée s’achève par un repas chez Katarzyna et David, de catering cachère, en compagnie de Bella Shwartzman- Zarnota, traductrice et écrivaine polonaise, née en 1947 à Waroslav,
et qui nous raconte sa vie, comment la période 45-48 a été relativement emplie d’espoir de réinstallation, ombragée si ce n’est complètement obscurcie par le pogrom de Kielce, suivie d’une période laïque jusqu’à l’arrivée du communisme en 1968. Le retour collectif au judaïsme date de la fin du communisme en 1991, avec depuis, l’ouverture de l’institut d’histoire juive, la réparation de la synagogue Nozykov seule ayant survécu à la guerre, et le retour de de plus en plus de juifs au judaïsme. Cette Bella, qui semblait dans les premiers temps d’après guerre être attachée uniquement à un judaïsme laïque composé essentiellement de yiddish, a progressivement fait elle-même un retour vers la Torah, étant active dans la mise en place de gans pour enfants, d’écriture de livres de paracha, en marge de son activité de traductrice du français au polonais, qu’elle a progressivement converti en traduction du yiddish en polonais, activité pour laquelle elle vient de recevoir un prix, (de l’institut Yivo de recherche sur la culture yiddish) que nous fétons en levant un verre. Elle vit à Varsovie, en compagnie de son mari,non- juif, mais incite ouvertement sa fille à partir en Israël, à ne pas faire sa vie en Pologne
Mardi 24.7.
Après une petite marche dans une Varsovie grise et fraîche, très parve/moche, arrivée au cimetière juif où les choses ne se passent pas comme je pensais.
Je pensais que comme m’avait été localisée la tombe du trisaïeul, j’y irais rapidement le matin en arrivant, avant la visite groupée.
En fait nous avions rv à 10:00, y arrivons tout juste avant...pour découvrir que le cimetière est fermé et n’ouvre...qu’à 10:00.
Ensuite, le Przemyslaw Szpilman, directeur du cimetière, qui m’a localisé la tombe est loin de chercher à engager la conversation, et c’est notre guide, Vitek, qui s’avère au long de la visite être une véritable encyclopédie sur pieds, et qui est un spécialiste accompli de ce cimetière, ayant contribué pendant quatre ans à travailler jour après jour au recensement et à l’inscription en ligne des tombes, qui m’explique que je n’ai aucune chance de trouver seul cette tombe, mais il m’assure que nous y passerons.
Il nous emmène ainsi dans une promenade de trois heures dans ce cimetière gigantesque qui est surtout une véritable forêt. C’est touffu d’arbres certains très hauts, et on marche dans le limon. Il y a quand même des chemins. On passe par quantité de tombes dont il nous raconte l’histoire, tombes sculptées, tombes vénérées, tombes méprisées, celle du fondateur du cimetière, Zonenfeld qui se fit appeler Berek Son...qui devint Bergson, et dont Henri Bergson était le descendant, tombe magnifiquement sculptée,
en passant par la place où une des maisons ayant tenu et ayant été rénovée se tient à côté d’une encore tristement en état, place qui fut le haut lieu de la délinquance juive ayant inclus la traite des femmes, quoiqu’incluant la visite de la synagogue et une très intéressante rencontre avec Stas, le rabbin d’Etz Haïm, la partie réformée de la communauté de Varsovie, le suite de la journée m’est bien plus terne que cette visite du matin.
La journée s’achève par un repas d’une partie du groupe chez nous dans une très sympathique ambiance.
Le matin se déroule très rapidement au musée juif, qui requiert au moins le double des trois heures que nous avons à lui consacrer. Il est très intéressant, retrace toute l’histoire du judaïsme polonais, on suit l’exposition dans le sens chronologique, l’accompagnement audio à l’oreille. Le ton est récurrent, constant et rappelle de façon atténuée le message actuel du gouvernement polonais : les juifs ont trouvé en Pologne le paradis. Plusieurs personnages notables, rois ou princes, ou autres nobles leur ont accordé à diverses phases de l’histoire toutes sortes de droits, les ont protégés, leur ont permis de s’institutionnaliser, de se développer, et tout ceci justifie l’interprétation du nom Polania : ici réside la chekhina.
Ce n’est pas à cause des polonais que tout ceci s’est achevé tragiquement, mais à cause de l’église, ou des diverses invasions qu’a subies la Pologne. Les turcs, les russes, les autrichiens et en fin de compte les nazis puis les soviétiques. Tous ceux-là ont, qui envahi et massacré, qui conquis et imposé leur loi, qui restreint les droits qui avaient été donnés aux juifs, et c’est ainsi que furent abolis les droits et même les privilèges dont ont bénéficié les juifs entre 1200, date estimée de leur arrivée, et 1800.
Ce ton est un peu révoltant, même s’il repose sur la réalité historique et géographique de la Pologne, qui a toujours été faible politiquement, en étant installée en étau entre l’ouest et l’est, entre de puissants empires, qui l’ont sans cesse envahie, se la sont partagée et ont causé tous les torts, dont la shoah n’a été que l’apothéose, à cause de la folie hitlérienne.
On n’entend pas de tout ce discours ce avec quoi j’ai été élevé, c’est à dire l’énorme méfiance, teintée de rancune à l’égard des polonais, qui m’a baigné, tant du côté Fliederbaum (Varsovie), que du côté Tauber (Pulawy), mais ce discours était inclus dans le message venant du côté « tata Renée »(Wajnberg) et du côté « Jack Fliderbaum ». Eux gardent de bons sentiments à l’égard de la Pologne, tandis que l’autre côté dit : « si un feu prend à une frontière et ravage toute la Pologne jusqu’à l’autre frontière, je n’appellerai pas les pompiers » (Salomon Fliederbaum).
Nous quittons le musée à la salle des débuts du sionisme ( c'est-à-dire en n'atteignant pas la rue de Varsovie reconstituée…ce dont je reste triste) et il est possible que nous ne complèterons jamais cette visite, au cours de laquelle nous retrouvons le récit de la richesse de Shmul Zabitkouber (Jacubovitch), dont le fils Berek Sonenberg créa le cimetière juif de Varsovie et est l’ancêtre d’Henri Bergson, nous découvrons celui de la trop courte vie de Maurycy Gottlieb, peintre fort narcissique ( inclus en selfie dans grand nombre de ses tableaux, et non uniquement dans l’ultra célèbre du jour de Kippour) mais fort talentueux, surtout quand on réalise qu’il est mort à 23 ans ! et nous rencontrons Suzanna Rogojinsky, notre nouvelle guide et chauffeure, venue nous rencontrer à 13h00 face à la gigantesque sculpture de Nathan Rappaport représentant un regard très soviétiquement inspiré sur le ghetto et sa révolte.
Avec elle nous quittons Varsovie après avoir de façon éclair « complété « la visite : nous passons devant Mila 18, où est erigé le monument en souvenir de la révolte du ghetto, devant les piles de métal érigées en souvenir du pont de ulica Choldna mais nous ne nous arrêtons pas...et bien nous en prend.
Suzanna est d’un calibre « hors calibre ». Petite nana souriante à la belle chevelure dorée, aux yeux bleus et au grand sourire, elle explique rapidement comment elle sait l’hébreu grâce aux six mois d’oulpan qu’elle fit à Haïfa suite à son alyah...une alyah qui dura six mois, après lesquels elle fuit littéralement Israël à cause de la chaleur (!). Elle est interprète de formation mais essentiellement guide de tioulé shorashim depuis deux ans, monitrice de ski en Italie l’hiver, étant native de Zakopena, et elle pilote de main de maître même dans les rues les plus étroites son Opel vivario de neuf places.
Elle a pris contact avec notre hôte de Pulawy, le prêtre protestant Yaroslav Bator (dont Katarzyna a découvert puis m’a donné les coordonnées) qui nous attend à 16:30 au bord de la rue principale d’accès à Pulawy.
C’est un gros bonhomme au crâne rasé, vêtu de noir, d’une cinquantaine d’années, circulant en scooter, ne parlant que le polonais, et qui fait plutôt fruste. Il est pasteur, mariée à une pasteure, père de quatre enfants, est né à Pulawy...et a un passé de néo-nazi qui s’était même fait tatouer le sigle ss...jusqu’à avoir commencé à lire la Bible et le nouveau testament. Depuis quelques bonnes années, il œuvre à faire connaître l’histoire des juifs de Pulawy (ainsi que de Kurow, d’après sa page facebook, mais il ne sera pas question de Kurow au cours des quatre heures que nous passerons en sa compagnie. D’après le musée, l’histoire du judaïsme est plus courte à Pulawy qu’à Kurow...mais c’est Pulawy notre sujet).
La visite débute au bord de la route, au pied de la toute petite pierre gravée et ornée d’une plaque et d’un Magen David, située au haut d’un monticule fleuri et entretenu (aux frais de la mairie précise-t-il. Cette pierre a été érigée...puis profanée, et est restée en l’état, recouverte de peinture, jusqu’à ce que lui-même vienne la frotter et la restaurer), et alors qu’il nous retrace l’histoire de l’invasion nazie, il confirme ce que les lectures m’avaient appris : les nazis arrivèrent à Pulawy dès début septembre 1939, bombardant et incendiant les deux synagogues en bois encore le 6 du mois, installant le deuxième ghetto en date de toute la Pologne encore au cours de ce même mois. Ce ghetto fut fermé le 28 décembre 39 quand les juifs furent transférés-regroupés dans d’autres ghettos...et l’histoire du judaïsme à Pulawy s’arrête brutalement et définitivement à cette date. Michèle et moi savons par les récits historiques familiaux que la famille n’était pas dans ce ghetto mais qu’ils avaient fui à Baranow, village (très – trop…) proche. Quand tous ceux du ghetto furent conduits à Sobibor, cela incluait aussi ceux qui avaient fui à Baranow et dans peut-être d’autres villages-bourgades environnants. Bator raconte comment ce 28 décembre , il faisait moins 30 et comment les juifs ont été contraints quand même à marcher, ceux qui n’en avaient pas la force étant enfermés dans la synagogue, où ils moururent de froid. Ces récits se trouvent dans le livre « yskor buch Pilow ».
Mais la visite se poursuit. Ou plutôt commence.
De là, il nous montre d’un geste un peu évasif que se trouvaient à proximité la synagogue et le mikveh...mais rien de cela n’est à voir : ces bâtiments ont été détruits et ont été construites d’autres choses à leur place. A ce stade, la situation parait être qu’il n’y a que cette stèle à voir avec les yeux à Pulawy, et que le seul habitant qui conserve le souvenir de la présence juive à Pulawy se trouve face à nous.
Nous marchons cependant, en direction de la Vistule tandis qu’il nous raconte comment dans ce qui est la maison où habitait le rav Mendel Naj (le dernier rabbin de Pulawy), lui et le petit groupe qui l’accompagne dans ces actions vouées au souvenir au judaïsme de Pulawy, ils se sont soudain aperçus de l’existence d’une soucca ! dit-il avec excitation. Nous nous trouvons à ce moment dans une petite rue parallèle à la grand-rue, alors qu’il nous désigne du bras deux immeubles d’habitation récents en disant « ici était la synagogue, ici le mikve » alors que nous ne pouvons rien en voir, mais nous continuons à marcher 20 mètres, et découvrons sur la gauche une vieille maison de briques rouges, d’environ 60 mètres de long, sur deux étages, inhabitée....et dont il nous explique qu’ici vivait le rav Naj.
A une extrémité, au premier étage, un balcon sur lequel se trouve comme un mahsan en bois et c’est, dit-il, la soucca. Le mahsan ainsi que le balcon sont couverts, la toiture les incluant et les couvrant entièrement, et après quelques secondes d’hésitation, je lui explique qu’une soucca doit être ouverte sur le ciel pour en être une. Il répond que le bâtiment a vécu des jours difficiles, a été d’abord utilisé par les allemands, qui y ont entreposé toutes sortes de choses, une écurie entre autres, il sait ce que je viens de lui répondre sur la soucca, et répond que le toît n’est pas celui qui existait du temps du rav Naj. C’est la première maison, le premier signe tangible que nous découvrons.
Ce sont des signes d'autant plus impressionnants qu'ils sont inattendus. Ces découvertes sont néanmoins impersonnelles, ne nous touchent qu'indirectement : ma grand-mère, le père de Michèle ont quitté Pulawy bien avant ces évènements..
Nous revenons en direction de la grand-route, et il nous montre sur le trottoir d’en face deux maisons dont il dit qu’elles étaient des maisons juives, tandis que nous continuons à deviser et que je crois constater que j’en connais un peu plus que lui sur l’histoire du judaïsme de Pulawy : lui connait surtout la tragédie (à cause des allemands - encore une fois) de la seconde guerre mondiale. Il semble n’avoir pas conscience de la différence entre hassidim et mitnagdim, et ne sait pas que le judaïsme de Pulawy avait d’abord deux versants (mitnagdim venus de Lithuanie en fin dix-huitième siècle, puis hassidim fin dix-neuvième) puis plusieurs encore (toute la gamme de la haskala et des mouvements d’inspiration sioniste). Voici ce que je crois savoir : Le rav Naj était le rav officiel de la ville, et en parallèle de sa communauté s’est installé en 1895 le rebbe Haïm Israël Morgenstern, petit fils du Menahem Mendel Morgenstern, « saraf miKotzk » et premier Kotzker Rebbe. Avec son installation à Pulawy, se créa la hassidout Pilev (nom yiddish pour Pulawy), qui attira de nombreux juifs (et en particulier Yankeleh Tauber, père de Israël, qui passa pour cela de Szydlowiecz à Pulawy) et avec elle se développa non seulement la présence juive mais aussi l’importance socio-économique de toute la bourgade. Ce rebbe est l’auteur du « shalom Yeroushalaïm », premier livre hassidique sioniste avant le « em habanim semekha » et dans lequel il prône l’achat de terres et l’installation des juifs en Palestine. A sa mort en 1906, lui succéda le Moshe Mordekhaï Morgenstern, son fils, deuxième admor de la hassidout Pilev...qui quitta Pulawy en 1914 pour Varsovie, vraisemblablement du fait de la guerre, pour finir ses jours en 1939 et être enterré au cimetière juif de Varsovie, là où nous vîmes hier sa tombe, son ohel.
A ce stade de la visite, nous ignorons encore que nous attend bien mieux..
Israël tenait la graineterie qu’avait ouvert Yankeleh, Moshe Mayer était actif dans le commerce de la farine, possédait des moulins et vendait dans toute la région...mais sa journée se déroulait entièrement dans le bet hamidrash, aux côtés de Yankeleh son ami que tous surnommaient « rabbi Tarfon ». Même le jour où mourut Ytel sa femme, il fit le hesped depuis le bet hamidrash mais n’alla pas jusqu’au cimetière. Ses enfants ne restèrent pas des hassdim. Son aîné Hazkel se laissa cependant marier à la mode hassidique avec une cousine, mais servit dans l’armée, s’installa à Lublin et vécut en juif hiloni. Rachel refusa de se laisser marier, exigea de partir à Varsovie où elle rencontra Salomon, alors que les deux étaient hilonim. Lonia, Yaïr, Slava et Arnold fréquentèrent les groupes sionistes qui se développaient à Pulawy. Slava rencontra Yehoshoua Milrad, lui aussi de Pulawy, Eva rencontra Bernard Borenszteijn, lui aussi de Pulawy.
Rachel et Salomon étaient partis en Palestine en 1925. Salomon était parti le premier, avait stationné six mois à Trieste puis ayant réussi à atteindre Haïfa, avait envoyé un visa à Rachel. Lonia a raconté comment les hassidim de Pulawy l’ont accompagnée à la gare en chantant : « elle partait pour eretz Isroel ! ».
Rachel et Salomon se marièrent à Tel Aviv en 1926 ( à rosh hodesh Iyar) mais émigrèrent pour Paris en fin1926/début 1927. Les y rejoignirent Slava et Yehoshua, Eva et Bernard, puis Lonia suivie de Yankeleh Frydman, aussi de Pulawy, qui l’épousa à Paris. Arnold ne quitta Pulawy qu’en 1935, Yaïr ne quitta/fuit qu’en 1939, et Israël Avraham, et sa femme Hanna, et leur fils Shlomo firent partie de ceux parmi les juifs de Pulawy qui finirent leurs jours déportés à Sobibor.
Il semble qu’ainsi que cela apparait sur la photo de groupe en 1935, lors du voyage de Rachel accompagnée de ses deux filles Mathilde et Irène, alors qu’elle tentait sans succès de leur faire quitter Pulawy, n’étaient plus hassid qu’Israël et sa femme. Alors qu’il a encore le couvre-chef typique et est boutonné droite sur gauche, et sa femme la tête couverte d'une perruque, tous les autres sur la photo sont vêtus à l'occidentale.
A Pulawy 1935. |
Mais ils habitaient encore la « cour » du rebbe, telle qu’elle est décrite dans le livre de Pulawy...et nous découvrons cette cour dont j’avais cru avoir lu qu’elle avait été détruite en même temps que la synagogue.!!
photo extraite du livre édité par Jaroslav Bator, pasteur à Pulawy |
Le bâtiment qui longe encore aujourd’hui la route d’accès à Pulawy, qui s’appelait alors Lubelsky, est le batiment de 300 m de long décrit dans le yzker buch, qui abritait le bet midrach et les maisons des proches du rebbe, dont Yankele, Israël, Moshe Mayer et les autres.
photo prise par moi le 25 juillet2019 |
Il a encore le fronton triangulaire qu’on voit sur les photos de l’époque, dont le pasteur nous montre un exemplaire. Nous ne trouvons trace d’aucune mezouza, mais il y a encore les entrées vers la cour intérieure.
À certains endroits, subsiste un pavage ancien, du côté intérieur subsiste l’aspect d’époque,
la cour hassidiaque vue de l'intériieur. Juillet 2019 |
d’une autre maison aussi en briques, que je croyais avoir été détruite par les allemands et qui est face à nos yeux.
Il est loin d'être impossible que cet appentis soit d'avant-guerre. |
seul souvenir visible du cimetière juif. On remarquera que le texte "hébraïque" sur le monument est....en "gibrish". |
Sous cette butte aurait été enterré l' admor de la hassidour Pilev. |
Clotûre
Aujourd’hui commence en fin de compte le voyage en Pologne, mais est-il tellement différent des passages à ulica Karmelicka, au cimetière de Varsovie, à la rue Chlodna de Varsovie, à Pulawy ?
Nous nous rendons à Kasimir Dolny, considérée comme étape touristique. C’est effectivement un village estival sur les bords de la Vistule, dans lequel il y a aussi une vieille synagogue désacralisée, transformée en librairie et lieu d’exposition et dans laquelle on trouve beaucoup de belles photos en noir et blanc du vieux judaïsme de Pologne, il y a un cimetière profané semi-restauré et avec une impressionnante sculpture/stèle...et il s’est mis à faire très chaud.
Le trajet jusqu’à l’étape suivante est une balade à travers la Pologne profonde, où nous passons par pléthore de petits villages dans lesquels on peut sans cesse se demander s’il y avait ici ou non des juifs.
A mi chemin du trajet vers Krakow, on s’arrête à l’initiative de Suzanna dans une petite ville, Chmielnik, dans laquelle ne subsiste qu’une synagogue désacralisée, transformée par les polonais locaux en salle d’exposition, dans laquelle ils ont créé une bima ..en verre ! La seule au monde est très fier de nous dire le guide local...ils ont aussi fait une sorte de ohel zikaron dans le terrain attenant, dans lequel il prétend qu’ils ont écrit les noms de familles de tous les douze mille juifs qui étaient sur place avant la shoah..et ont tous disparu.
Il nous projette aussi un très intéressant morceau de film tourné par des polonais qui avaient émigré aux USA et sont revenus à Chmielnik dans les années d’entre les deux guerres. Un témoignage unique de ce qu’était le paysage humain juif en Pologne à cette époque, qui contient quelques interviews de femmes polonaises non juives au langage complètement nostalgique..
Le mystère de la relation juifs-non juifs - avec ses aspects de haine réciproque, mêlés de relation amicale interconfessionnelle - persiste.
Arrivée en fin de journée à Krakow où nous recevons un appartement en plein quartier juif, au troisième étage d’un vieil immeuble aux plafonds hauts..ce qui les fait compter pour 5 si à en juger au nombre de marches..et assez joliment installé...mais dans lequel il manque pour ainsi dire une pièce. D’une part cela nous contraint Marianne et moi à dormir dans le salon, d’autre part ce salon royal avec lustre et canapés en faux cuir vert foncé permet de recevoir tout le groupe pour la super réunion de fin de voyage (le dimanche se passe en formation éclatée) le shabbat en fin de journée.
Le vendredi matin, visite en groupe, de niveau de guide relativement moyen, mais elle me montre - au groupe synagogue-cimetière du Remah près - des choses que je n’avais pas vues (la synagogue haute, la maison d’Helena Rubinstein, le musée de Galicie, et la rue où logeait - et où a été tournée une partie du film - Oskar Schindler).
L’après-midi, tandis que les Friedson partent pour encore une étape-visite dans les mines de sel pluricentenaires de Wieliczka aux alentours, nous nous rendons chez un luthier, Matthiew Farley, dont j’ai découvert l’existence, et avec lequel la rencontre est super interessante. Il s’agit d’un américain qui s’est en fin de compte retrouvé luthier en Pologne par une succession peu ordinaire de hasards...ayant commencé son périple hors des USA pour retrouver une française qui l’a plaqué à son arrivée à Paris...ce qui l’a conduit à reprendre contact avec de vagues connaissances polonaises...de quoi est sortie une relation avec une nana qu’il a suivie à Rome, où il a enseigné l’anglais entre autres à un étudiant qui était régulièrement couvert de copeaux de bois...ce qui éveilla sa curiosité...et le conduisit à s’intéresser puis à apprendre la lutherie.
Quelques années plus tard il quitte l’enseignement et s’installe comme luthier, spécialisé en violes de gambe...qui parait un instrument dans lequel est exigée énormément moins d’exactitude que pour les violons...ce qui est une lueur d’espoir...même si il ne me parait pas l’individu le plus exact et le plus porté sur les finitions. Mais il raconte s’être créé une notoriété et avoir des commandes..très sympa en tout cas.
Dimanche 28.7.
Visite paisible de la grande place, le musée national (avec en particulier le tableau de De Vinci de la jeune fille à l’hermine, qui provient du musée Kartorycky de Pulawy),
Et pourtant, comme on dit en hébreu justement "toute personne dont les yeux sont à leur place sur la tête" ne peut que voir comment tichea beav n'appartient pas au passé.
קורותיה של משפחת טאובר, ברקע גורלן המר של חסידויות פילוב וסוקולוב, ושל היהדות בעיירה פולאווי, שבדרום מזרח פולין.
מאחר ונסגרה אז חסידות פילוב, ושמלחמת העולם השנייה חוללה את הרצח הכללי של כל יהודים במקום זה, אין להפריד תיאור של המקום ממרכיב הטראומה שהתלוותה לשורדים ולצאצאיהם, שיהיו אלה תושבים או צאצאי חסידות פילוב.האם ניתן למצוא סימנים של טראומה זאת היום ?
traduction en françaias chaleureusement fournie par Philippe Michard.
ליאנקעל׳ה טאובר נולדו ארבעה בנים, שניים מהם היו ישראל אברהם (1880) וחיים (?), שקיבלו ככל הנראה את שמותיהם בהשראת השמות של האדמו״ר. שני האחרים לא הותירו לא צאצאים ולא זכר, והשואה היא הסיבה לכך.
יאנקעל'ה טאובר |
האדמו״ר מפילוב הראשון, רבי חיים ישראל מורגנשטרן, דאג לחצר חסידית חיה ותוססת, ולהשפעה רוחנית ומוסרית על ההולכים בדרכיו. הוא התיישב, יחד עם חלקם, בבית הארוך ולו חצר אחורית גדולה שלאורך ״אוליצה לובלסקה״ בעיירה, אותו הבית שמסמל לאורך שנים ארוכות את יהדות פולאווי, ובחצר שלו שיחקו סבתא שלי רחל ואחיה ואחיותיה, יחד עם כל ילדי חצר החסידים הרבים. באופן כמעט פלאי, על אף שכל סימני יהדות פולאווי נהרסו והועלמו, הבית עד היום עומד, על אף שלא נשאר בעיירה אף יהודי אחד.ישראל אברהם טאובר שנולד כאמור בשנת 1880 בעיירה הסמוכה קורוב, נישא למאטל רוזנסון. אחרי מותה (בשנת 1905), הוא עבר לפולאווי, נישא בשנית לחנה טיטלבאום, בתו של משה מאייער טיטלבאום, והוא עבר להתגורר עם החסידים הקרובים לאדמו״ר, בתוך אותו בית. הבית הניצב בין אוליצה לובלסקה ובין האזור הנקרא אז ״החול״ (כי אז ובטרם בנו עליו, הוא היה רובו חול, מדברי. היום זה נקרא אוליצה פיאסקובה, ״רחוב החול״), ועל שתי קומות, כלל מתחמים רבים, שחלקם שימשו לצרכים הקהילתיים, בית מדרש בעיקר, חלקם (אלה בקומת קרקע הפונים אל הרחוב הראשי) למסחר (כפי שניתן לראות על התמונות ), וחלקם לדירותיהם של חלק מהחסידים, וביניהם משפחת טאובר, ויש תמונות עתיקות עליהם רואים גם עיזים כך שניתן לשער שהיו שם גם דיר, לול ועוד. מאחורי הבית ששרד, שרדה גם החצר, ולא קשה לדמיין כיצד התהלכו שם בעלי חיים, כיצד היו להם מחסה בפינות החצר
יחזקאל טאובר ובנו שמיל מנשה |
Rachel n’aimait pas l’idée de se marier dans la famille et surtout, elle n’était pas d’accord qu’ils la marient à Haïm, son cousin, comme c’était programmé. Elle demanda à aller à la grande ville. Ses parents, qui s’efforçaient de trouver un accord, obtinrent pour elle un travail et un logement chez des clients, la famille Heinsdorf, qui avaient un magasin d’articles coloniaux, dans la rue Carmelitsa, au cœur du quartier juif (qui deviendrait un jour le ghetto) de Varsovie. C’est là qu’elle rencontra Chlomo Fliederbaum, qui était le neveu par alliance de Jacob Heinsdorf et qui travaillait alors au magasin, elle partir avec lui s'installer en Eretz Israël, et c’est là qu’elle se maria avec lui, dans la ville de Tel-Aviv, l’année 1926.
רחל טאובר ושלמה פלידרבאום בתל אביב בעת נישואיהם ב 1925 |
אחותה למחצה, לאניה, מספרת כיצד ליוו את רחל כל החסידים וכל בני המשפחה בשירים, בתופים ובמחולות, עד לתחנת הרכבת : היא היתה יוצאת לפלסטין ! עולה לארץ ישראל ! כדברי האדמו״ר חיים ישראל !לימים, בהיותה בהריון, ובגלל המצב הכלכלי הקשה בארץ, היא ביקשה לעבור לפריס, שם נולדו מאטל ב 1927 ואיטהל'ה (אירן) ב 1931, ושם הצטרפו אליה זו אחר זו אחותה אווה (ובעלה, ברנרד בורנשטיין, אף הוא מפולאווי), אחותיה למחצה סלווה ולאניה, ומאוחר יותר אחיה למחצה אהרון, שלימים נקרא ארנולד.
מימין לשמאל, רחל, לאניה, סלאווה ואווה טאובר |
כפי שסיפרה לאניה (ילידת 1910) לקראת סוף חייה בצרפת, סבה, ר׳ משה מאייער טיטלבאום, על אף שהיה שותף ליאנקעל׳ה טאובר בסחר ובהשגחה אזורית על מכירת הקמח וטחינתו, לא היה עוזב את בית המדרש. בניגוד ליאנקעל׳ה שהיה מבלה לא מעט זמן בחנות של המשפחה, אולי באחד המתחמים של אותו בניין. בזכרונה של לאניה, משה מאייער לא יצא מבית המדרש אפילו כדי לקבור את אשתו, דבורה לבית קירשנבלאט, בתשרי של שנת 1916, הוא לא פסק ללמוד. היא תארה כיצד ביום פטירתה, עבר משא הלוויה דרך בית המדרש, אז הוא הספיד אותה ארוכות, אך לא יצא יחד עם החסידים שנשאו את הגופה, אלא נתן להם לקבור אותה בו בזמן שהוא דבק בלימודו, כהוראת האדמו״ר, (. זכרון זה נוגד את ההלכה וסביר להניח שלאניה שהיתה אז בת 6 לא יכלה לזכור בכזו וודאות). הנקודה המרכזית הינה ההקפדה המאסיבית של הסב בלימודו בעיני נכדתו.תקופה זו היתה ימיה האחרונים של חסידות פילוב. האדמו״ר הראשון, רבי חיים ישראל כבר נפטר בגיל 65, בשנת 1906. הוא הותיר אחריו ספר בשם ״שלום ירושלים״ שטרם פורסם, עוד ספר שלא זכה לפרסום, ועוד חיבור שצורף לספר אותו כתב אחד מבניו. בניו המשיכו את דרכו אך עד לשנים של מלחמת העולם הראשונה בלבד.בהיותו עדיין בחיים, ועל אף שעוד לא הועלה על דפוס, היה ספר ״שלום ירושלים״ מרכזי מאד לאדמו״ר ולחסידיו. קונטרס ״שלום ירושלים״ (כפי שהוא מוזכר במספר מקומות) היה ספר מיוחד מאד, בהיותו בין הספרים הציוניים החסידים הראשונים, אם לא הראשון. (הגר"א - הגאון מווילנה - וגם האדר"ת - חמיו של הרב ראי"ה קוק, שכיהן כראשון לציון, גם כתבו כל אחד ספר על חשיבות קיום מצוות תלויות בארץ. הם אבל שייכים לזרם הליטאי, ולא לזרם החסידי, והם פחות הובילו למעשה מכפי שניסה האדמו"ר מפילוב) .האדמו״ר השקיע המון מרץ במגמתו הציונית פורצת הדרך. הוא הקים את ״אגודת האלף״ כביטוי לרעיונו המרכזי על פיו יוכל לבוא המשיח אם יעלו עשרים ריבוא יהודים לארץ ישראל, וכאשר האדמו״ר דואג לאלף חסידים שיתרמו כל אחד אלף רובל. רבי חיים שלח את הקונטרס למספר אדמו״רים ברחבי פולין והעולם היהודי וזכה לתגובות חיוביות, למשל מהאדמו״ר מגור, בעל ה״שפת אמת״, לתגובות חיוביות פחות, וגם לתגובות מתנגדות מאד, וזאת בעיקר מצד האדמו״ר מרודוזין. בעזרת בנו, רבי יצחק זעליג, לעתיד האדמו״ר מסוקולוב, הוא גייס כספים, ושלח אותם לרוזן מרוטשילד...שסרב להצעה ולבקשה להירתם לאגודה והחזיר את הכסף לשולחיו.במקביל, נפטרה בתו ערב יום החתונה שלה, וגם חלתה אשתו במחלה סופנית. שלושת הגורמים האלה, התווספו לביקורת הקשה שהתעוררה כלפי המגמה הציונית יוצאת הדופן שלו, והביאו את האדמו״ר למבוכה קשה ביחס לגורל הפרויקט. נראה שבניגוד לדעת הרוב, וביניהם בניו, שראו באסונות שפקדו אותו סימנים משמיים שהפרויקט נוגד את דעת המקום, נטה האדמו״ר לפרש אחרת את המצב, שלהבנתו לא התרחש בגלל אופי הפרויקט - אופי מהפכני ככל שיהיה - אלא בגלל שאדם שמתחיל במצווה ואינו משלים אותה מתחייב בנפשו. בין כך ובין כך הביא המצב את האדמו״ר לוויתור על מאמציו ועל דרכו, ואולי הביא למותו. רבי חיים ישראל נקבר בעיר פולאווי, ואין היום זכר למקום קבורתו מאחר ובית הקברות חולל ובוטל אפילו פעמיים. פעם ראשונה על ידי הכובש הגרמני הנאצי, פעם שנייה על ידי השלטון הקומוניסטי הסטליניסטי.
על פי הפסטור ירוסלב בטור, גבעה זו מסמנת את המקום בו נקבר האדמו"ר |
בניו, רבי משה מרדכי, רבי יוסף, ורבי יצחק זעליג, ואחיו רבי צבי הירש מקילובה, בעל ה״עטרת צבי״, המשיכו את דרכו ואת חסידות קוצק. הראשון הוסמך כאדמו״ר פילוב אחרי מות אביו והמשיך את דרכו אך במיתון ניכר. הבנים התנגדו הרי לכך שגאולה תוכל לבוא מעלייתם של יהודים לא שומרי מצוות, בניגוד לדעת אביהם שהיה פתוח הרבה יותר בנושא זה, ורבי משה מרדכי הוא למעשה זה ש״סגר״ את החסידות, בעזיבתו את פולאווי לטובת וורשה, בגלל שריפה גדולה בפולאווי, ובגלל מלחמת העולם הראשונה. רבי משה מרדכי נפטר בוורשה, כאדמו״ר פילוב, אך לא הותיר אחריו שום ממשיך דרכו...אולי בגלל מאורעות מלחמת העולם השנייה והשואה. הוא השאיר אחריו ספר בשם ״מדרש משה״, שהוא פירוש על התורה, אוסף דרשות.
שמואל חיים לנדאו (1892-1928)שהיה מראשי תנועת הפועל המזרחי בארץ ישראל,ומוכר לקהל הרחב תחת ראשי תיבות שמו (שח״ל), היה מתלמידיו וממשיכי דרכו המובהקים של האדמו״ר הראשון, ולא מן הנמנע שאיש זה מסמל את אשר ארע לדעותיו הכה ציוניות : אלה שדבקו בו הצטרפו לתנועות הציוניות, ואלה שהתנגדו לדעותיו לא רצו להישאר מזוהים עימו ואף עזבו את התנועה החסידית.כאמור, דעותיו לא היו כה ציוניות בלבד, אלא שהן היו בהשראת ה״קוצקר רבה״ גם ״כה קיצוניות״. אדמו״ר קוצק הרי לא הצליח להיות גם יחד ״אינוועלט״ ו״אוסוועלט״, כלומר לא הצליח גם להעמיק בחיפוש אחר האמת, בהתבודדות ובניתוק, וגם לתפקד כמנהיג מעורב בחיי היום יום, מחובר לחסידיו ופנוי לענות לשאלותיהם, ואולי כך גם היה בנו. אבל השערה זו לא מתיישבת יפה עם הכריזמה שהיתה לרבי חיים ישראל בצעירותו, אליו הצטרפו רוב חסידי קוצק עת ייסד את חסידות פילוב כפי שצויין לעיל.בנו השני, רבי יצחק זעליג מורגנשטרן עבר לעיר סוקולוב ונמנה שם לאדמו״ר חסידות סוקולוב. הוא נפטר ב 1929 ובנו (אחד מ 11 ילדיו) שהמשיך את דרכו נספה באושוויץ. מספר בנות מתוך שמונה בנותיו הגיעו ארצה.אחיו רבי צבי הירש פירסם אף הוא ספר בשם ״עטרת צבי״ ובתוכו חלקים שנכתבו על ידי האדמו״ר הראשון, רבי חיים ישראל. הוא גם הוציא לאור ספר בשם ״שארית ישראל״ ובתוכו תוספות ל״שלום ירושלים״ מכתבים אחדים , וכמה דרשות.
נראה שה״מדרש משה״ וה״עטרת צבי״ הוצאו לאור בוורשה בשנות השלושים. בעשרים השנים האחרונות הם שוב הוצאו לאור על ידי צאצאי חסידות קוצק שהתגלגלו לישראל.משפחת טאובר מצדה, הפנימה כנראה את ההערצה לציונות בחלקה, ולרעיונות ההשכלה והסוציאליזם בחלקה האחר. אם יחזקאל ושלמה, הבן הראשון והבן האחרון של ישראל אברהם, בחרו להישאר בפולין, ונספו בשואה יחד עם אביהם, כל האחים האחרים יצאו מפולין.על תמונה זו, שצולמה בפולאווי בסוף שנות ה 20 של המאה העשרים, רואים את פעילי תנועת החלוץ, וביניהם, לאניה טאובר, סלבה טאובר, יהושע מלרד בעלה להמשך, ועוד מספר יהודי פולאווי שסביר להניח, חלקם נולדו למשפחות חסידיות וחלקם ליהודים שלא השתייכו לחצר החסידית.
רחל כאמור עלתה ארצה, וזה כנראה היה יותר בהשפעת מלצ׳ה - אחותו של שלמה - ובעלה יחיאל בוזין שהיה להם בעיקר אידיאל סוציאליסטי. גם יאיר, אחיה למחצה, עלה ארצה, ועם הגעתו לארץ הצטרף לקיבוץ קרית ענבים, אבל לא בטוח כמה עלייתו היתה בחירה ציונית או בריחה מתופת מלחמת העולם השנייה, וכמו כן לא ברור כמה הצטרפותו לקיבוץ היתה פרי החלטה אידיאולוגית שלו או של הסוכנות היהודית ומשרד הקליטה שהעבירו אותו לשם אחרי שהייתו במחנה עתלית עם הגעתו לארץ.
פרויקט זה נתקל בהתנגדותם של ישראל אברהם ואשתו חנה אשר טענו שהחיים בצרפת בעיקר מזמנים התבוללות. על אף הקשר החם לבניהם ולבנותיהם, וגם אולי מפאת גילם, הם בחרו להישאר בפולאווי, שלמה ואשתו ובנם היחיד נשארו עימם. רק יאיר השתכנע ועזב/נמלט כאמור את פולין אפילו אחרי פרוץ המלחמה. אולי ניתן להרגיש את הויכוח האידיאולוגי בקרב המשפחה על התמונה שצולמה עת ביקור רחל בפולאווי. ישראל אברהם ואשתו חנה לבושים בלבוש החסידי המסורתי, בו בזמן שהאחרים הם בעלי חזות מערבית, לא מסורתית.
סוף יהדות פולאווי ארע ב 26 לדצמבר 1939. הגרמנים הכריזו על מלחמה ופלשו לפולין ב 1 לספטמבר 1939. ב3 של אותו חודש הם כבר נכנסו לפולאווי, והסיבה לכך הינה כנראה אסטראטגית, מפני שפולאווי נמצאת בין רוסיה לבין וורשה והגרמנים רצו לשמור על גבולה המזרחי של פולין.
ב 6 לחודש אוקטובר, הופגזו בתי הכנסת, ונוסד גטו פולאווי, שהיה הגטו השני (אחרי גטו לודז׳) שהוקם בפולין.
בני משפחת טאובר, יחד עם עוד מספר משפחות ברחו לכפר ברנוב, לא ארחק מפולאווי והתגוררו שם באופן זמני. יאיר סיפר (עת בואו לביקור בפריס בשנת 1954, עם בנו ישראל ואחרי מות אשתו. וזה היה מפגשם הראשון של האחים אחרי 20 שנה) כיצד הם ברחו דרך היער, ואביו על כתפיו, כשהוא מרגיש את דמעותיו על צווריו. הסב יאנקעל׳ה כבר לא היה יותר בחיים, נורה למוות בתוך החנות המשפחתית על ידי חייל גרמני.בסוף חודש דצמבר, הגרמנים סגרו את הגטו של פולאווי, בדרכם הרגילה האכזרית והאלימה מאד. הרבה יהודים מתו בארוע זה. אלה ששרדו הועברו - ברגל, וזוכרים אנשים אחדים שהטמפרטורה עברה ביום זה את ה 30 מעלות מתחת לאפס - לגטו גדול יותר ובהמשך נשלחו למחנה סוביבור, ממנו לא חזר אף יהודי אחד לעיר פולאווי...עד היום הזה.ביולי 1943, שלחה לאניה גלויה להוריה לכתובתם בכפר ברנוב, וזא חזרה אליה עם כיתוב : ״אינם בחיים יותר״, ובדרך הזאת, נודע לבני המשפחה הנמצאים בצרפת, את גורלם של אלה שנשארו בפולין. הטקסט של הגלויה מאד טראגי : הורים יקרים, אני לא יודעת אם תקבלו את הגלויה, יש עוד קצת תקווה שאתם בחיים אז אני כותבת. אולי נקבל איזו הודעה מכם ואחרת נשתגע. קיבלנו מידע שמהמשפחה של ברנר לא נשאר אף אחד. האם זה אפשרי ? אנחנו מוטרדות לגבי הגורל שלכם. איפה כל המשפחה ? יחזקאל, שלמה וכל השאר אנחנו פה בסדר, בחיים, הילדיםהולכים לבית הסםר. אני קצת עובדת, גרים באותו בית בדירות נפרדות. הבנות שלכם.
רב העיר, הרב מנדל נוי, נשאר במקום כקברניט הספינה. הוא נלקח אף הוא לגטו האחר, וגם הוא לא חזר.ביתו הפך לבית חרושת לפראפין, כלומר למחנה עבודה לחלק אחד, ולאורוות הסוסים הגרמנים לחלקו השני. הבית הזה לא נהרס והוא קיים עד עצם היום הזה, כפי שהראה לנו הכומר ירוסלב בטור ביום ביקורנו בעיירה בסוף חודש יולי 2019
הבית השני ששרד את כל האירועים הוא ביתה של חצר החסידים.
הבית של חצר החסידים ברחוב לובלסקה (היום פילסודסקה) כפי שצולם בשנת 1924 והיום. |
נותרו עוד מספר בתים, וביניהם הבית בו נמצאת מסעדה זו, בית שהיה ביתם ומפעל ליצירת בירה של שני אחים יהודים ששמם לא הגיע עד אליי.
גורל משונה היה לחסידות פילוב. נשאר ביתה. נתפזרו צאצאיה בזרמי העולם היהודי, נעלמו אדמו״ריה.ואני הקטן, חשבתי שאם אחפש אמצא ואגלה....את מחשבותיהם, של האדמו״ר מפילוב הראשון, או של האדמו״ר השני, או של יוצאי פולאווי, על מה שקרה להם.אבל מאימתי כותב אדמו״ר על מה שקרה לו ? אדמו״רים אלה כתבו דווקא ספרות ענפה ועשירה, כפי שפורט לעיל, ועוד ישנם קונטרסים, ואגרות ומכתבים ואפילו פנקסים. אבל הם דנים בתורה, ובמועדים, ובסוגיות תלמודיות, ולכל היותר בסוגיות של תפילה, הם דנים בסוגיות שכליות. לא בסוגיות אישיות, לא בסוגיות רגשיות, ולא בסוגיות נפשיות. אופי המחשבה הוא "צניעות", ו"ביטול היש" על פי הדרך החסידית, בקושי ימצא החוקר דיון בסוגיות חברתיות, פוליטיות...על אף שאנשים אלה חוו את המזעזע מכל,(בספר "מדרש משה, ניתן למצוא מספר דרשות מהשנים של מלחמת העולם הראשונה, עת עבר האדמו"ר מפולאווי לוורשה,. אין התייחסות ולו המרומזת ביותר למתרחש מסביב המחבר.כתב מחבר ה״אם הבנים שמחה״, רבי יששכר שלמה טייכטל, את מחשבותיו על ארועי השואה, אבל הוא כתב ספר עיוני - אפילו אם משיחי נלהב - ולא ספר של מחשבות, לא יומן של חוויות.וגם יוצאי פולאווי או צאצאי משפחת טאובר לא כתבו. אלה שהיו בפולין עד מלחמת העולם השניה נספו בשואה ומובן מאליו איך לא נשארה מהם אף שורה. אפילו אם הם היו כותבים, ספק אם היה נשאר מזה זכר. אלה ששרדו הוכו באילמות כפי שכל העולם ראה. ממתי החלו ניצולי השואה לספר את אשר חוו ? רק בעשרים-שלושים השנים האחרונות. לאבא שלי, שהיה מאד בריא בנפשו, שהתייתם מאימו בשואה, לקח כארבעים שנה עד שדיבר איתי פעם ראשונה על זה...וגם היום, חוקרים, פילוסופים, היסטוריונים מתעסקים עם עובדות, עם זרמי מחשבה, ולא עם רגשות. הם כנראה משאירים את זה לספת הפסיכואנליטיקאי.אין לי ספק שלא הסתגר ה״שרף מקוצק״ מסיבות של אינדיווידואליזם וחיפוש האמת בלבד. גם אם נימק את מעשיו באמירות כגון "איך בין נישט איין אנטיגער" - אני לא איש בן זמנו - קשה לי להעלות על הדעת שהאדמו״ר השני מפילוב שעזב את פילוב לטובת וורשה, ונטש את חצרו כאשר העיר בוערת, עשה זאת מסיבות אידיאולוגיות בלבד,. ואני אף מעז לא לראות שיש להתייחס לכתיבת "שלום ירושלים" כאל כתיבה שכלית בלבד...אבל אין לזה הוכחות כלשהן..
חקר הנפש וחקר המוח של מאה העשרים וראשית המאה העשרים ואחת לימדו אותנו שיש לאירועי החיים השפעה על התנהגויות האדם אם לא על מבנה נפשו. אדם שחווה אירוע טראומטי עלול לצאת מפסי השפיות ולעבור לשגרה צבועה כל כולה על ידי הטראומה. זהו אדם שלא חי ולא ישן באופן רגיל אלא שהוא חי חיי סיוט גם בערנות וגם בשינה. אבל גם האדם שמחלים מאירועים טראומטיים ונראה מתפקד הושפע אף הוא. לא נראה שאפשר לנתק אורח חייו של אדם זה מאירועי חייו. ועל כן, לא רק מעשים של בריחה או של הסתגרות עושה האדם כתוצאה מטראומה. אדם גם עשוי להתגבר על הטראומה ולהתמודד עם טראומות החיים בצורה קוגניטיבית, למשל בהשקעה רבה בנושא מסויים, למשל בכתיבת ספר עיוני. ואם ספר זה נכתב בנושא מיוחד, יוצא דופן למשל, או אם הוא נכתב בצורה מיוחדת, קיצונית למשל, אז יש לראות בבחירהת נושא זו או בסגנון כתיבה זה את הופעתו המוסווית של המרכיב הרגשי, נפשי וגם טראומטי
אדם לא עוזב, או מסתגר בתוך החדר מסיבות אידאולוגיות בלבד, ובמיוחד אם הוא עבר קודם לכך כמה אירועים קשים. אפשר להציע שאם יש לו אמונה בהתבודדות, אז אירועי חייו מחזקים אצלו את האמונה הזו. אבל לא מן הנמנע שאידאולוגיה כזו יוצאת, נוצרת דווקא מן המצוקה. כלומר שהאדם מסתגר כתוצאה מטראומות חייו..
דוגמה לכך בעיניי היא הספר "פרקי דרבי אליעזר". אפילו אם בקורת המקרא מתייחסת לספר זה כאל "ספר "מאוחר", כלומר ספר שלא נכתב על ידי רבי אליעזר עצמו אלא מאוחר הרבה יותר, התבוננות במרכיב הרגשי שצובע את כל הספר הזה מקשה על תיאוריה זו. הספר כולל גם את הסיפור האישי של רבי אליעזר, שנזרק מבית אביו, שהיה במאבק עם כל בני המשפחה, ואנחנו יודעים מאין ספור דוגמאות מהתלמוד כיצד היה רבי אליעזר במאבקים עם עמיתיו, עם כל בני דורו, עד כדי חרם שהוצא נגדו, ואין אפשרות לקרוא את הספר ולא להרגיש את המרכיב הרגשי של מחברו. זאת כתיבה של אדם סגור, של אדם שאינו סובל מחלוקת, כתיבה של אדם פגוע.
אפשר להניח שמשה מאייער טיטלבאום ויאנקעל׳ה טאובר כן עזבו את זידלוביץ לטובת פולווי מסיבות אידאולוגיות. בשנות 1870, שנות פריחת החסידות, המון יהודים עברו ממקום למקום, לא רק מסיבות שליליות של אנטישמיות, אלא גם כדי להתלוות למנהיג זה או אחר.יש עדויות רבות לכך שעם בואו לפולאווי של האדמו״ר הראשון, רבי חיים ישראל מורגנשטרן, נהרו לעיירה הרבה יהודים. יש שכותבים שרוב חסידי קוצק הצטרפו אליו.
אך, קשה יותר לטעון שעזבו צאצאי משפחת טאובר את פולאווי מסיבות אידאולוגיות, ציוניות או אחרות בלבד. בוודאי חלקם - אם לא רובם - חיפשו בראש ובראשונה לעזוב את פולין (ויש להניח שהסיבה המרכזית לכך היא בוודאי פרי החיים בקרב עם שמבצע פוגרומים באופן חוזר) עוד הרבה לפני פרוץ מלחמת העולם השנייה. ואלה שכמו רחל סבתי, מצאו את הדרך לחזור לפולין כדי לבקר, או כדי לשכנע את אלה שנותרו במקום לעזוב, פעלו על אף הטראומה, כאשר אלה שלא חזרו לשם, לא רצו בשום אופן לחזור לשם, מונעו על ידי טראומה משתקת יותר או שרק הצליחו להתכחש כדרך לקויה מאד להתמודד עם קריאת המצב.המון השתנה בעולמנו מאז הגיע רבי חיים ישראל מורגנשטרן לעיירה פולאווי. כל כך הרבה השתנה שלנסות לאמוד את שינויים מעורר סחרחורת. לא היה אז לא חשמל ברחוב, ולא בתוך הבתים, לא היו כלי רכב נוסעים, לא היו מקררים, ולא מחשבים, וכמובן לא היו מקלידים טקסטים על טבלטים ולא היה טלפון, לא בתוך הבתים ועוד פחות על כל אדם ואדם. ולא היתה מדינה יהודית ריבונית, ומיטוס היהודי הנודד היה הקובע גם בעיני הגוים וגם בעיני היהודים.על כן, אין לנו להביע תמיה על כך שלא עלה על הדעת של אלה שחיו בעין הסערה לנבא את אשר אוטוטו מתרחש וגם לחשוב את המשמעות הנפשית והפסיכולוגית של אירועים אלה או אחרים על עצמם. פשוטי העם היו עסוקים בהישרדותם, ומנהיגי העם, האינטלקטואלים היו עסוקים במתן קידום חיצוני לאדם, טכנולוגי או פוליטי חברתי. הרבנים דאגו להוביל רוחנית את העם.היום, ובגדול מאז סיגמונד פרויד, מתמודד העם הארופאי כאשר בהישג ידיו כלי ששמו פסיכולוגיה, התבוננות עצמית, חשיבה אחרת, שלמשל נותנת מקום רב לעולם הרגשי, לטראומה ולהשפעתה בין היתר על האדם.האם כלי התמודדות זה, שחדר להרבה מקצועות ותחומי עיסוק חדר באותו קצב למערכת הניתוח של המנהיגים הרוחניים, הרבנים ?נדמה שלא קל לחוקרי מדעי החברה והרוח (היסטוריה, פילוסופיה, סוציולוגיה, גאוגרפיה) וגם לחוקרי הרפואה, לעשות מקום למרכיב הרגשי של התופעות שפוקדות את האדם, או שהאדם אחראי או שותף להתרחשותם, אך נראה שעוד פחות קל לרבנים לעשות מקום למרכיבים אלה.
על כן, כל כך מעט חומר מצאתי כמענה לשאלות של מקומה של הטראומה הנפשית והחברתית בכל מה שארע לחסידות פילוב מחד, ולמשפחה טאובר מאידך.חסידות פילוב וגם חסידות קוצק נכחדו. יהדות פולאווי נעלמה. אלה עובדות. צאצאים למשפחת טאובר יש היום לא מעט, רובם בישראל, אף אחד לא בפולין, מעט בצרפת, אלה עוד עובדות.אפשר אכן לסיים התבוננות בקורותיהן של החסידות מחד גיסא, ושל משפחת טאובר מאידך גיסא בציון עובדות אלה.נראה הרבה יותר מעניין ומעמיק לערב להתבוננות את המרכיבים הרגשיים לכל זה. ניסית לעשות זאת בטקסט זה, מכורח הנסיבות, בעיקר בכוחות הדמיון והניתוח שלי.
מקורות :
יזקר בוך ליהודי פילב. הוצא לאור בשנת 1964 בארה"ב. ביידיש.
חוברת מאת פסטור ירוסלב בטור, הוצאה לאור ב 2011 בפולנית.
על חסידות וחסידים מאת יצחק רפאל, מוסד הרב קוק.
8. En pique nique à Palmes
Palmes est un lieu-dit qui figure sur les cartes détaillées uniquement. Palmes, est indiqué depuis l’entrée de l’adorable petit village de Campoussy comme « chemin de Palmes », « château et chapelle », indiqué par la municipalité alors que le lieu est privé, non ouvert au public.
Le Château et la Chapelle sont peu éloignés l’un de l’autre, au milieu d’un énorme espace planté de résineux et de divers autres arbres pour une part, et parsemé de cistes pour une plus large surface, au point qu’à la période de floraison, en juin, la montagne parait couverte de neige.
Depuis les alentours du château, ou de la chapelle, on voit au loin Campoussy, Sournia un peu plus important, et quelques rochers les uns ordinaires, les autres plus particulier, tel celui qui ressemble à une mâchoire de crocodile, ou cet autre, le Roc Cornut, comme posée en équilibre sur un socle, sur lequel un homme seul pouvait aisément la faire se déplacer jusqu’au jour d’orage où la foudre lui est tombée dessus, l’immobilisant pour toujours, mais on distinguerait difficilement une présence. Paysage désert…aujourd’hui en 2021. Combien cela devait-il être encore plus vide en 1944, quand, en plus la route, la seule route qui relie cette montagne à Prades, n’était qu’un chemin rocailleux.
La chapelle St Just & St Pasteur est du douzième siècle. S'y perpétue – en privé - la tradition de la Pentecôte avec une cérémonie annuelle réservée aux membres de la famille propriétaire des lieux et aux proches. A l’arrière de la chapelle, deux cèdres qui furent plantés il y a quelques 80 ans par la famille (pour les fiançailles de Georges Jaubert et Marie Rotgé me précise-t-on).
A l’intérieur de la chapelle, un autel en pierre, quelques colonnades sous l’alcôve, et quelques statues récentes, la plus remarquable en l’honneur de Jean-Baptiste, se trouve là, don de Jeannot Soler, en reconnaissance d’avoir survécu à un terrible accident de voiture en décembre 1946.
Jeannot Soler (Sous lieutenant FFI) ainsi que ses parents qui avaient le métayage de Palmes, ainsi que Michel Perpinya, qui avait 14 ans et logeait en partie à Palmes, en partie à Mosset, étaient les occupants fixes du château cet hiver de 1944, quand les soldats allemands firent irruption la nuit du 22 février, nuit de la mi-carême, dans la petite maison du 1 rue Nationale - nommée de nos jours général de Gaulle - à Prades, maison dans laquelle vivaient depuis 1940, les familles Fliederbaum (Salomon et Rachel , Borenzteijn (Eva et Bernard et leur fils Jeannot), et Friedman (Lonia et sa fille Odette).
Toutes ces neuf personnes survécurent à cette irruption grâce à la cachette qu’avaient aménagée pépé (Salomon), Bernard Borenzteijn et monsieur Sala), pendant les quelques 18 mois où les deux premiers n'avaient dû ni sortir ni se montrer, suite à l’invasion de la zone libre par les allemands ainsi qu'une chambre prise sur l'espace du grenier. Dans la chambre put se réfugier plusieurs mois un neveu des Sala, François, dont le père se livrait à Cerbère à des opérations illégales aux yeux de la gestapo. La cachette ne servit qu'une nuit…mais rien n'eut pu mieux justifier sa création.
Les allemands cherchèrent les habitants de la maison, menacèrent Jeannot - qui était lui dans son lit - de leurs armes, interrogèrent les Sala - qui habitaient aussi la maison mais n’étaient pas juifs et n’intéressaient donc pas les soldats -, et repartirent bredouilles…non sans avoir mis les scellés. La famille était sauve mais le lieu était grillé.
Quelqu’un dénommé "Monsieur de Prades" dans les souvenirs d'Irène (était-ce Charles Bauby ?) suggéra que la famille parte se cacher à Palmes.
Lonia et Odette (grâce à un autre voisin du nom de Marceau) étaient sous la protection de mademoiselle Quès, institutrice, et se cachèrent chez elle au village de Vinça, sur la route de Perpignan.
Mémé (Rachel) et ses deux filles (Mathilde et Irène) furent abritées une semaine dans la maison des Salvador. Les Salvador étaient proches du groupe depuis l'arrivée à Prades. Lui, employé à la mairie, elle, Juliette, directrice de l'école maternelle et bibliothécaire de la bibliothèque municipale, de laquelle Lonia était une lectrice assidue. Joseph Salvador, dont la fille Renée était en classe avec Mathilde, travaillait à la mairie et il leur procura des fausses cartes d'identité, avec lesquelles elles partirent tenter de retrouver un représentant par qui elle pensait pouvoir se faire aider, ce qui s’avéra une fausse piste.
Salomon (pépé) et Rachel (mémé) Fliederbaum avec Mathilde et Irène. |
Ceux qui ne pouvaient prendre le risque d’être vus au grand jour, pépé (Salomon), et les Borenzteijn auxquels se joignirent Shlomo Borenzteijn et Léni (la fiancée de Jacques Borenzteijn qui se trouvait depuis deux ans en Espagne), partirent pour Palmes.
La chapelle, en principe inutilisée et fermée était un des lieux de réunion des maquisards de Rabouillet-Sournia (aussi nommé« Maquis de Sansa» qui participera à la libération de Perpignan le 18 Août 1944). Le château, qui n’était en fait plus qu’un donjon du moyen-âge auquel étaient adossées quelques espaces dont une bergerie, était habité par les Soler, deux parents leur fils, Jeannot, alors âgé de 18 ans, et Hugo, ami de Jeannot.
Au fil de l’hiver et du printemps, Rachel et ses filles, ainsi que Lonia trouvèrent finalement à s’installer à L’Isle Jourdain, tandis que les habitants de Palmes se tenaient dans la clandestinité, tenus au courant de l’évolution de la guerre en particulier par Jeannot Soler qui allait tous les jours à Campoussy, un peu aux courses, surtout aux nouvelles.
Tout le monde attendait alors le débarquement des alliés qui n’en finissait pas de ne pas se produire, malgré de nombreux signes avant coureurs.
C’est début juin que la partie de famille de L’isle Jourdain reçut un message de ceux de Palmes : « venez nous rejoindre, nous partons en Espagne » !
L’Espagne est relativement proche de Prades et ses environs. 35 kms à vol d’oiseau. Et beaucoup de gens passèrent la frontière par les montagnes, dans le sens Espagne-France au moment de la guerre d’Espagne en 1936, ou comme Pablo Casals fuyant le régime franquiste en 1950, et dans le sens France-Espagne pendant la guerre de 39-45.
C’est ainsi qu’Yvette et ses parents, Yehiel et Malche Buzyn, n’étaient plus à Prades alors qu’ils y avaient aussi atterri après la rafle du vel d'hiv de juillet 1942. Ils étaient passés en Espagne, poursuivant après vers le Maroc où ils vécurent jusqu’à la libération. C’est ainsi que se trouvait en Espagne Jacques Borenzteijn, frère de Bernard et de Shlomo, qui réussissait - enfin, de son point de vue - à les faire se décider à tenter le passage.
Ce n’était pas un passage de tout repos. Les Pyrénées ne sont pas terriblement enneigés l’hiver mais le climat est rude. C’est la montagne. Et puis les allemands surveillaient farouchement la frontière.
Rachel reçut la carte et se mit immédiatement en route. Non pour se joindre au convoi comme l’y invitait Salomon. Pour s’opposer au convoi.
Elle avait la conviction intuitive qu’il ne réussirait pas. Ayant déjà rêvé en janvier 44 que quelqu’un lui disait : « à la mi-carême, ils viendront vous chercher », et la « prophétie » s’étant tristement réalisée, elle était loin de prendre son intuition à la légère. Les discussions au sujet de l'Espagne existaient entre les membres de tout ce groupe depuis 1940, et le groupe était clivé. Jacques était le "chef" du pour, Rachel, le "chef" du contre.
Elle et les filles firent donc tout le trajet (215 kms qui sont le contraire d’une autoroute fréquentée), en autocar, train, autocar et voiture à cheval, pour atteindre finalement Palmes le 5 juin dans l’après-midi.
Il n’y avait que peu de temps, le passeur ayant annoncé que le lendemain matin était le jour propice au passage et qu’ils partiraient aux aurores.
La discussion fut âpre. Seul Salomon se laissa convaincre. Les autres partirent.
Et le sort voulut que ce jour était celui du débarquement. Irène se souvient de Jeannot Soler revenant surexcité de Campoussy, essoufflé et criant « les alliés sont là ! », tandis qu’Irène, âgée alors de 13 ans, les cherchait des yeux alentour et ne parvenait pas à les apercevoir.
La nouvelle s’était répandue comme une trainée de poudre…si bien qu’un gradé du bureau de la gestapo de Prades jugea que le moment était venu pour lui de déserter.
Les allemands entreprirent de le chercher, lancèrent toutes leurs troupes à sa poursuite…et c’est le petit groupe des Borenzteijn qu’ils trouvèrent, et arrêtèrent.
La cerise sur ce tragique gâteau est qu’à leur vue, Eva s’évanouit de frayeur et disparut dans les cistes. Les allemands ne la virent pas. Quand elle revint à elle, il n’y avait plus personne aux alentours. Elle n’osa pas retourner à Palmes et se rendit tant bien que mal à un des proches villages (Sournia ou peut-être Sirach ?) où une femme du village la recueillit…avant de la dénoncer quelques heures plus tard.
Les Borenzteijn furent envoyés à Drancy et sont parmi les 1156 personnes ayant constitué l’avant-dernier convoi pour Auschwitz, numéro 76, qui partit le 30 Juin 44.
Ne revint que Léni…dans les catastrophiques états physique et mental que l’on peut imaginer.
Palmes avait tourné au vinaigre. Et en plus, ce lieu aussi étant grillé, il fallait fuir à nouveau.
Les Soler proposèrent gracieusement leur appartement de Perpignan, où la famille Fliederbaum finit la guerre avant de remonter en septembre sur Paris « reprendre la vie normale » ou plutôt redémarrer à zéro, dans l’ambiance générale de rationnement et de règlements de comptes.
L’histoire de Palmes resta importante dans la mémoire familiale, évoquée de ci de là, et ressurgit deux fois.
La première lors de la visite à Jérusalem de Maurice et Hélène Ruiz, anciens bons voisins de Wissous. Lors du repas familial, et eux ayant aussi quitté Wissous pour aller s’installer sur les lieux d’enfance de Maurice, à Villefranche de Conflent, le sujet de la guerre passée à Prades fut évoqué, ainsi que l’épisode Palmes. Maurice sursauta alors : « comment connaissez-vous Palmes ? Ma sœur est une des propriétaires de l’endroit ! ». La demi-sœur de Maurice, Solange, était mariée à Philippe Bauby.
Irène et Henry rendirent à leur tour visite aux Ruiz, et retournèrent alors à Prades ainsi qu’à Palmes, et rendirent visite à mademoiselle Quès.
Nous y étions passés l’été de mes treize ans…par hasard (c’était l’été qui suivait mai 68 et les projets originels n’avaient pu se réaliser, on opta donc pour Prades) mais les hasards existent-ils ? Jeannot avait perdu la vie juste après ses treize ans…et un Jean, fils de sa cousine germaine et meilleure amie de l’enfance, revenait sur les lieux presque exactement au même âge….
Ils s’y rendirent une nouvelle fois, en 1996, accompagnés cette fois par Ayala et Ichaï, pour participer à la cérémonie de remise posthume de la médaille des justes aux Salvador. Ce jour, ils frappèrent à la porte de la maison de l’avenue du gl de Gaulle, purent entrer…et constater que la cachette était toujours intacte ! 52 ans plus tard !
Prades aussi était restée centrale dans la mémoire familiale. Tant de membres de la famille y étaient passés. C’est là-bas que Yankeleh, premier mari de Lonia, et donc père d’Odette, mourut du typhus suivi de complications cardiaques et fut enterré à Perpignan.
Jacques, Lonia et Odette |
La population parle le français avec le pittoresque et fort accent du sud, qui laisse entendre le catalan sous jacent. C’est ici la Catalogne. Les panneaux indicateurs sont écrits tant en français qu’en catalan…et peut-être le judaïsme y a aussi un passé : sont restés célèbres dans la tradition de relativement nombreux rabbins d’époques diverses, depuis rabbénouYonah, tossafiste connu, qui s’opposa au rambam depuis Perpignan, jusqu’au Méïri dont les commentaires du talmud sont étudiés jusqu’à aujourd’hui dans de nombreuses yeshivot desquelles les élèves ignorent tout de l’histoire et de la géographie locale. Certaine tradition soutient que beaucoup de portugais d’aujourd’hui ont du sang juif sans le savoir, le même principe s’applique à la Catalogne, et donc probablement aussi à la population de Prades.
Serait-ce une des sources d’une certaine tradition résistante ? Eva aurait donc été livrée aux allemands par une dame peut-être de Sournia ( ou Sirach), mais toute la famille a pu vivre à Prades - où la population les savait juifs, et surtout la famille a pu être protégée et cachée, à Palmes pour pépé et les Borenzteijn, à Vinça pour Lonia et Odette, même après l’arrivée des nazis, par les familles Salvador, Bauby, Sala, Marceau, Quès et Soler.
Pour rattacher cette histoire très privée de notre famille à l’histoire de la résistance locale, Paul Bauby, père de Laurent, avec lesquels nous pique-niquons ce 1 août 2021, est né à Prades le 15 avril 1944….3 jours après l’arrestation le 12 avril 1944, puis la déportation vers Neuengamme de son grand-père, le commandant Michel Doutres, qui a une rue à son nom à Perpignan, pour avoir dirigé sur cette région le réseau du Vernet avec des actions de résistance face à l’envahisseur nazi.
La deuxième résurgence de Prades se produisit quelques 20 ans plus tard, alors que j’écrivais quelques lignes de cette longue histoire dans le blog, et qu’en 2021, je reçus une lettre : « bonjour, j’ai lu que vous mentionnez Palmes dans votre blog. J’en suis aujourd’hui le propriétaire, je suis en cours de rédaction d’un livre sur l’historique de la propriété et je souhaite communiquer avec vous ».
C’est ainsi que j’entrai en communication avec Laurent Bauby, qui disait tout ignorer de notre histoire, qui disait savoir assez peu sur le maquis et ses actions pendant la seconde guerre mondiale, mais qui était très intéressé à entrer en contact.
Je restai assez évasif dans un premier temps : cette épidémie de covid laissait entrevoir tellement peu de possibilités de voyage..
Et puis, la population d’Israël à quelques irréductibles près se vit vaccinée, et une opportunité se profila. Nous programmâmes un tour par Prades combiné avec un voyage familial dans les Alpes (les Alpes et les Pyrénées devraient plutôt être les occasions de deux voyages distincts…650 kms séparant Prades de la Savoie, mais les routes et les véhicules sont aujourd’hui très maniables et la motivation emporta le morceau). Je communiquai nos intentions à Laurent Bauby qui déclina dans un premier temps (il ne serait pas dans la région à notre date de visite, peut-être son père voudra-t-il nous rencontrer..) puis me fit soudain savoir qu’il serait finalement là. Peut-être de ce côté aussi la motivation l’avait emporté.
Rendez-vous fut pris pour le dimanche 1er août…avec initiale proposition de Laurent que nous nous rencontrions près de Palmes puis que nous allions nous asseoir dans un restaurant. Je répondis prudemment qu’il nous faudrait un restaurant végétarien et qu’il valait mieux programmer un pique-nique.
Laurent annonça qu’il préparait « un pique-nique végétarien » et on aurait pu déjà entrevoir l’ardeur qui était dissimulée derrière cette platonique annonce.
Ce dimanche 1er août, où nous arrivions d’un shabbat passé à Carcassonne en compagnie des Renés, on rencontra donc sur la place de Sournia, à 10h30 du matin, Laurent Bauby, accompagné de son père Paul et d’un fort sympathique chien.
Après un bref déplacement en deux voitures jusqu’à l’entrée de Campoussy, là où le panneau municipal indique « chemin de Palmes, château et chapelle », nous laissâmes notre citadin véhicule pour nous joindre à nos hôtes dans le 4X4 defender. On entra rapidement dans un chemin pour lequel il fallait ouvrir une barrière cadenassée et nous commencions à peine à comprendre.
On arriva rapidement à la chapelle, cadenassée elle aussi, mais que l’on ouvrit. Elle ne sert donc qu’une fois l’an, et elle est pratiquement vide hormis quelques bancs et chaises servant à l’annuelle retrouvaille et l’autel, autour duquel on distingue dans la pénombre quelques statues, dont celle offerte par Jeannot Soler.
À l’arrière de la chapelle, les deux grands cèdres, plantés à l’occasion de fiançailles de la famille,
Nous refermons la chapelle, remontons dans la voiture et reprenons notre itinéraire 4X4 entre les arbres, sur un terrain accidenté mais que le père comme le fils semblent connaître comme leur poche, et nous arrivons au château…dont une partie est en ruine. C’est là que nous pique-niquons, d’un pantagruélique repas…cachère, entièrement préparé par Laurent et acheté au magasin cachère de Perpignan. C’est arrosé de vin (cachère également, et il sait que c’est moi qui doit l’ouvrir et le servir), il y a salades en tous genres, et Laurent est prêt à celle des deux éventualités que nous choisirons, fromage ou viande (on passe alors du vin rosé au vin rouge), le tout servi dans de la vaisselle jetable. Il y a dessert (gâteau glacé !), café…et pousse-café…un armagnac…de 1944 ! Ceci n’a déjà plus de pique-nique que le fait d’être consommé en situation champêtre et en très chaleureuse ambiance.
Nous aidons Laurent à replier, à recharger les six à huit glacières dans le 4X4 et reprenons la visite. On passera ainsi par le rocher crocodile (vu sous un certain angle, on pourrait croire voir une mâchoire de saurien), par le roc Cornut, pour enfin aboutir au sommet, au col de Roc Jalère d’où on voit Prades en bas et le Canigou en face.
Toute une excursion tant géographique (on scrute les alentours, on apprend à localiser les villages, à se situer), qu’historique ( ce que faisaient les maquis respectifs, celui qui était plus communiste et visait à attirer le maximum d’allemands vers l’ouest - la France - de manière à aider les forces soviétiques, et celui qui était plus d’intérêt anglo-américain et cherchait à informer les alliés tout en provoquant au minimum la colère de l’envahisseur pour mieux participer en temps voulu à la libération), toute une formidable leçon…qui se termine en fin d’après-midi, par l'impression d'un lien qui s'est créé quatre-vingts ans après n'avoir été que virtuel, et une séparation que l’on souhaite provisoire.
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Michel zal, et le Canigou |
בתחילת 2021, קיבלתי יום אחד מכתב ובו היה כתוב : ״ שלום, הגעתי אליך בעקבות קריאת הבלוג שלך, אחרי שהתחלתי חיפושים אחרי השם Palmes ואתה הרי מזכיר את השם הזה. אני הבעלים של המקום (palmes), ואני מחפש לכתוב ספר על המקום הזה שהוא בעל חשיבות היסטורית, גם על תפקידו במלחמת העולם השנייה, אבל גם בהיותו בן קרוב לאלף שנה״.
פלמ הינו המקום בו הסתתרו ז׳אנו והוריו, וגם סבא שלי, אחרי שהגרמנים דפקו בדלת ביתם שבפרד כדי לעצור אותם והם הצליחו אז להסתתר (במחבוא שבנה פפה). מ״פלם״, בתאריך 6 ליוני 1944 , יום הפלישה לצרפת על ידי הבריטים והאמריקאים, היום בו התהפכו ענייני המלחמה ובו החלו הגרמנים לסגת מצרפת, בתאריך זה, למר גורלם, יצאו ז׳אנו והוריו, וגם מי שתהיה בהמשך אימו של הז׳אן בורנשטיין הפריזאי, וגם עוד דוד של ז׳אנו, יצאו בנסיון לעבור לספרד…והם נתפסו על ידי הנאצים, נשלחו לאושוויץ וחזרה משם רק לני, אימו של ז׳אן.
היום, כחמשה חודשים אחרי שקיבלתי את המכתב, אני במטוס עם מריאן לכיוון ג׳נבה, ומתוכננת לנו פגישה עם האיש הזה ביום 1.8, בכפר Sournia, שנמצא ליד Palmes ואני מתאר לעצמי שהוא ייקח אותנו לבית ממנו הם יצאו אל מותם.
אימא שלי ״מלווה״ אותנו במחשבה, ובהתרגשות רבה. היא עצמה היתה בפלם באותו בוקר של שנת 1944…כי מֶמֶה, אימא שלה הגיעה ערב קודם, איתה, ועם מטילד, במטרה למנוע את ניסיון המעבר לספרד. היא הצליחה לשכנע את פֶפֶה, שהיה גם על סף יציאה, היא לא הצליחה לשכנע את אחותה, אווה, אימו של ז׳אנו המנוח.
שני פרטים מיוחדים : ז׳אנו נהיה בדיוק בן 13 שבוע ימים אחרי המעצר שלהם. אני חזרתי רק פעם אחת לפרד, וזה היה בקיץ 1968, כלומר כחודש אחרי שנהייתי בר מצווה בעצמי. כלומר, הגעתי לפרד בדיוק בגיל שז׳אנו יצא מפרד אל מותו. כאילו להראות שההיסטוריה בכל זאת ממשיכה ? אירן והנרי לא תכננו חופש בפרד לאותו קיץ. זה יצא ״במקרה״, בגלל שאותה שנה התרחשה בצרפת מהפכת הסטודנטים, כתוצאה ממנה, מצב האספקה והתיירות קולקלו לכל הקיץ ומה שהם תכננו לא התאפשר, ואז הם החליטו לנפוש בפרד. בקיץ זה, טיילנו בפרד, לא הגענו לפלם.
הפרט השני הוא מהפרטים שהחלה אירן לספר לאחרונה, לדבריה אחרי שהיא לא סיפרה אותם לאיש אף פעם. היא סיפרה שלמעשה אימו של ז׳אנו לא נעצרה איתם באותו בוקר…בזכות עילפון. כנראה שעם הגעתם המפתיעה והמחרידה של הגרמנים, עם הנשקים, הכלבים, אווה התעלפה ונפלה בין השיחים, (עם הגעתנו למקום ביום 1.8.21 לפיקניק, גילינו איך ההר כולו מכוסה לוטם. שיחים אלה פורחים בחודש יוני כל שנה ונותנים להר מראה מושלג. אווה נפלה בין השיחים בשיא פריחתם ולא נראתה) כך שהם עצרו את כל השאר (האיש המעביר, וארבעת הנותרים). כשהתעוררה אווה, לא היה סביבה אף אחד. אז היא החלה ללכת והיא הגיעה עד לכפר סורניה (או שזה לכפר סירק אף הוא בקרבת מקום), שם היא דפקה בדלת של אישה שקודם אירחה אותה, ובהמשך מסרה אותה לגרמנים, כך שהם בסוף עצרו גם אותה וצרפו אותה למשפחתה. מסתבר שללא כניעתה של האישה מסורניה-סירק (כניעה למה ? למי ? לפחד ? לשנאת היהודים ? מי יוכל לדעת ?) , אווה אולי לא הייתה נשלחת לאושוויץ.
אנחנו מגיעים לפלם ביום זה, 1.8.21, בהתרגשות רבה.
המפגש עם לורן בובי , ואביו, חם מאד. ביחד, אוטו אחרי אוטו אנחנו נוסעים מסורניה לקמפוסי, שם אנחנו משאירים את הרכב שלנו לצד הכביש ואנחנו מצטרפים ל 4X4 של לורן.
אם נראה בהתחלה שרכב מסוג זה לא ממש מתחייב, אנחנו נגלה בהמשך כיצד הוא ממש חובה.
לורן לא ממש מכיר את סיפור משפחתנו, ביחס לפלם. כלומר, הוא יודע את מה שהוא קרא בבלוג שלי, וזה כנראה מאד ריגש אותו. מה שהוא יודע על פלם, מה שמחבר אותו לפלם, הוא משהו קצת אחר.
עבורם, מדובר באתר שנמצא בקרבת גבול ספרד צרפת של ימינו, על גבול ממלכת אֲרַגון וממלכת צרפת דאז, על גבול ארופה ואפריקה מבחינה טקטונית, אתר שההיסטוריה שלו היא הסטורייה המשתרעת על פני אלף שנה, כך שהמקרה שמחבר אותנו אל המקום היה יכול להיות בטל בשישים.
וכנראה שלא כך הוא. האב והבן ממש מרוגשים, עושים לנו קבלת פנים מושקעת, כאילו האירוע ממש בעל חשיבות עליונה לעיניהם.
באתר שלורן בובי הוא היום הבעלים היחיד שלו, שני בניינים, אחד הוא החווה, כמעט כולה חורבה, ובה התגוררו בני משפחתנו בין אפריל ליוני 44. אבל היו כנראה עוד אחרים, ובעיקר נראה שהכנסיה הקטנה היה מקום מפגש של אנשי מחתרת (maquis), ובו היו כמה מתנגדים וכמה פליטים.
כזכור, כל אלה שנתפשו ב 6.6.44 התגוררו במקום כשלושה חודשים, אירן, מטילד ומֶמֶה, לילה אחד בלבד.
הבניין השני הינו כנסיה קטנטנה, בה בני המשפחה רגילים לערוך כל שנה בחג ה pentecôte(המקביל הנוצרי לחג השבועות) סוג של ספק מפגש ספק טקס דתי. וכשאני שואל ״למה דווקא ביום זה ?״ התשובה הינה שעבור הנוצרים, חג זה הוא החג של קבלת עול מלכות שמיים האוניברסלי (דבר שמזכיר עוד יותר את חג השבועות).
הדבר המרשים ביותר - אותי - הוא המבנה הגאוגרפי. יש משהו יותר מגרנדיוזי בנוף, ובמיוחד כשעולים עד לנקודה העליונה מעל פלם, נקודה ממנה רואים 360 מעלות, עד ים התיכון בצד מזרח, עד ההר הגבוה באזור (הר הקניגו) בדרום, וכל היתר, מתקבלת תחושה של מדבר. מדבר ירוק אמנם, ומדבר מלא בשיחי הלוטם, עצי הארזים, ועוד המון חורש טבעי משלל סוגי הצמחים, אבל מדבר ריק מאדם. מצד אחד, לכיוון דרום, העיר פרד, ובדרך אליה הכפר סירק. מצד שני, לכיוון צפון, הכפרים סורניה, קמפוסי ועוד בית פה בית שם, אבל לא רואים כל תנועת אדם. למעשה, אדם שברח מפרד ומגיע לפלם צריך להרגיש מאד בטוח. המארחים שלנו גם דואגים להזכיר מספר פעמים שכל כביש שנראה לנו היום מאד טוב לא היה אפילו סלול לפני שבעים וחמש שנים.
לחשוב שהגרמנים הגיעו עד לחור הזה כדי לעצור עוד קומץ יהודים, ללא כל סימני תקפנות או אפילו כוח מצדם, מוציא אותי מבינתי. זה כל כך לא הגיונ, כל כך קיצוני, אכזרי.
וכך הולך היום, בנסיעה 4X4 ועצירות תוך שהם מספרים לנו בלי סדר על המקום ועל הקשר שלהם, קשר למקום, קשר להתנגדות של תקופת המלחמה, כשהסוף של הסיור הוא כניסה לחורבה, ואז פורש לורן פיקניק מדהים, כולו קנוי בחנות הכשרה בפרפיניאן, פיק ניק יותר מושקע מארוחת חג, עם יינות - לפי בחירתנו לבן או רוזה או אדום אבל הוא יודע שעליי לפתוח את הבקבוקים !, ועם מנה אחרונה (עוגת גלידה !) ועוד בקבוקוני אלקוהול לסיום הארוחה.
אנחנו מבלים ומסיימים את כל היום הזה בהתרגשות רבה ובתקוה שלא יסתיים בזה הקשר החדש והמרגש הזה.
Au 38 rue Ramey, Paris 18ème, que nous découvrons ensemble Marianne, Lyliane et moi, se rencontrent pour la première fois deux Jean qui n’avaient jusqu’ici que correspondu, un - Jean Borenstein - officiellement nommé ainsi « en souvenir de », et l’autre - Jean Pisanté officiellement nommé « non en souvenir » - dirait-on en déni de souvenir ? - .
La rencontre n’est pas fortuite, elle fait donc suite à de nombreux échanges épistolaires. Et le lieu non plus n’est pas fortuit. Tout ceci a été enclenché par ce e mail reçu par moi il y a six mois et qui s’ouvrait ainsi : « Bonjour Jean (si vous me le permettez),
C'est avec un grand intérêt que j'ai consulté vos posts, notamment celui concernant votre séjour à Palmes qui mentionne la famille BORENSTEIN et qui m'a beaucoup ému.
En effet, je travaille depuis 2 ans sur l'histoire de l'immeuble où je vis, 38 rue Ramey à Montmartre… »
Ecrivait ce message celui chez qui se passe la rencontre, Guillaume, habitant aujourd’hui de l’immeuble et qui, depuis le confinement pendant lequel il était inoccupé, a entrepris de retracer l’histoire des 40 juifs qui l’habitaient jusqu’à la shoah et ont été déportés.
Un peu comme si aujourd’hui se rencontraient les trois Jean.
Le premier, né en 1931 et décédé tragiquement en 1944, le second, né en 1950 et nommé du nom du premier, et le troisième, auteur de ces lignes, né en 1955, et investi plus inconsciemment - et comme épigénétiquement - que nommément de l’histoire du premier.
Ces trois Jean ont grandi de façons bien différentes.
Le premier, comme ma mère, comme la plupart des enfants juifs du 18ème à cette époque, était fils de migrants récemment débarqués en France, et donc assez peu francophones. Il allait à l’école communale du quartier, rue Ferdinand Flocon qui est dans le prolongement de la rue Ramey, il étudiait le violon, avait un père menuisier, et une mère née Tauber, et soeur de ma grand-mère.
Le second, comme beaucoup d’enfants nés dans l’immédiate après guerre, et qui plus est quand leurs parents étaient directement endommagés psychiquement et physiquement par quelque temps passé à Auschwitz, grandit dans le même quartier, à peine à une rue de distance, allait dans presque la même école, connaissait les mêmes commerces juifs, habitants migrants alors et rescapés aujourd’hui, fréquentait une fois l’an la même synagogue rue sainte Isaure où s’était forcément rendu maintes fois son homonyme, et avait un vécu du shtetl d’après-guerre, celui où les juifs étaient surtout occupés à panser leurs plaies, à redémarrer économiquement et en tant que citoyens. Un shtetl où tout vibrait encore en yiddish dans les maisons mais où il fallait avant tout s’intégrer à la vie politique et sociale, un shtetl où le communisme laïc avait remplacé la pratique des temps reculés, que la plupart des habitants du quartier avaient en commun d’avoir fuie, un shtetl dans lequel le judaïsme était tripal plutôt que transmis. Il était enfin nommé exactement du nom du premier Jeannot, Yoynaleh en yiddish et à la maison, Jean à l’école, et Jeannot dans la famille.
Le troisième, moi, grandis différemment, immergé jusqu’au cou dans le monde non-juif tout en évoluant dans le cadre du judaïsme libéral, où l’on pratiquait peu mais avec ferveur et surtout ferveur de transmission du bagage de la tradition de l’importance de l’étude juive.
Jean Borenstein est un titi du 18ème arrondissement, à qui on parlait en français, à qui on n’enseignait rien du judaïsme, mais qui vivait au rythme des élans juifs, au bund ou au dror, et dans les colonies de la cce. De son homonyme, il savait presque uniquement l’existence et la disparition mais comme reçues à mi-mots, dans la répétition mais sans détails. Il grandissait dans un milieu fortement imprégné du traumatisme mais où cela n’était pas dit.
Je sus quant à moi l’existence et la disparition de Jeannot aussi tôt que je sus comment je m’appelle…mais il était affirmé haut et fort que je n’étais pas ni le guilgoul ni la réparation de la disparition du premier Jean…avec force d’arguments : « premier Jean qui s’appelait d’ailleurs Jeannot alors que personne ne m’a jamais appelé ainsi, alors que mon nom hébraïque est Yoh’anan, et non Yonah » arguments maintes fois répêtés. Je ne ressens pas avoir été baigné ni dans l’angoisse de survie, ni dans le post traumatisme. La shoah était racontée, ou plutôt l’histoire familiale de la vie pendant la shoah, l’exode de 1940 de Paris à Prades, la vie à Prades, et aussi l’irruption des allemands en février 1944, la cavalcade dans la maison vers la cachette, puis le départ de la maison, l’éclatement de la famille qui s’en suivit entre ceux qui partirent chercher un nouveau lieu de résidence, ceux qui partirent « dans le maquis », vers Palmes, Lonia qui fut recueillie par l’institutrice de sa fille Odette, puis la tragique arrestation de juin 1944, de Jeannot et de ses parents en compagnie de Léni et de Simon Borenzteijn, tout ceci était raconté. Pour l’autre côté de mon ascendance, la tragique arrestation de ma grand-mère paternelle m’est aussi connue depuis toujours. La disparition à Sobibor de la famille qui était restée en Pologne était aussi contée.
Mais existe-t-il la mauvaise d’un côté et la bonne façon, de l’autre, de survivre après la shoah ? Non bien évidemment. J’attribue ainsi à la façon dont les choses m’ont été à la fois racontées et non racontées, dont les liens entre le présent et le passé étaient faits ou niés, un certain nombre d’aspects de ma personnalité et de modes de gestion de l’angoisse de mort chez moi, eux-mêmes appartenant à la catégorie du post trauma.
L’impression dominante, entre autres après cette rencontre historique dite « des trois Jean », ce 14 juin 2022, est que le temps de ces 78 ans depuis la disparition de Jeannot aura vraisemblablement été incompressible, tant aussi bien Jean que moi n’aurons-nous pas été passifs, pour opérer comme une syncrésie de l’éclatement provoqué par notre shoah.
Le tour du quartier que nous fit Jean, quartier où lui et Jeannot grandirent, un avant guerre, le second dans l’immédiat après-guerre, me fut comme une mise en lumière des aspects de cet éclatement, tant Jean et moi ayons été aux antipodes l’un de l’autre à son égard.
Comme au cours de ce tour que nous fîmes ensemble, depuis la rue Ramey (où vivaient Jeannot et ses parents avant guerre), à la rue Labat (où vivaient Jean Borenstein et ses parents après guerre), en passant par la rue Lambert ( où se logeaient les récents immigrés des années 20), le square Clignancourt (où tous jouaient enfants), la rue Ordener (où vécut Odette), la rue Ferdinand Flocon (où est l’école où étudiait Jeannot), la rue Doudeauville (où vivaient mes grands parents jusqu’en 1933, avant de passer rue de Bercy), la rue Lamarck (où vit Yvette encore aujourd’hui) et le passage Ramey(au coin duquel était l’usine de matzot Rozinski), la synagogue rue sainte Isaure, se succédaient, se chevauchaient les multiples facettes, conscientes et inconscientes, et successives de ce post traumatisme et se trouvent illustrées les mille et une façons d’être juif au vingtième siècle.
Et quant au 38…un peu triste que tant de personnes aient été déportées depuis un lieu si joli, et si particulier. Il s’agit donc d’un carré d’immeubles, à 6 entrées…mais seulement depuis la cour intérieure à laquelle on n’accède que par le 38. Avec une cour intérieure isolée des bruits de la rue, où des enfants peuvent jouer, où a été développé un jardin comme tropical, de végétation luxuriante. Et cerise sur le gateau : parmi les célèbres occupants est né en 1936 et a grandi un certain Marcel Gottlieb…qui devint Marcel Gotlib de qui aucun amateur de bd’s des années 70 et suivantes n’ignore le nom.
"je dis tu à tous ceux qui s'aiment, même si je ne les connais pas" :)
RépondreSupprimerbravo pour le blog...et pour les photos de la Troche !
Laure
Bon anniversaire, de la famille Pisante et associes... Les photos sont vraimetn belles1
RépondreSupprimerBON ANNIVERSAIRE DE TOUS LES MALLAH + David + Ariel
RépondreSupprimerAD MEAH KE ESSRIM. oui je prends le risque même en t’ayant connu a cet âge la.
Bonjour, j'ai trouvé par hasard sur votre blog le nom d'un monsieur Arnold Tauber. Si jamais il été ebeniste dans sa vie, habitant de 11ème arrondissement, j'aimerais bien vous contacter, c'est une histoire de famille. Merci, Vero (13greenandgold@gmail.com)
RépondreSupprimerSalut Jean c'est pipo tu as probablement changer d'adresse mail moi aussi voici ma nouvelle adresse mistoufle39@gmail.com. écrit moi à cette adresse stp
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