dimanche 25 février 2024

Réflexions après bientôt cinq mois de guerre.

 



La guerre a donc commencé par la barbarie et nous a surpris un jour de fête et en phase de veille de reprise de nos affrontements internes gauche-droite.

Combien cette tension intra israélienne a-t-elle été responsable des évènements, en ayant affaibli l’efficacité des services de renseignement et notre vigilance, et en ayant donné au hamas illusion de suffisante faiblesse israélienne ? Les enquêtes répondront à ces questions.

La réaction le jour du 7 octobre a été encore sous le signe de la surprise et sont tombés grand nombre d’innocents, de la double faute de la surprise et de la lenteur à la mise en route.

Suite à cela, la capacité du peuple a été impressionnante, par le nombre de réservistes qui ont répondu ou même devancé l’appel (quelques 130%), et par le vaste mouvement de volontariat, bénévolat, solidarité, reléguant le clivage gauche-droite à l’arrière-plan, qui se poursuit encore aujourd’hui, auquel s’est ajoutée une mobilisation des juifs (et quelques non-juifs). de nombreux pays qui sont venus ici en particulier faire de la cueillette et du volontariat en hôpital.

En parallèle, l’opération militaire s’est petit à petit développée mais a suscité très vite la mise aux oubliettes de la barbarie, avec dénis et doutes au sujet de la barbarie sexuelle, et de plus en plus fort le concert des nations pour dénoncer cette opération militaire réactive, sous prétextes indigestes (et injustifiés) de disproportion et de génocide.

Les premiers à avoir usé du terme génocide sont l’autorité palestinienne, abondamment suivis par la gauche et extrême gauche (islamo gauchiste) européenne et américaine, et aussi par les appels de plus en plus répétitifs si ce n’est menaçants à cessez-le-feu et sortie de l’armée de Gaza « avant tout ».

Les palestiniens bien entendu alimentant ce feu de ce concert aux sons de condamnation de « l’occupation », de « la violence » et de « l’apartheid ». Autant de termes qui sont indigestes (parce qu’injustifiés et parce que scandaleux) à l’israélien que je suis, en ayant bien la conviction d’être représentatif de la majorité des citoyens du pays.

Israël n’occupe pas Gaza depuis presque vingt ans. Israël et l’Egypte régulent (ont échoué à réguler s’avère-t-il depuis le 7 octobre) les subsides alloués aux pauvres habitants de la bande de Gaza, et le concert international qui appelle cette régulation « blocus » et « prison à ciel ouvert » n’accuse qu’Israël (et non l’Egypte) de cette situation, dont il se dévoile a posteriori combien elle était impérative (et aurait dû être encore plus contrôlée) tant le hamas a détourné tout ce qui était destiné à la population à des fins guerrières et meurtrières et génocidaires uniquement.

Le concert se poursuit. Il faudrait interrompre au plus vite l’opération militaire, qui menace la situation sanitaire, qui est génocidaire, qui parait odieuse parce que guerrière aux bien-pensants du monde occidental aux yeux de qui rien n’est plus condamnable que la violence et la guerre, peu importent les situations sur le terrain.

Et précisément qu’avons-nous aujourd’hui sur le terrain ? Nous avons encore134 otages (dont il est bien clair qu’une partie n’est plus en vie - peut-être une grande partie…? ), et l’arsenal militaire du hamas qui n’est pas du tout neutralisé (tunnels, armement et munitions). Nous avons affaire à une conviction internationale grandissante que les israéliens mènent et souhaitent une politique d’apartheid, refusant de donner des droits citoyens égaux aux arabes et aux juifs.

Et surtout se pose et se re-pose la difficile question du langage à tenir face au monde palestinien et arabe.

L’extrême-droite israélienne (Ben Gvir, Smotritch, Struck comme principaux porte-voix…entre autres de Natanyahou) martèle encore et encore qu’il faut plus de force, plus de rigueur dans la politique et dans les réactions, arguant surtout que le langage du dialogue et de la non-violence ne sont interprétés que comme de la faiblesse par les palestiniens. Je ne considère en fait ces personnages non comme représentatifs de ce qui s’appelle en Europe extrême droite, dans la mesure où il ne s’agit pas de xénophobes libéraux purs et durs, identifiés à une idéologie fasciste de base, mais comme sionisto-centrés, l’histoire du sionisme et de la présence juive sur cette terre passant à leurs yeux comme prioritaire à tout.

Pour ces faucons, notre présence est contestée ici par principe par les palestiniens et la gauche islamo gauchistes, qui ne nous considèrent que comme des colonialistes, ambassadeurs de l’impérialisme américain, qui refusent d’accorder le moindre crédit au sionisme, et le seul langage que nous devons tenir est celui de l’assurance accompagnée de vigueur.

D’une part je ne me sens pas m’associer à un discours aussi réductif de l’interlocuteur, « qui ne comprendrait que le langage de la force », ni idéologiquement ni dans un regard sur le long terme (que cultive-t-on chez une population avec la force et la crainte si ce n’est l’hostilité, la haine et le désir de revanche?).

D’autre part, force nous est de faire un bilan au moins provisoire : nous avons été bernés par le hamas (qui n’a mené aucune politique de construction, de développement, mais qui s’est entièrement et uniquement voué à chercher comment nous supprimer de la carte, considérant que nous sommes illégitimes autant à Tel Aviv que dans les territoires occupés), et nous constatons qu’ils ne sont que l’à peine exagération de ce que pense aussi la direction de l’autorité palestinienne. Nous avons été trahis par la soi-disant force pacifiste intermédiaire et neutre (l’UNRWA dont nous disions souvent mais sans vraiment agir pour rétablir qu’ils étaient franchement et au service des palestiniens et cherchant à maintenir une situation de population en détresse plutôt qu’à faire passer des réfugiés au stade de citoyens tournés vers le développement). Le message éducatif (comme maintes et maintes découvertes et témoignages l’ont mis clairement à la face du monde) propagé chez les enfants palestiniens est uniformément un message de haine, nullement un message de construction, en triste miroir de ce qu’est le message principal adressé aux enfants israéliens, message parfois trop univoque mais non fondé sur la haine de l’autre.

Et c’est principalement ce sujet du message qui doit dicter la conduite à adopter pour l’avenir.

Il ne peut être attendu des israéliens qu’ils soient unanimes sur un message occidental laïque.

La composante religieuse est ici partie prenante. Les israéliens ne doivent pas être considérés comme une nation européenne laïque, au sein de laquelle la composante biblique est uniquement affaire de culte.

Les israéliens n’ont pas un pays en unique compensation à la shoah, et afin qu’ils soient protégés. Le mouvement sioniste est bien antérieur à la shoah et est la continuité du message juif plurimillénaire selon lequel cette terre est celle du peuple juif.

Les tristes évènements du 7 octobre 2023 sont venus illustrer et rappeler qu’Israël est le lieu au monde où la vie des juifs est le plus en danger. Et pourtant le consensus israélien est que « nous n’avons pas d’autre terre » et c’est un consensus enraciné dans le texte biblique et dans l’histoire juive.

La conduite et la politique à adopter doivent prendre cet élément en compte, il en résulte par exemple que le peuple continuera probablement à donner la préférence à un gouvernement qui fera une place à cette composante plutôt qu’à un gouvernement nourri surtout aux valeurs occidentales modernes.

Cette composante biblico-religieuse est aussi aux sources de l’opposition arabe à notre présence et surtout à notre souveraineté. Il faudra obtenir gain de cause mais l’argument ne saurait n’être que militaire parce que tel quel il ne sème que la révolte et l’opposition et la situation qui en résulte n’est que provisoire « jusqu’à la prochaine guerre », comme a tenté de le réaliser le 7 octobre.

Nous devons exercer notre souveraineté sans concessions. Nous devons agir en fonction de la Torah, qui nous dit que cette terre est la nôtre, mais qui n’exige pas moins de nous toute une conduite.

À nous de donner aux non-juifs qui résident parmi nous le meilleur statut possible, en fonction de leurs intentions, d’un consensus qui doit s’établir avec nous.

L’UNWRA et le hamas se sont de mon point de vue totalement et définitivement disqualifiés pour l’après cette guerre, et le système éducatif des palestiniens doit figurer au même plan que les résolutions concernant leur armement. Les évènements du 7 octobre imposent que Gaza soit non dirigée par le hamas, non protégée par l’UNRWA et aussi démilitarisée et que le message éducatif y soit profondément modifié.

Les palestiniens doivent ne pas conserver de génération en génération le statut de damnés de la terre-réfugiés, ils doivent bâtir leur identité nationale et construire des tunnels s’ils aiment ça, mais pour y faire un métro et non pour y dissimuler un arsenal.

 

Le monde occidental épris de non-violence est prié d’accorder un peu plus d’attention à cette situation de 134 otages femmes, enfants, malades et personnes âgées, et à ce que symbolise le fait que le pays dans sa grande majorité vit à ce rythme. Ceci afin de mettre une sourdine à cet appel compulsif à la paix.

Les israéliens doivent maintenir le sionisme en vie (au cours des vingt dernières années le spectre du post-sionisme a été maintes et maintes fois brandi) de manière à conserver à ce pays une identité juive avant occidentale, mais le spectre du fondamentalisme doit aussi être le signe de l’axe non fondamentaliste qu’il convient de conserver.

Il faudra probablement du temps avant que puisse se recréer un dialogue israélo-palestinien (il faudra en préalable entendre suffisamment de voix qui expriment leur désaveu des évènements du 7 octobre, voix absentes jusqu’ici) mais il est impératif (et primordial) de ne pas retomber dans ce clivage intra-israélien…qui parait pourtant loin de s’atténuer.

 

1 commentaire:

  1. Bravo pour cette analyse rétrospective et surtout cet essai prévisionnel qu’on voit peu actuellement !

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