vendredi 27 mars 2015

Maïmo 5ème et dernier chapitre . Par villes et par monts.




Le clou de l'année scolaire 1979-80 fut bien entendu la classe de neige, à laquelle partirent les deux classes CE2 et CM1, en cette deuxième moitié de janvier 1980.

Ce fut une véritable aventure, qui consistait d'une part à emmener comme une colonie de vacances - mais pour cela le cadre et l'infrastructure existaient : nous étions dans la maison du fsju de Chamrousse qui avait déjà hébergé des quantités de sessions de vacances et où fonctionnait une équipe (de cuisine d'intendance et de soutien matériel) rodée - mais surtout ce fut non moins un défi qui consistait à réussir à maintenir l'enseignement pendant deux semaines malgré le massif changement de contexte.

Je ne sais plus dire pour combien d'enfants la situation d'éloignement des parents était nouvelle, mais il était clair que cela concernait un certain nombre.

L'équipe d'encadrement comprenait deux enseignants, Edith -  l'institutrice de ce2, et moi, auxquels s'étaient ajoutés en renfort quelques personnes : Marianne - qui était alors enceinte d'environ 6 mois, nous attendions l'arrivée d'Ayala -, le mari d'Edith si mes souvenirs sont bons (à moins qu'il ne nous ait rejoints que pour le shabbat ?), Claude aujourd'hui Mallah, et un madrikh dont j'ai bien peur d'avoir oublié le nom. 
Il me semble que la maison de Chamrousse était sous la direction de Sima Koloboff (Renne de son totem), et donc en sa présence, et le directeur de l'école, David Messas (zal), vint nous rejoindre le shabbat accompagné de son épouse  (ce qui nous valut un très intéressant commentaire privé de la paracha le vendredi soir dont je me souviens encore partiellement).

Pour Claude, Marianne et moi, si la partie "classe de neige " était nouvelle, la partie encadrement d'un groupe d'enfants loin de leur foyer était loin de l'être : la direction de camps e.i.s était comme notre seconde peau, c'était un sport auquel nous étions rompus.

Les photos retracent une partie de l'ambiance de ce qui fut en fin de compte plus une colonie qu'une classe de neige, mais s'il fut possible de photographier des enfants assis en classe c'est bien qu'ils le furent, et même est-il possible de voir la façon dont nous avons réussi à nous créer un "tableau noir"..

De plus, les diapositives attestent de plusieurs séances d'intérieur, certaines évoquant l'oneg shabbat ou son équivalent de jour de la semaine, certaines montrant telle activité déguisée, certaines témoignant de la tefila, des conditions de logement et d'alimentation.
Le cuisinier était très bon, il nous avait impressionné par un mémorable hachis parmentier..

Pour la classe de cm1, c'était l'entrée en scène "officielle" de Marianne qui connaissait déjà les enfants par ce que je lui racontais quotidiennement, mais qui pouvait ainsi faire véritablement connaissance.

Cette classe de neige se positionna clairement au centre de mes souvenirs de cette année, et je suppose qu'elle a laissé un vif souvenir chez bon nombre de ceux qui y participèrent. 

L'année comporta aussi bien entendu bon nombre de situations, d'activités, et même de sorties comme le montrent les quelques photos suivantes.










L’année suivante, alors que je ne le sentais pas encore formellement, j'étais déjà en route vers l'étape suivante de mon exercice professionnel. Je pense qu'il en est ainsi dans la plupart des domaines : nous vivons notre vie par étapes, par tranches, et le passage d'une étape à l'autre ne se fait pas en général de façon tranchée et sur un jour, celui où nous quittons un lieu pour en investir un autre, mais elle se profile encore avant, en filigrane, de telle manière que cela n'est qu'a posteriori qu'il est possible d'identifier le phénomène.

L'étape suivante en ce qui me concerne fut mon activité d'éducation et d'enseignement non plus avec des enfants d'école primaire, mais avec des lycéens en fin d'études secondaires. 

Cette année, j'avais commencé plus intensivement à effectuer ce passage : j'étais investi plus profondément dans la formation des animateurs des e.i.s, et nous avions commencé une activité qui fut une de ses articulations : l'oneg shabbat pour animateurs, un shabbat sur deux à Ségur. C'était un oneg "pour jeunes adultes que l'on prend au sérieux et qu'on ne cherche pas uniquement à animer" en trois parties : parachat hachavoua, chant de zmirot et "nakh" si je puis m'exprimer ainsi. Je reviendrai sur cette activité, dont le mérite revient pour une large part à son initiateur Ami Bouganim ; ce qui nous concerne ici est que cette parachat hachavoua, qui reposait sur moi, opérait mon déplacement d'investissement. 

J'ai écrit plus haut que je n'enseignais à mes élèves de l'école primaire ni les enseignements de Manitou, ni ceux de Lévinas, et... je mourais d'envie d'ainsi faire, ce qui ne se produisit en fait formellement qu'à partir de septembre 1981 mais dont cet oneg fut le premier jet.

Entre temps, j'enseignai encore à Maïmo, en parallèle de mon année de licence de psycho. qui me fit commencer à timidement exercer la psychologie, par une mise en situation – de stagiaire - qui se produisit dans un gapp ( Groupe d'Aide Psycho Pédagogique) , service psychologique attenant à une école, où j'eus à suivre pour la première fois deux enfants en suivi psychothérapique individuel. 

J'avoue n'avoir que peu de souvenirs de cette dernière classe dont je fus l'instituteur, le ce1 de l'année 1980-81, effectuée entièrement au nouveau 11 rue des Abondances, dans des locaux flambant neufs mais qui avaient beaucoup moins de charme, beaucoup moins de marroniers, de gravier et d'odeurs de vieille France. Ayant eu l’occasion récemment de retrouver par hasard un des élèves de la classe, je sais qu’il a, lui, gardé un bon souvenir, mais je ne sais plus rien des autres.

Peut-être cette chute mémorielle est-elle dûe à notre alyah, qui devait s'effectuer en fin de cette dernière année ? Une partie de l'année fut quand même consacrée à sa préparation, et peut-être y avait-il comme une certaine tension, du fait que l'horizon ne semblait pas tout rose : d'un côté, j'étais déterminé à devenir psychologue clinicien, c'est à dire à faire la quatrième et la cinquième année d'université qui constituaient  le M.A. dans le système israélien et la condition sine qua non à l'exercice de la  psychologie. Un M.A très difficile d'accès, auquel étaient admis très peu d'étudiants. L'écrémage se faisait sur la base d'un examen - qui existe toujours, qui est devenu israélien depuis longtemps  - mais qui à l'époque  était encore un examen américain. Je me présentai à ce "g.r.e" alors que la conseillère du M.A. m'avait généreusement prévenu l'été d'avant quand j'étais allé la consulter : "ne vous présentez pas, vous n'avez aucune chance". D'après elle, le triple fait que l'écrémage était très sévère, que l'examen était américain, et que j'avais étudié en France, c'est à dire complètement différemment de ce qui s'enseignait en Israël, ne laissait aucune part au doute. La suite montra qu'elle n'avait pas toujours raison et cela aussi je le raconterai plus loin.

Le pendant de cette alternative étaient les e.i.s, qui étaient en "solution de continuité" et qui m'avaient sollicité pour que je devienne commissaire général, allant même jusqu'à se rendre en délégation auprès de mr Messas pour lui demander de me libérer de mes obligations encore en cours d'année, ce qu'il refusa.




Tandis que j’enseignais dans ma classe de ce1 - je n'étais déjà plus débutant, au point qu'on m'avait déjà envoyé une stagiaire que l'on ne voit pas sur la photo -, je menais en parallèle tous ces processus : je planchais pour préparer puis pour passer cet effrayant g.r.e, et je m’acquittais des tâches  universitaires nécessaires au bouclage de ma licence, sans oublier qu'étant devenu père, j'avais désormais un autre emploi du temps, un autre pôle d'attraction.

J'étais donc littéralement un pied en France et l'autre presque en Israël, et c'est mi de l'extérieur mi de cet intérieur que survint l'élément qui emporta la décision et le mouvement : un beau jour du mois de juin, on vint précipitamment me chercher du secrétariat de l'école pendant le repas de midi, j'avais un appel téléphonique d'Israël. 

Un certain Claude Sitbon que j'avais connu l'été précédent dans un cadre e.i. alors que lui-même était provisoirement en poste en France, me proposait de prendre la direction d'un des internats du « lycée français de Jérusalem ».

Les choses prirent clairement leur virage au moment où nous prîmes la décision de donner une réponse positive. Ainsi s'achevait notre vie en France. Pour Marianne, issue d'une famille installée en France depuis plusieurs centaines d'années c'était un véritable cap. Pour moi dont la famille n'était arrivée que 60 ans plus tôt, c'était un peu la fin d'une parenthèse.

Pour moi, s'achevaient aussi six ans à Maïmonide, un lieu où je me suis plu, épanoui, et dont l’évocation entraîne sourires et émotion, six ans dont cinq d'enseignement dans le primaire. La suite allait être dans le secondaire, puis dans l'enseignement supérieur. 

Je décrirai aussi cela.


2 commentaires:

  1. Ah cette classe de neige... Les premiers pas à ski... Cette bouteille d'eau que l'on avait laissé exploser à l'extérieur pour démontrer que la glace occupe un volume plus important que l'eau... Et la soirée mémorable de radio-crochet... Je me souviens de la chanson que nous avions composé pour toi, impressionnés que nous étions par ta technique du silence pour obtenir notre silence :
    "Jean attend !
    Jean attend !
    Les élèves, les élèves, les élèèèves
    Jean attend !
    Jean attend !
    Les élèves, les élèves, les élèèèves
    Monsieur une mouche m'a piquééé ! "

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    1. Super commentaire....mais à la limite de l'anonymat. Bonsoir sleb ! (Moi je t'ai découvert, mais je ne te "livre" pas.

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